crédit photo: Marc-André Mongrain
Festival Boston Calling

Boston Calling 2022 | Quand Nine Inch Nails sauve (littéralement) un festival…

Qu’on ne vienne pas me dire que les festivals qui programment du hip-hop sont les seuls à devoir gérer des annulations…

Parlez-en aux organisateurs de Boston Calling, un festival à forte tendance rock, qui se tenait le week-end dernier au complexe d’athlétisme de Harvard.

En décembre 2019, le festival confirmait que Rage Against The Machine allait prendre part à son édition 2020.  Ça a été annulé en raison de la pandémie.

Qu’à cela ne tienne, Rage Against The Machine était re-confirmé pour l’édition 2021… qui n’a pas eu lieu non plus.

Puis, RATM était confirmé de nouveau pour l’édition 2022, mais à quelques mois d’avis, le groupe a annulé une partie de sa tournée… dont sa présence à Boston Calling.

Le festival a trouvé des solutions, et a annoncé que les Foo Fighters allaient jouer le vendredi, The Strokes le samedi, et Metallica le dimanche. Beau trio de têtes d’affiche pour les trentenaires et quarantenaires qui carburent au rock des trente dernières années.

Or, comme on le sait, le batteur des Foo Fighters, Taylor Hawkins, est décédé le 25 mars dernier, et les Foo Fighters ont annulé leur tournée. Boston Calling devait donc se dénicher une nouvelle tête d’affiche pour le vendredi. Ils ont fait appel à Nine Inch Nails.

Puis, à 24 heures d’avis, on apprend qu’un des membres de The Strokes a testé positif à la COVID. Une autre tête d’affiche à remplacer, la veille du spectacle…

Tout ça, sans compter que King Gizzard and the Wizard Lizard a aussi dû annuler en raison d’un cas de COVID, et que Celisse et Frances Forever n’ont pas pu monter sur scène, en raison d’un violent orage qui a causé l’arrêt du festival pendant près de deux heures samedi. Il pleuvait des tuiles à Boston.

Mais pour en revenir à la tête d’affiche du samedi, Trent Reznor et sa bande ont joué les sauveurs en acceptant d’offrir une deuxième prestation en deux soirs pour remplacer The Strokes.

Pas qu’on allait se plaindre d’avoir droit à près de quatre heures de Nine Inch Nails en deux soirs !

Surtout que Trent Reznor et ses musiciens — le guitariste Robin Finck, le claviériste Atticus Ross, le bassiste et claviériste Alessandro Cortini et le foudroyant batteur Ilan Rubin — sont dans une forme olympienne et proposent un show plus pertinent que jamais.  Que dis-je… DEUX SHOWS plus pertinents que jamais !

Parce que non seulement Nine Inch Nails a offert deux spectacles en deux soirs, ils en ont offert deux complètement différents !

Vendredi soir, le groupe a probablement joué la même grille de chanson que s’ils n’avaient joué qu’un seul soir, c’est-à-dire un enchaînement endiablé de pratiquement toutes les grosses tounes du riche répertoire de NIN : Wish, March of the Pigs, Piggy, Gave Up, Sanctified, Burn (qui figurait sur la trame sonore de Natural Born Killers), I’m Afraid of Americans (chanson de David Bowie que Reznor a produite) et une finale en force avec The Hand That Feeds, Head Like a Hole et Hurt. 

Le tout dans une scénographie de haut calibre : pas d’écran en fond de scène, simplement des grands drapés blancs qui absorbent les couleurs de l’éclairage, souvent eux-mêmes minimalistes.  Le jumelage des éclairages et de la glace sèche conférait aux chansons des airs de tableaux apocalyptique, devant lesquels le groupe jouait la trame sonore de la fin du monde… Une sacré claque !

Le lendemain, NIN reprenait là où ils nous ont laissé avec une violente version de Mr. Self Destruct. Mais la suite des choses allait être fort différente de la veille : quelques chansons du chef d’oeuvre The Fragile, puis plusieurs titres moins connus, issus du matériel que le groupe a lancé dans les années 2000.

C’est courageux de la part d’une tête d’affiche d’offrir une grille de chansons constituée principalement de « deep cuts », pour une foule qui n’avait pas acheté ses billets pour les voir. Le segment avec Shit Mirror, God Break Down the Door (au cours de laquelle Trent Reznor a joué du saxophone!) et Echoplex en était un bon exemple.

Ce deuxième set était donc un peu moins « à fond la caisse », mais pourtant, les jeux d’éclairages étaient davantage colorés, comme un parfait contrepoids à la veille.

D’ailleurs, ils ont refait un autre clin d’oeil à David Bowie en interprétant, cette fois, la très pop Fashion.  Le trio The Hand That Feeds – Head Like a Hole Hurt a tout de même conclu le spectacle, comme la veille. On ne peut quand même pas sacrifier une finale aussi payante !

Vraiment, Boston Calling peut se compter chanceux d’avoir eu accès à un plan B de luxe comme Nine Inch Nails, qui a véritablement donné un leçon de tête d’affiche, en plus de faire preuve d’une belle humilité en remerciant chaudement les fans pour leur clémence et leur accueil chaleureux, et de lancer à la blague :

Quand on a commencé, il y a plus de trente ans, je n’aurais jamais cru qu’on serait un jour le groupe fiable, le band sur qui on pouvait compter. Alors si vous avez un mariage, un bar-mitzvah, des plantes qui ont besoin d’être arrosées durant votre absence : appelez-nous. On est là pour vous.

 

Grille de chansons du vendredi

Somewhat Damaged
Wish
Less Than
March of the Pigs
Piggy
The Lovers
Heresy
Reptile
Copy of A
Closer (avec The Only Time intégrée au milieu)
Sanctified
The Perfect Drug
Burn
Even Deeper
Survivalism
I’m Afraid of Americans
Only
Gave Up
The Hand That Feeds
Head Like a Hole
Hurt

Grille de chansons du samedi

Mr. Self Destruct
The Day the World Went Away
The Frail
The Wretched
Wish
Last
Sin
This Isn’t the Place
Me, I’m Not
The Line Begins to Blur
Terrible Lie
Letting You
Shit Mirror
God Break Down the Door
Echoplex
Every Day Is Exactly the Same
Suck
Fashion (reprise de David Bowie)
The Hand That Feeds
Head Like a Hole
And All That Could Have Been
Hurt


 

43 chansons, dont seulement quatre en commun d’un soir à l’autre. Difficile de faire mieux en matière de « dépannage »…

Metallica, Weezer, Run The Jewels et le retour du punk pop !

Bon, il n’y avait pas que Nine Inch Nails à Harvard ce week-end. Mine de rien, Metallica était la seule tête d’affiche annoncée et présentée comme prévue.

Force est d’admettre que Québec n’est pas la seule ville où James Hetfield et sa bande sont rois et maîtres : le site de Boston Calling était plein à craquer dimanche, et nombreux étaient les gaminets de Metallica sur place !

* Photo par Jeff Yeager.

Fidèles à leurs habitudes, les vétérans du heavy métal ont offert un spectacle bien rodé, pigeant autant dans leur répertoire des années 1980 (Whiplash, Ride the Lightning, Seek & Destroy, Creeping Death) que parmi les succès du Black Album, comme Sad But True, Wherever I May Roam, et bien entendu, Enter Sandman et Nothing Else Matters. Un peu surpris que le groupe n’ait pas joué The Unforgiven mais sinon, les grands titres ont été abordés, dont les grandioses Master of Puppets et One, interprétées avec brio par des musiciens toujours en possession de leurs moyens.

C’est drôle de penser que James Hetfield et Trent Reznor ont grosso modo le même âge (à peine un an et demi de différence), mais bien que les deux cinquantenaires aient vieilli différemment, les deux conservent les qualités nécessaires pour demeurer pertinents, chacun à leur manière.

Hetfield s’est beaucoup attendri au fil des ans, et multiplie les bons messages, surnomme la foule « the Metallica family » et incite qui veut bien l’entendre à chercher de l’aide en cas de détresse. Et dire que nos mères avaient peur qu’ils nous transforment en monstres violents quand on était jeunes !

Juste avant Metallica, Weezer a donné un show passablement molo, mais c’est toujours rassembleur de chanter Island in the Sun, Say It Ain’t So et Buddy Holly en choeur avec des dizaines de milliers de personnes.

Même chose pour Run the Jewels, qui donne toujours un bon show, surtout avec un répertoire désormais bonifié par un excellent quatrième album, sorti en pleine pandémie. Ça va lever en première partie de Rage Against The Machine au Bluesfest d’Ottawa en juillet !  (Et dommage pour les festivaliers du Festival d’été de Québec, qui a mystérieusement éclipsé RTJ au profit des plus populaires mais moins pertinents Alexisonfire et Grandson…)

Le retour du punk-pop a aussi été constaté sur le site, avec Avril Lavigne qui a été accueillie en princesse emo, et KennyHoopla, dont les chansons s’inspirent visiblement du genre.

 

Pour les adeptes de pop-soul, Black Pumas est une valeur sûre qui donne un très bon show, qu’on imaginerait bien dans un festival de jazz… Alors que Orville Peck serait un choix intéressant pour LASSO, lui qui offre un country juste assez bizarre pour être apprécié par les adeptes de musiques plus nichées.

Dernière petite mention pour le très rigolo Oliver Tree, dont le spectacle a été retardé d’environ dix minutes, puisque les parents du petit Charlie ont perdu leur enfant. Alors le festival a publié une photo du petit Charlie afin que la foule aide à le retrouver, ce qui a pris environ 12 secondes. Ça lui a valu un « Charlie! Charlie! » scandé par la foule à l’unisson. Beau travail du festival !

Dans l’ensemble, Boston Calling a réussi à offrir un très beau week-end aux milliers de festivaliers réunis.

Sur les réseaux sociaux, des centaines de festivaliers ont manifesté leur frustration face aux changements assez majeurs à la programmation et au refus du festival d’offrir un remboursement, mais sur place, l’ambiance n’en a pas souffert.

En ce qui nous concerne, c’était une expérience tout à fait réussie pour un premier festival hors-Canada en près de trois ans !

 

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