Francouvertes

Francouvertes 2017 | Lydia Képinski remporte la finale !

Sans grande surprise, Lydia Képinski a remporté les grands honneurs lors de la finale des Francouvertes, lundi soir au Club Soda. Une des meilleures finales qu’on a eu l’occasion de voir depuis quelques années, d’ailleurs.

Ça faisait effectivement quelques années qu’on n’avait pas vu à l’oeuvre trois finalistes des Francouvertes qui nous donnent pleinement envie de retourner les voir en spectacle dans quelques mois. Trois créateurs aux propositions singulières, dont le potentiel pourrait exploser dans la prochaine année. Aucun choix qui fait sourciller. Aucun « je ne comprends pas trop ce que (tel artiste) fait là, en finale ».


Les Ex / porte-paroles

Avant même que les trois principaux intéressés se succèdent sur scène, les deux porte-paroles nous ont offert une courte prestation. Rosie Valland a d’abord « cassé une nouvelle toune » seule avec sa guitare, devant un Club Soda plutôt bien rempli. C’était le mot d’ordre pour les ex qu’on nous présentait en ouverture de chacune des soirées des Francouvertes cette année : tester une nouvelle chanson toute fraîche devant public. « Si j’ai un conseil à donner aux finalistes, c’est de ne pas casser de nouvelles tounes au Club Soda », admettait Rosie Valland, visiblement aussi nerveuse que les participants. Sa nouvelle chanson était pourtant tout à fait charmante, à défaut d’être un apéritif hop-la-vie. Pas grave. Le public des Francouvertes est capable d’en prendre ; on n’est pas dans un show de variété.

Fraîchement débarqué de deux mois au Pakistan (pour vrai), son co-porte-parole Philippe Brach est venu la rejoindre sur scène avec son plus beau look d’Israélite et son aise légendaire. Un petit duo Rosie/Brach — ces deux voix-là s’agencent très bien d’ailleurs… — et hop, le beau frisé y va de quelques interventions rigolotes, soulignant au passage que « on est probablement les deux porte-paroles les plus dark de l’histoire des Francouvertes », avant d’offrir une chanson effectivement assez sombre, mais vraiment bien écrite.

La table est mise. C’est parti…

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Laurence-Anne

D’emblée, une petite constatation : Laurence-Anne est de loin le projet le plus « band » du lot ce soir. On se demande même pourquoi c’est Vincent Roberge qui porte le nom Les Louanges, sobriquet au pluriel de surcroît, alors que la bande à Laurence-Anne porte le nom de Laurence-Anne.

Pas que Laurence-Anne soit peu convaincante seule. Loin de là. La toute dernière chanson du set nous a d’ailleurs convaincus qu’un spectacle solo de Laurence-Anne, ça fonctionnerait. Sa voix est un genre de croisement entre celles de Fanny Bloom et de Maritza (surtout ce qu’elle nous montre au sein de Lisbonne Télégramme), elle maîtrise très bien la guitare et les effets pour créer ses atmosphères, et sa présence de scène est bien incarnée. Ses interventions sont naturelles, drôles et parfois bizarres. Par exemple, il paraît que sur les premières tables en premières rangées devant la scène, Laurence-Anne avait déposé des feuilles de Bounce, question d’ajouter un volet olfactif à la prestation. « C’est mon odeur préférée : fluffy soft, fraîcheur de montagne. »  Évidemment, ça n’avait aucun lien avec la chanson interprétée (ou du moins, on ne l’a pas saisi). Encore une fois, pas grave. Mais c’était plutôt surprenant.

Tout ça pour en revenir au sentiment d’avoir affaire à un vrai band, parce que les musiciens de Laurence-Anne prennent leur place, tant sur le plan de l’interprétation que de la créativité.

On vous les identifierait bien, mais la chanteuse a décidé d’y aller pour une présentation de leur sorte de chips préférée. Donc « Miss Vicky’s » désigne la claviériste, qui s’adonne à quelques vocalises un peu space à l’occasion, trafiquées par des pédales à effets. Une touche qui ajoute aux envolées relativement fréquentes dans le répertoire, mais qui mériterait d’être un peu modérée par moments.

Son percussionniste « Frito-Lay’s », lui, brasse les maracas avec vigueur, et joue du triangle avec l’enthousiasme d’un ado sur le mush. C’est surtout bizarre lorsqu’il porte son masque d’Halloween, style Jack de A Nightmare Before Christmas, qui joue du triangle. On fait des cauchemars pour moins. On apprécie tout de même les mélodies de vibraphone, qui ajoutent une saveur très unique aux chansons. Belle intégration de l’instrument.

Bref, Laurence-Anne est l’une des bonnes surprises des Francouvertes. La prestation ne contenait aucun moment faible notable, et les constructions relativement imprévisibles des chansons nous tenaient en haleine. Bien joué.

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Les Louanges

Suivait Vincent Roberge et son projet Les Louanges, qu’il décrit lui-même comme du « rock fleuri ».

Il a un sacré sens de la mélodie, M. Roberge. Encéphaline a d’ailleurs remporté le prix de la chanson primée de la SOCAN, et ce n’est pas pour rien. Écoutez ça :

Ça ne représente pas nécessairement bien le ton de l’artiste, toutefois. D’autres chansons sont beaucoup plus rythmées, notamment la bondissante Bombe Atomichaëlle en toute fin de prestation.

Force est de constater toutefois que la prestation qui fonctionnait à merveille au Lion d’or n’a pas encore le souffle pour convaincre de la même manière dans un Club Soda. C’est tout à fait normal, le projet est encore jeune, et les musiciens n’ont pas encore trouvé la façon d’occuper l’espace, tant sur la scène physiquement que l’espace sonore qui sépare le balcon de la scène dans une salle de plus de 800 places. Dur à dire si la sono est à blâmer, mais toujours est-il que le son de guitare de Vincent Roberge n’explosait pas aux moments où il le devait.

On a d’ailleurs senti le jeune homme plus intimidé en finale que lors des étapes précédentes. Sa joyeuse insouciance et son aise au micro rendaient le personnage très sympathique et naturel, mais devant un gros Club Soda bien rempli, il balbutiait davantage.

Tout cela n’enlève rien au talent indéniable de Les Louanges. Sa prestation fut somme toute sympathique, à défaut d’être renversante comme lors des préliminaires.

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Lydia Képinski

Difficile à cerner, cette Lydia Képinski. Il s’est déjà écrit beaucoup de choses au sujet de sa carrière pourtant encore bien jeune. Peut-être injustement, plusieurs (dont nous) la considéraient « gagnante d’avance » avant même que le premier soir des préliminaires fut débuté.

Puis vient le moment où on la voit à l’oeuvre. Son petit côté ironique est difficile à capter. Elle donne à certains l’impression d’être au-dessus de ses affaires, alors que d’autres y voient une signature unique, captivante. Et comme de fait, il se dégageait, lundi soir, un mélange d’assurance et de froideur de sa prestation. À entendre les gens parler autour de nous, visiblement on aime ou on déteste. Mais ça fait jaser. Parce qu’il se passe quelque chose.

À la base, son écriture est remarquable. On y décèle la griffe d’une vraie artiste. Écoutez Andromaque pour vous en convaincre.

C’est sur scène que ça se complique. Tous les morceaux sont les bons, on dirait juste que l’artiste n’a pas encore trouvé la recette pour les assembler à leur mieux.

En formule trio, l’excellent Blaise Borboën-Léonard ose avec des arrangements de synthés et de violon pour le moins surprenants. Des sons en boucles, des textures étonnantes… Des fois ça fonctionne, d’autres fois un peu moins. Certains titres, comme Apprendre à mentir, perdent de leur attrait immédiat, alors qu’il s’agit d’une chanson accrocheuse à souhait en version enregistrée. Mais en même temps, ça semble volontaire. Comme si l’artiste avait envie de laisser ses compositions vivre, évoluer, croître, quitte à perdre un certain charme pour le remplacer par un autre.

En gros, on sent qu’on a affaire à une artiste au potentiel majeur, qui se transforme. Qu’elle prend forme, en fait. Son jeu de guitare, par exemple, sera assurément resserré au fil du temps, et ça aidera grandement. Sa voix tranche, on est parfois dans le strident, et comme c’est souvent le cas pour ce genre de chanteuse, certains détesteront comme s’ils étaient allergiques. Mais ça demeure une voix singulière qui porte des textes habiles, et très intrigants.

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Verdict

Lydia Képinski remporte donc les grands honneurs, mais personne ne sort bredouille. La panoplie de partenaires des Francouvertes ont gâté généreusement les trois finalistes, qui auront de quoi booker leurs prochains mois.  Et il ne serait pas surprenant qu’au bout du compte, Laurence-Anne, Les Louanges et Lydia Képinski signent toutes sortes de partenariats avec des entités de l’industrie, qui pourront permettre à leur carrière respective de croître. C’est là le grand mérite des Francouvertes : servir de tremplin à des artistes «presque là», dont on entendra parler encore longtemps. Cette année, c’est mission accomplie comme jamais.

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