Five Kings – L’histoire de notre chute à l’Espace GO | Pièce-fleuve qui tient la route

L’Espace Go accueille présentement le très attendu Five Kings – L’histoire de notre chute, où cinq rois se succèdent entre lutte de pouvoir, trahison et drames familiaux. Five Kings c’est aussi le projet colossal dans lequel se sont lancés l’auteur Olivier Kemeid, le concepteur Martin Labrecque, le metteur en scène Frédéric Dubois et le directeur artistique Patrice Dubois. Pendant cinq ans, ils ont travaillé pour assembler les huit pièces du cycle des rois de Shakespeare.


Le récit s’articule avec brio autour l’arbre généalogique des Plantagenêt, dessinant les filiations entre ces rois, nous permettant de voir les liens entre les pièces. Les conséquences des choix et actions posées par les personnages se répercutant d’une partie à l’autre, de décennie en décennie. Le tout porté par la mise en scène méticuleuse et efficace de Frédéric Dubois.

L’histoire s’ouvre dans les années 60 sur un Richard II (plus qu’excellent Étienne Pilon) épuisé à la fin de son règne. Cette première partie est d’une sobriété à la fois belle et surprenante. La scène est nue, les personnages alignés avancent froidement vers la chute du souverain. Toute la place est laissée au texte d’Olivier Kemeid et à la voix des comédiens pour narrer l’histoire de celui qui brisa la tradition familiale en bannissant son cousin Henry.

Puis on enchaine avec les années 70, où l’on s’y vautre dans l’alcool et l’excès, la jeunesse est en révolte contre l’autorité et les traditions. Le Fasltaff de Jean-Marc Dalpé en vieux hippie débonnaire est hilarant. D’un autre côté, l’interprétation d’Olivier Coyette d’un Henry Lancaster malade et vieillissant est moins sentie, moins convaincante. Emmanuel Schwartz vient rattraper le coup en jeune Harry qui confronte son vieux père. Malgré le grand talent du jeune comédien et son interprétation convaincante du roi de fer, la transposition d’Henri V durant la guerre du Golfe avec ses projections d’explosions, détonne du reste de la pièce et est un peu longue.

L’arrivée des York en espèce de mafia américaine redonne souffle à la pièce, au deuxième acte. La chimie entre les acteurs est palpable et c’est dans cette seconde partie que le talent de ces comédiens d’expériences (Hugues Frenette, Jonathan Gagnon…) prend toute sa place. Ce qui nous mène au dernier roi le tyran Richard III (Patrice Dubois) qui devient le réalisateur de sa propre histoire qui a des aires de soap américain, jouant avec les médias et s’adressant au public, manipulant les uns et les autres pour arriver à ses fins. La scène finale vaut le détour, Patrice Dubois y offre une performance remarquable qui nous laisse sur un petit « wow ».

Et au final, malgré quelques longueurs, les cinq heures de Five Kings défilent sans qu’on ne s’en rende compte. Cette pièce-fleuve est portée par le talent de ses créateurs et de ses interprètes. Malheureusement, il manque un petit quelque chose pour la rendre inoubliable qui nous aurait transportés tout au long.


 

* Five Kings – L’histoire de notre chute est présenté à Espace GO jusqu’au 8 novembre 2015, puis du 19 au 22 novembre au CNA d’Ottawa.

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