Dry Cleaning

Le charme décalé de Dry Cleaning au Théâtre Fairmount

C’était un vendredi 13. Caniculaire. De la mi-mai. À quelques heures de la levée du port du masque obligatoire. Tout était un peu bizarre en partant. En se rendant au Théâtre Fairmount, sur l’avenue du Parc, nous passons devant un magasin de tapis qui n’était pas sans rappeler ce fameux vidéoclip qui nous a fait découvrir le groupe que nous allons justement voir en spectacle.

Comme on le mentionnait lors de notre critique du spectacle de Fontaines D.C. plus tôt en mai, la scène post-punk britannique-et-ses-environs est faste ces temps-ci.

Squid, Shame, Wet Leg, IDLES, Black Midi, Viagra Boys et Sleaford Mods ont lancé des albums qui gardent le rock bien en vie ces deux dernières années.

Et il y a Dry Cleaning, groupe composé de la chanteuse-poète Florence Shaw, du guitariste Tom Dowse, du bassiste Lewis Maynard et du batteur Nick Buxton.

Quelle trouvaille !

Leur formule est pour le moins particulière. Florence Shaw récite ses textes, d’un ton littéraire, presque désengagé. On a l’impression d’écouter les réflexions excentriques d’une introvertie au regard singulier sur le monde. Son look est à l’avenant ; grands cheveux longs en rideaux, elle demeure relativement immobile devant son pied de micro.  Ce flegme, si anglais, fait tout son charme. Le public comprend et apprécie le petit jeu, si bien qu’elle aura droit à des applaudissements nourris simplement en secouant la tambourine délicatement.

Les musiciens, eux, sont charismatiques et investis dans leur rock un peu noise, infusé de Sonic Youth et Magazine, ponctué de notes obliques et soutenu par une section rythmique franchement convaincante. Mais comme le soulignait une amie présente au spectacle : ils doivent ralentir leurs ardeurs, adapter leur rythme à l’étrange contraste entre le spoken word de Shaw et leurs guitares abrasives. Ça donne quelque chose comme du « slow punk », si on veut.

Le Théâtre Fairmount est le parfait contexte pour les voir de près, tout en jouissant d’une ambiance survoltée avec une foule d’environ 400 personnes. La sono est bonne, la proximité avec les artistes idéale, et le groupe est là pour faire ce qu’il fait de mieux, à commencer par des performances sympathiques de Leafy et Unsmart Lady, justement.

Les nouveaux fans — nous le sommes un peu tous, étant donné que le groupe s’est formé en 2018, et a dû composer comme tout le monde avec deux années de pandémie — pourraient s’attendre à un spectacle assez court, puisque Dry Cleaning n’a qu’un seul album de dix chansons. La grosse majorité d’elles seront jouées, mais Dry Cleaning a aussi proposé son premier single, Magic of Meghan, lancé en 2019 (et qui ne figure pas à l’album New Long Leg). Shaw aurait apparemment écrit cette chanson après avoir traversé une rupture et quitté l’appartement de son ancien partenaire le jour même où Meghan Markle et le prince Harry ont annoncé qu’ils étaient fiancés.

Au rappel, le groupe propose aussi Conversation, autre formidable chanson omise de l’album, qui figurait plutôt au EP Boundary Road Snacks and Drinks. 

Bref, c’est un peu plus d’une heure de musique qui nous a été offerte vendredi soir, ce qui est parfait pour ce genre de performance. Dry Cleaning est fidèle à son charmant album sur scène, avec des titres comme Scratchcard Lanyard et la menaçante Tom Speaks (une autre chanson qui n’a étrangement pas fait l’album…) qui se démarquent, tout comme le guitariste Tom Dowse qui se permet un peu plus de jams tonitruants et de Larsen en live que sur disque.

On a tout aimé de tout ça.

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