Metric

FrancoFolies 2015 – Jour 4 | Parcours de Francos avec Aut’chose, Bigflo & Oli, L-P Gingras et plus

Soirée des plus agréables, dimanche, alors que Lucien Francoeur ramenait son projet Aut’chose à l’avant-plan avec une inénarrable prestation sur la scène au pied de la Place des Arts. Retour sur un parcours de spectacles extérieurs qui comprenait aussi Bigflo & Oli, Louis-Philippe Gingras, Safia Nolin, Julie Blanche, Guillaume Beauregard et Michel Robichaud.

 


Ah Lulu !  L’indécrottable rockeur aux allures de gérant de pawn shop était de retour avec les chansons mémorables de son projet « pischédélik » Aut’Chose, qui a donné au monde entier quelques-uns des albums rock québécois les plus éclatés des années 1970.

La foule était étrangement assez bigarrée : des vieux rockeurs nostalgiques, mais beaucoup de jeunes adultes aussi. « Y’en a qu’y’étaient même pas nés quand on a sorti ces disques-là !  Ce qui prouve que vos parents sont probablement intelligents », lance-t-il avec sa dégaine habituelle, sans filtre.

Bon vivant s’il en est un, Francoeur est fascinant à voir aller, mais n’a pas vraiment une grande voix. Avouons qu’on s’en fiche : les chansons d’Aut’Chose reposent principalement sur une formule simple, basée sur des riffs empruntés du psych-rock 70’s à l’Américaine, avec des petites pointes progressives, et des textes abracadabrants récités à la manière d’un monologue teinté de haschich.

Parlant d’abracadabrant, Lulu ne lésinait pas sur les interventions biscornues, scandant des slogans à la « écoutez vos rêves! », et proclamant que l’Internet avait fait éclater le règne de l’intelligentsia, permettant ainsi aux gens de faire ce qu’ils veulent comme « faire arrêter la NASA ».

L’incompréhension ne provenait pas juste de la sympathique confusion du bonhomme, mais aussi d’une sono inadéquate qui ne permettait à personne de bien entendre la voix de Lucien. Les fans répondaient en hurlant des « Plus foooort! » et autres « On t’entend pas Lulu ». Mais lui non plus, sur scène, n’entendait pas les fans. Un vrai dialogue de sourds, sur fond prog-rock. On comprenait à tout le moins le principal : he’s back, il ne compte pas changer, et il aime ses fans qui le lui rendent bien.

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On ne pourrait passer sous silence le band de feu qui accompagnait Lucien dans son trip. Il y avait bien sur son inséparable collègue Jacques Racine, portant fièrement le gaminet Aut’chose et un bandana au coco, mais aussi Michel Langevin (de Voivod) à la batterie, Joe Evil (de Grimskunk) au clavier, Vincent Peake (Groovy Aardvark) à la basse et Alex Crow à la guitare, qui, à 22h59, s’est sauvé à la course, guitare électrique à la main, de son concert avec Guillaume Beauregard au Parterre du Quartier, pour se rendre à la Scène Ford à 23h pile et se joindre au band. Grosse soirée, Monsieur Crow.

Les invités n’étaient pas piqués des vers non plus : Snake de Voivod, Xavier Caféine, Papillon et les Muscadettes à titre de choristes pour une chanson. Tout ce beau monde rendait honneur aux classiques Nancy BeaudoinCh’t’aime Pis Ch’t’en veux et bien entendu, Le Freak de Montréal.  Et ce qu’on souhaitait tous secrètement est survenu : Lulu a terminé ça avec un bon gros Rap à Billy, en nous annonçant qu’Aut’Chose préparerait un nouvel album pour 2015 avec cette formation. Ce sera à surveiller.

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Du rap français et de la chanson québécoise

Sur l’autre scène, près de Clark, le duo Bigflo & Oli en ont mis plein la vue à 21h, avec une prestation fort convaincante, pleine de camaraderie.

Très bon petit duo de jeunes blanc-becs français, Bigflo & Oli donnent dans un rap qui n’a que faire des clichés. Ils n’ont pas l’intention de jouer les durs, sauf à la blague tel qu’en témoignent leur petit rap battle en milieu de prestation et leurs hits Gangsta (« J’suis pas un gangsta / J’viens pas du ghetto, freestyle sous l’préau ») et C’est pas du rap (« C’est pas du rap, c’est d’la musique »).

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Ils sont d’ailleurs très doués avec les mots, mais également de forts bons musiciens : violoncelle, guitare, clavier et trompette font leur apparition à un moment ou un autre dans le spectacle.

Très impressionnant et divertissant. Le vétéran Youssoupha est venu faire son tour le temps d’une demie chanson, comme pour ajouter un seau d’approbation au duo, qui bien franchement, avait convaincu tout le monde sans ça. Tout de même un beau moment.

Plus tôt en soirée, on avait débuté avec la prestation de Safia Nolin, dont on entend beaucoup parler depuis un petit bout de temps. Son premier album arrivera enfin dans les bacs à l’automne, et bien que son chant et ses chansons semblent prêts, il faudra resserrer sa présence sur scène. C’est toujours agréable, aux Francofolies, d’avoir accès à des prestations brutes d’artistes en cours de route, encore indomptés, insoumis à la bienséance scénique. Mais de là à arrêter une chanson en plein milieu parce que « Ah non, ma strap a lâché », de déblatérer sur la position du capo sur le manche de guitare ou de demander à son guitariste Joseph Marchand de raconter une blague le temps qu’elle accorde sa guitare, il y a un minimum de décorum à respecter pour convaincre la foule qu’on a affaire à un spectacle professionnel.

On a tout de même retrouvé quelques beaux flashs, des textes généralement touchants et habiles, et une très belle reprise de Demon Host de Timber Timbre… C’était justement la chanson interrompue par l’accident de sangle de guitare, qui n’a finalement jamais été terminée.

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Peu après, Louis-Philippe Gingras démontrait au contraire qu’il sait comment capter l’attention sur une scène avec 55 minutes bien cordées, convaincantes. Ses chansons drôles et punchées sont bien soutenues par une formule trio très solide, complétée par Justin Allard à la batterie et Marie-Anne Arsenault à la basse.  Joseph Edgar est venu rejoindre le trio pour la chanson La branche à saucisses, et multiplier les « jokes de nains », comme le veut la coutume avec cette pièce drolatique.

Des nouvelles chansons nous ont aussi été présentées, et ça augure bien en vue du prochain album, attendu pour 2016. Il a de la gueule, le Monsieur Gingras, et ça commence à prendre forme de façon très encourageante.

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Également au menu, il y avait l’ex-Vulgaires Machins, Guillaume Beauregard, qui présentait ses chansons solo, en même temps que Julie Blanche, qui donnait une très belle prestation sur la scène Sirius XM. Des choix déchirants qui nous empêchent de profiter pleinement de chaque artiste. On voudrait être partout à la fois.

C’est là l’heureux problème d’un festival comme les Francofolies, et ça démontre à quel point le paysage musical francophone pullule encore au Québec.

 

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