Critique théâtre | Éveils romanesques au Théâtre de Quat’sous

Éveils romanesques est le thème de la deuxième saison des rendez-vous littéraires, nouvelle tradition annuelle créée par Stéphane Lépine et James Hyndman. C’est le touchant Le liseur, de Bernhard Schlink, qui ouvre le bal cette année.

Le spectacle d’une heure trente sans entracte s’ouvre sur un commentaire de Lépine, qui nous met l’œuvre et son auteur en contexte. Il nous rappelle brièvement la situation sociologique de l’Allemagne post-nazie ; les questionnements philosophiques du peuple allemand, ainsi que sa grande honte.  Schlink a fait partie des jeunes des années 1960, issus du baby boom, qui ont demandé justification à leurs parents pour les actes commis ou acceptés aux temps de l’Allemagne nazie. Le liseur est par conséquent « un éveil de sens et de la conscience », qui soulève la question de la responsabilité que chacun a de ses actes, à travers une histoire amoureuse.

Le texte est livré élégamment par Hyndman depuis une table de lecture décorée d’une seule lampe. Dans la plus grande simplicité, l’acteur nous lit des passages de cette œuvre internationalement acclamée, qui a d’ailleurs été brillamment adaptée au cinéma en 2008.

La voix chaleureuse et le charisme d’Hyndman sont captivants, et le style direct et attentif de Schlink évoque facilement les décors et les personnages décrits.

Cette lecture installe rapidement un sentiment intimiste, amenant au passage une certaine nostalgie de l’enfance, alors qu’on nous lisait des histoires pour nous endormir. Éveils romanesques est l’expérience concluante qu’une activité telle que faire la lecture n’est pas désuète, car elle sait encore susciter le rire et envoûter. C’est avec regret qu’on voit la représentation se terminer.

Le seul bémol du spectacle était d’ailleurs cette fin trop abrupte. Non seulement on en veut plus, mais il n’y a pas de transition directe établie entre le récit du garçon de 15 ans et l’unique phrase indiquant la deuxième partie du récit, tenant place des années plus tard, alors que les personnages principaux Michael et Hannah se revoient lors d’un procès où elle est jugée.

Certainement, Lépine souhaite qu’on lise l’œuvre entière, et ç’aura été pour cette raison qu’il nous laisse sur notre faim, mais quelques lignes additionnelles auraient mieux su attiser notre intérêt en nous donnant un meilleur aperçu du dénouement.

Pour ceux qui n’ont pas pu assister à cette lecture le 3 novembre dernier, la série Éveils romanesques se poursuivra au Quat’sous à l’occasion du 8 décembre avec Le Blé en herbe de Colette, du 30 mars avec L’Année de l’éveil de Charles Juliet et du 4 mai avec Aurélien, Clara, Mademoiselle et le Lieutenant anglais d’Anne Hébert, lus toujours par l’excellent Hyndman.

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