crédit photo: Marc-André Mongrain
The National

Bluesfest d’Ottawa 2022 | Dernier week-end : The National, Ja Rule, TLC et plus !

Le Bluesfest d’Ottawa se concluait ce week-end avec une magnifique soirée de mélancolie rock avec The National et Andy Shauf, juste après un samedi soir de nostalgie R&B/rap avec Ja Rule et TLC. Retour sur une douce fin de semaine d’été festivalière comme on les aime !

La poussière retombait à peine sur les Plaines Lebreton au lendemain du passage explosif de Rage Against the Machine.

Avec la cuisante chaleur mélangée au lendemain de veille, le site du Bluesfest était vraiment vide jusqu’en milieu de soirée samedi, comme en témoigne cette tente de bière où il fallait attendre plus d’une demi-heure pour obtenir un breuvage vingt-quatre heures plus tôt.

 

La programmation était moins attrayante aussi, il faut le dire : Ja Rule, TLC et Bone Thugs ‘N Harmony étaient au programme. Mais ces derniers ont annulé leur présence.  Ne restait plus qu’un trio devenu duo depuis vingt ans, et un rappeur qui a davantage fait parler de lui pour son implication dans le Fyre Festival qu’autre chose, ces dernières années…

Les nostalgiques de la R&B et du rap des années 1990/début-2000 ont tout de même foulé le site en nombre presque respectable vers les 20h pour le retour de la T et de la C de TLC, soit Tionne « T-Boz » Watkins et Rozonda « Chilli » Thomas, seules survivantes du trio depuis la mort de Lisa « Left Eye » Lopes il y a 20 ans.

Souriantes, en voix et entraînantes dans leurs danses malgré leur cinquantaine respective, les deux complices ont donné un spectacle sympathique et trempé de nostalgie, avec Unpretty, No Scrubs, même l’amusante Silly Ho, et bien entendu, Waterfalls à la toute fin.

On sent que leur mission est de préserver l’héritage du trio qui a connu tant de succès durant la dernière décennie du 20e siècle, et à ce titre, sans prétention, c’est plutôt réussi.

 

Ja Rule, lui, est arrivé comme une vedette actuelle sur la scène principale pour donner une toute petite heure de spectacle.

Force est d’admettre qu’il avait de l’énergie en masse, et le sourire généreux.  C’est déjà ça.

Et la forme physique aussi. À l’instar de Rozonda de TLC, Jeffrey Bruce Atkins (de son vrai nom) a visiblement renouvelé son abonnement au gym, et ça lui donne les munitions pour non seulement faire crier la gente féminine lorsqu’il retire son chandail, mais aussi sauter, bondir, courir d’un bord à l’autre de la scène pour animer la foule, sans se fatiguer, et sans besoin d’un hypeman à ses côtés.

On a reconnu toutes sortes de succès au passage, dont Always on Time, Mesmerize et Holla Holla.

On a beaucoup ri lorsqu’il a surnommé Ottawa « sexy city » le plus sérieusement du monde. Ouaiiiiiis, c’est ça, ouais.

En toute franchise, on n’est pas resté toute l’heure. Le Canadien grandson jouait sur l’autre scène, et ça nous semblait être un peu plus notre vibe… ce qui a pris un certain temps à se confirmer.

La direction artistique de grandson est un peu confuse… Est-ce du rock percutant à tendance électro/industriel, de la chanson emo (sa reprise raccoleuse de Baby One More Time nous a fait froncer les sourcils), ou du folk-rock avec couplets rappés ? Dur à dire…  Surtout vêtu d’un jersey canadien, il avait l’air d’un joueur d’impro qui cherche son identité musicale pendant plusieurs minutes…

Sa chanson Identity est peut-être la plus à propos : « I’m so sick, but I can’t find a remedy / I’m still tryna find my identity ». On dirait bien, en effet. D’ailleurs, il a dédié cette chanson aux « héros » du mouvement des camionneurs qui ont paralysé Ottawa au printemps dernier. Ok.

Quand l’artiste s’est branché et a décidé d’y aller avec le rock percussif, bien appuyé par son excellent batteur, ça semblait plus clair. Et ça fonctionnait.

Surtout avec Blood // Water  à la toute fin, et son impressionnant stunt d’aller chanter sa dernière chanson à 25 pieds dans les airs en grimpant dans la tour sur le bord de la scène.

 

Dimanche : The National, Andy Shauf et un horaire mal foutu

La soirée du dimanche était mal programmée.

On aurait adoré voir The Beaches, mais les filles ontariennes jouaient en même que The National, sur la scène River. Drôle de contre-programmation. Surtout que The Beaches étaient précédées du très très populaire mais très très pop Elijah Woods, et avant ça, de l’étonnant quintette surf-punk psyché WTF local, Bonnie Doon. Qui auraient bien mis la table pour The Beaches, mais il y avait Elijah Woods entre les deux.

Et du côté de la scène principale, le majestueux (mais très posé et paisible) chanteur Oji-Cri ontarien Aysanabee et le maître de la chanson indie-folk Andy Shauf se succédaient juste avant The National.

Ok. Mettre Andy Shauf sur la scène principale, ce n’est pas lui rendre service. Sans doute l’un des meilleurs auteurs-compositeurs au pays, Shauf est le superhéro des introvertis, un bijou de chansonnier introspectif, mais qui a le charisme sur scène d’un comptable manitobain.

De grâce, mettez-le plutôt sur une scène plus intime, comme la scène Sirius, juste à côté. Celle avec un toit, et des estrades pour s’asseoir. À l’ombre, et au calme. Avec Aysanabee juste avant. Les adeptes de chansons tranquilles mais bien écrites et interprétées avec tact et doigté vont pouvoir apprécier, beaucoup mieux qu’au gros soleil avec une foule éparse.

The Beaches auraient été parfaites dans ce cadre-là, en première partie de The National sur la grosse scène, avec les bébittes étranges que sont Boonie Doon en début de soirée, avec leur surf-punk à la B-52s-rencontre-The-Beaches-rencontre-The-Shaggs.

Après, exigez que les musiciennes de Boonie Doon accordent leurs instruments, et s’écoutent juste un petit peu plus sur scène, et on aurait un bon petit freak show de musique audacieuse, à une guitare et deux basses (!), savoureusement échevelée. Parfaite mise en bouche avant The Beaches.

Ça laisserait la scène River à Elijah Woods, en contre-programmation de The National.

Tout le monde y gagnerait…

Cela dit, The National a donné tout un show, devant une foule certes peut-être un peu dégarnie selon les standards du festival cette année, mais assez nombreuse pour permettre une certaine ambiance, surtout près de la scène.

Le groupe a pigé allègrement dans son répertoire, avec une belle sélection variée de chansons tirées de ses albums Trouble Will Find Me, Boxer (4 titres!), High Violet et Sleep Well Beast. 

Ils ont aussi offert deux nouvelles chansons toutes neuves : Tropic Morning News (Haversham) et la très bonne Ice Machines. Bonne idée, d’ailleurs : les paroles de ces deux nouvelles chansons défilaient sur l’écran derrière eux, question qu’on puisse en savourer le contenu durant cette première écoute.

On sent l’influence des deux années pandémiques sur Ice Machines, qui traite de la difficulté à entrer en contact avec les gens, notamment avec des paroles comme : « Finally stop and make connections / When everything goes dark ». Très belle chanson.

Parlant de très beau, The National a une fois de plus excellé dans l’art des dynamiques, passant de moments très posés où l’on pouvait super bien entendre le magnifique grain de voix de Matt Berninger (Light Years et Pink Rabbits, notamment, ainsi que la splendide et crève-coeur About Today à la toute fin) à des instants carrément explosifs comme Graceless, Mr. November et England.

Le joueur étoile de l’ombre, c’est sans aucun doute le technicien qui gère le fil de micro de Berninger. Appelons-le Dan, tiens.

On imagine la scène, en coulisse :

Bryce Dessner : « Hey Matt, on a vu ça sur Internet, ça pourrait t’intéresser : il paraît qu’ils font des très bons micros sans fil maintenant… Ça te dirait de l’essayer ? »

Matt : « Pourquoi ? Dan gère très bien mon fil de 500 pieds, c’est amusant. »

Bryce : « Ouais bien justement, on pourrait couper un salaire en tournée et charger moins cher aux festivals. »

Matt : « Oui, mais Dan fait un très bon travail, et il a deux enfants à envoyer au collège. On peut pas lui faire ça. Je garde mon fil de 500 pieds. »

Bryce : « Pourrais-tu aller moins souvent dans la foule, dans ce cas-là? »

Matt : « C’est hors de question. »

Trois fois. Matt Berninger s’est aventuré dans la foule à trois reprises durant le show.

Lâche pas mon Dan. Tu fais un excellent travail.

Et disons-le : on apprécie grandement quand Matt vient nous voir dans la foule.

N’achetez surtout pas un micro sans fil.

Ceci concluait donc un Bluesfest à saveur très nostalgique, mais qui nous a permis de faire la découverte de plusieurs artistes aussi.

Belle variété, en somme. On se reprend l’an prochain !

 

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