Starfucker (STRFKR)

Entrevue | Joel Plaskett: Réflexions sur le passé, le présent et le bonheur

Communément décrit comme un “trésor national” ou encore un “héros du folk” Joel Plaskett revient en ce début d’année avec un nouvel album intitulé Joel Plaskett and The Park Avenue Sobriety Test (qui donne Joel Plaskett and the P.A.S.T. en anagramme). Retour sur un opus mêlant le passé et le présent de l’artiste, et qui pose de nombreuses réflexions.

Photo courtoisie d'Ingram Bass

Photo courtoisie d’Ingram Bass

Le passé et le présent

Joel Plaskett n’a aujourd’hui plus grand-chose à prouver sur la scène musicale canadienne tant il a marqué son genre depuis le début de sa carrière. Pourtant tout n’est pas si simple qu’il y paraît, même pour le musicien, qui a décidé de baser son album sur son constat du présent face à un passé parfois regretté, souvent embelli.

joelplaskett-Fred Lum

Courtoisie de Fred Lum

Mais avant cela, il y a toute une histoire, celle du titre de l’album. « Je me promenais avec mon fils dans la rue, c’était l’hiver, et quelqu’un descendait en voiture la colline de notre quartier. Il a eu un accident, il a atterri dans l’herbe, en détruisant la rambarde de sécurité. C’était dans l’Avenue du Parc, juste à côté de chez moi. Je suis allé voir mon voisin Roy, et je lui ai dit “Hey Roy, tu as vu l’accident sur la rambarde de sécurité ?” et il m’a répondu « Oui, c’est le test de sobriété de l’Avenue du Parc !».

À partir de cette belle réplique de son voisin, Joel Plaskett eut l’inspiration d’une chanson.  « Ça m’a rappelé un album des Kinks, The Kinks Are The Village Green Preservation Society, qui a aussi un titre verbeux. Et je me suis dit « C’est un très bon nom » et j’ai commencé à le penser comme une chanson. »

Toute une réflexion est alors venue à l’artiste, sur son présent, son rapport au bonheur et son passé, mais qui ne s’avère pas être totalement introspective. Et cette réflexion teinte l’album sur toute sa longueur. « Parfois tu peux t’attarder sur ton passé, tu essayes de trouver du bonheur dans celui-ci, tu penses au bon vieux temps, car tu essayes de te souvenir seulement des bonnes choses, et d’oublier les mauvaises. Et dans le même temps, tu tentes de gérer le présent, tu dois te gérer et trouver ton propre bonheur. Et l’album est comme une quête pour essayer de trouver le bonheur dans un monde qui est souvent très difficile et injuste. C’est à la fois un disque drôle et il y a aussi de la mélancolie sur celui-ci. »

 

Contradictions

Comme le dit justement Joel Plaskett, ce dernier album contient de nombreuses chansons mélancoliques, qui sont toutefois rattrapées par les arrangements et l’ambiance qui se dégage de l’album, souvent joyeuse et pleine de vie. Ce qui peut aussi se révéler contradictoire. « C’est vrai, mais en même temps c’est un peu comme ça qu’est la vie. Je pense qu’à certains points, j’ai vécu jusqu’ici une vie très chanceuse, je possède mes propres biens et j’ai pu jouer de la musique et en vivre. Comment cela pourrait-il être difficile ? Mais c’est encore dur, parce que je dois régler d’autres problèmes. Puis, je vois les difficultés que les autres personnes doivent surmonter, et je ressens de l’empathie pour elles car je pense au fait que je suis incapable d’améliorer leurs situations. C’est ça la contradiction. Comment je pourrais me sentir totalement heureux ? »

Une certaine joie se dégage néanmoins lors de l’écoute de l’album du fait que Joel Plaskett a invité une vingtaine de personnes, dont son groupe The Emergency, à enregistrer l’album avec lui. Des amis de longue date, ainsi que des plus récents, de quoi lui rappeler son passé et son présent. On entend ainsi des voix et des rires sur certaines chansons. « C’est l’album que j’ai eu le plus de plaisir à faire depuis le début. » dira d’ailleurs l’artiste.

 

Une étape ? 

joelplaskett-Matt Williams

Courtoisie de Matt Williams

Le musicien de Nova Scotia va fêter son 40e anniversaire cette année, et la question de savoir si cet album représente une étape dans sa carrière titille toutes les langues. La réponse est toutefois claire. « Tout le monde me demande ce que je ressens par rapport au fait que j’aurai 40 ans cette année, alors que je n’y pense même pas. […] Je n’ai aucun problème avec ça. Mais c’est sûr qu’il y a une vision plus adulte sur cet album, et je suis père maintenant en plus. Ca a changé un peu mes perspectives, ça m’a rendu un peu plus soucieux. » Des préoccupations se retrouvent sur plusieurs chansons comme des questionnements sur la vie et la mort par exemple.

Des interrogations qui sont aussi plus universelles, comme sur la chanson Captains of Industry, qui pose un regard politique critique sur la société actuelle, chose que l’on n’entendait pas trop dans le répertoire de l’artiste auparavant.  Joel Plaskett a même repris Hard Times de Stephan Foster, chanson datant de 1854, que son père chantait avec lui parfois, et dans laquelle il a retrouvé des thèmes d’actualités. « J’avais envie de la chanter parce que je sentais une connexion avec elle grâce à mon père et aussi une connexion aux paroles très puissantes, remplies de commentaires sociaux, et qui montrent une compassion pour les plus démunis. Je trouve que c’est toujours d’actualité aujourd’hui. »

Joel Plaskett sera au Théâtre Corona le 28 mai prochain.

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