Critique théâtre | City au Théâtre Prospero

Le Théâtre des obnubilés de Nicole présente City, adaptation par Magalie Morin et Christel Marchand du roman d’Alessandro Baricco. Alors que l’auteur original est musicologue et que ses œuvres, aussi absurdes soient-elles, sont fluides et imagées, la pièce présentée au Théâtre Prospero jusqu’au 27 septembre comprend trop de coupures et une narration lourde qui fait perdre le rythme de ce drôle de récit.

City raconte l’histoire de Gould (Paul Ahmarani) un génie, qui à treize ans, passe ses journées à l’Université et fait rêver ses collègues d’un prix Nobel. Gould a pour seuls amis Diesel (Gabriel Doré) le géant, et Poomerang (Paul-Patrick Hébert), un petit homme chauve et muet. Le garçon rencontre Shatzy (Geneviève Beaudet), une jeune femme qui deviendra sa gouvernante, mais qui passe beaucoup de temps dans sa tête, où elle s’invente un western. Alors que la jeune femme imagine l’histoire d’un horloger au Far West, Gould s’enferme dans la salle de bain pour inventer des matchs de boxe.

Les personnages très colorés du roman perdent leur lustre sur les planches alors que les dialogues sont réduits au minimum, délaissant la répétition, qui rend fluides les aventures étranges imaginées par Baricco. De nombreux passages narratifs ont été conservés, récités par Shatzy qui s’adresse directement au public. Ceux-ci servent principalement à présenter les personnages qui, habitués à la solitude, se sont tous deux créé des univers de remplacement afin d’échapper à l’isolement constant.

 

Adaptation laborieuse

En transformant un roman de près de 500 pages en 1 h 40 de spectacle, c’est bien évident que tout est raccourci. Malheureusement l’impression que laisse City, c’est qu’il manque quelque chose.

Le problème de City ne provient pas de sa distribution. Les comédiens font leur possible pour nous faire croire à cette histoire où rien ne se produit. On prend tellement de temps pour présenter les personnages, qu’au final on ne laisse pas au spectateur l’occasion de s’attacher à eux. Les ressources humaines sont exploitées au maximum, alors que Diesel, Poomerang et Gould deviennent les personnages du Western de Shatzy en mettant des accessoires ou en changeant leurs voix. Tous les autres personnages sont joués par Jean Belzil-Gascon, qui, à l’aide de quelques accessoires, se transforme splendidement d’un personnage à l’autre.

Photo de courtoisie par Lynn Poulin.

Photo de courtoisie par Lynn Poulin.

La mise en scène de Christel Marchand est épurée. L’espace scénique se compose de deux étages reliés par un escalier. On crée ainsi deux lieux distincts, mais visibles simultanément. Shatzy semble ainsi surplomber les personnages de Closingtown comme un marionnettiste lorsqu’elle raconte son western. Image très intéressante accompagnée d’une projection d’un soleil du Far West en arrière-plan. Les images projetées sont dans l’ensemble très exactes, représentant simplement les quelques changements de lieux.

Les changements de scènes sont accompagnés d’intermèdes musicaux, qui semblent trop courts. Coupés rapidement, sans fondu, on perd de la fluidité alors que les spectateurs attendent le retour des comédiens sur scène.

City vise à montrer la distinction entre la ville et les histoires inventées par Shatzy et Gould, et invite le spectateur à se questionner sur qui a raison, celui qui semble fou, qui s’invente des histoires en cherchant le bonheur ou celui qui ne fait que vivre sa vie sans s’interroger. En sortant du théâtre, la question semble sans réponse. On a découvert une anecdote de Gould et Shatzy, mais pas leur entière histoire.

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