La Verità

Critique | La Verità au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts de Montréal

Le spectacle La Verità était finalement dévoilé jeudi soir, dans un Théâtre Maisonneuve débordant de beau monde chic et d’attentes gonflées. C’est normal : la promesse d’un croisement artistique entre l’imaginaire de la Compagnie Finzi Pasca et l’univers de Dali (appuyé par la présence sur scène d’un tulle gigantesque de l’artiste) avait de quoi mettre la barre haute. Plutôt réussie, cette rencontre du cirque moderne et du surréalisme donne lieu à de nombreux grands moments inspirés, avec quelques bémols bénins de mise en scène qui n’en pertubent pas l’appréciation outre mesure. 

Photo par Viviana Cangialosi.

Photo par Viviana Cangialosi.

Pas évident comme défi que de créer un spectacle de cirque ayant comme « partie intégrante » un tableau.  Et pas n’importe lequel: une oeuvre de 9 x 15 mètres, unique et exclusive, créée par le grand Salvador Dali pour le ballet Mad Tristan, présenté au Metropolitan Opera de New York en 1944.

Dépoussiérer un tulle presque inédit d’un des plus grands peintres du siècle pour la création d’un spectacle de cirque est sans contredit un grand honneur pour Finzi Pasca. C’est aussi lourd de conséquences.

Une oeuvre pareille ne peut être qu’un banal rideau de scène. Mais sa présence ne doit pas devenir encombrante non plus. C’est là la plus grande acrobatie de La Verità. Et c’est forcément à ce niveau que la pièce souffre à l’occasion.

La présence un peu trop soutenue de numéros de clowns un peu confus freine à quelques reprises le flot de la soirée. On dirait, par moments, qu’ils ont été parachutés là, aux devants de la scène, pour nous rappeler qu’on se retrouve en présence d’une oeuvre importante. Il y aurait sans doute moyen d’intégrer l’immense rideau aux thématiques des numéros de façon plus subtile et efficace, mais comment?

 

Du rêve à la vérité

Si l’on assiste à La Verità avec de grandes attentes envers l’intégration de l’oeuvre picturale de Dali, il est possible d’être un brin déçu. Mais sur le plan des numéros de cirque, La Verità en met plein la vue, tant d’un point de vue technique que créatif. Daniele Finzi Pasca et sa comparse Julie Hamelin nage dans le surréalisme avec une aisance déconcertante.

L'Oeil. Photo par Viviana Cangialosi.

L’Oeil. Photo par Viviana Cangialosi.

On dit cirque, mais le spectacle La Verità s’inscrit véritablement dans une démarche pluridisciplinaire époustouflante. Aux numéros de cerceaux, de contorsion, de jonglerie et d’acrobaties s’ajoutent un ballet-cirque étrange, de la musique live, d’insolites rhinocéros, l’interprétation d’un air de Casse-Noisette aux verres d’eau, du théâtre, de la danse, des clins d’oeil à la corrida, au french-cancan, à la séduction et quoi encore.

Les tableaux sont marqués par une scénographie appliquée, des éclairages (Alexis Bowles) qui créent des décors fabuleux, une trame musicale parfaitement adaptée et des chorégraphies loufoques, qui ajoutent une touche d’humour absurde à l’ensemble.

Sur le plan narratif, Pasca et Dali ont en commun d’aborder le rêve dans leur démarche. Ce n’est donc pas très surprenant de constater une approche très onirique, à des lunes d’une narration linéaire facile à suivre ou à expliquer. Ce sont plutôt des tableaux hallucinés qui nous sont présentés, plus lumineux et enfantins chez Pasca que dans l’esprit tordu et angoissant de Dali.

Les clins d’oeil à l’univers du peintre et plus précisément aux éléments graphiques du rideau-vedette sont bien intégrés, des champs de pissenlits à l’Oeil, cette structure métallique qui roule et glisse en diverses directions.

Ambitieuse création s’il en est une, La Verità vaut le détour, même si on décèle certaines longueurs. Les éléments réunis ont tout le potentiel pour en faire un spectacle grandiose, remarquable.

La Verità débute son aventure à Montréal jusqu’au 3 février 2013, avant de parcourir le monde (Amérique du Sud, France, Suisse, Italie et Espagne).

 

Photos en vrac

Vos commentaires