crédit photo: Thomas Delplanque
Kendrick Lamar

Osheaga 2023 – Jour 3 | Kendrick Lamar : Une ode au hip-hop

Osheaga se concluait dimanche et qui de mieux que le roi de Compton en personne, au nom de Kendrick Lamar, pour se charger de remplir la tête de futurs souvenirs à ces dizaines de milliers de festivaliers présents. Retour sur le dernier jour de cette 16e édition en quelques moments notables.

Le très talentueux et attendu Kendrick Lamar débute son segment sur la Scène de la Rivière peu après 21h avec N95, deuxième morceau de son plus récent album, Mr. Morale & the Big Steppers.

L’amorce du titre est d’abord chantée, rappée, puis la scénographie en met plein les yeux aux festivaliers : dès la fin de l’introduction, des feux d’artifice sont projetés et une gigantesque murale déployée, signant bel et bien le début du concert en grande pompe.

Durant l’heure et demie de son passage, Kendrick Lamar pioche dans sa large discographie comme un enfant pourrait piocher dans un magasin de bonbons, c’est-à-dire, avec un sacré embarras du choix.

Car depuis Section.80, en 2011, Lamar enchaîne les classiques à ne plus savoir compter, beaucoup le qualifiant comme l’un des artistes hip-hop le plus doués de l’histoire de la musique, et le plus influent de sa génération.

* Photo par Thomas Delplanque.

La scénographie s’avère impeccable, intrigante : des danseurs habillés de la même manière bougent machinalement durant la performance. Ils sont comme des émules de Kendrick. Il y en a d’abord un, puis plus tard, ils seront deux, identiques, puis trois et ainsi de suite jusqu’à sept.

Les murales se succèdent alors que les éclairages et leur gestion ajoutent encore ce plus.

Pleinement en lien avec l’univers artistique du rappeur, hautement créatif.

* Photo par Thomas Delplanque.

Niveau ambiance, on semble bien loin d’un Travis Scott ou du regretté XXXTentacion, la foule se révélant plutôt calme, l’excellence de la musique compensant sur le propos.

Une dure critique ne peut pourtant pas échapper : les transitions s’avèrent bizarres, souvent même inexistantes.

Plusieurs fois durant la performance, une dizaine de secondes sans aucun contenu visuel ou auditif fait guise d’interlude, au point où une partie de la foule quitte le site entre l’avant-dernière et la dernière chanson, Alright et Savior, ne comprenant pas que le concert n’est pas encore terminé tant les démarcations des morceaux apparaissent floues.

Probablement que ces interludes portaient un sens plus profond, le rappeur laissant la possibilité de remplacer le silence par ces bruits du public, à la manière d’un 4’33 de John Cage, où la musique n’est plus, pour laisser place à une autre musique, mais sur le moment, et d’un point de vue personnel, ce choix artistique eut davantage la conséquence de briser le rythme de la performance qu’un autre effet voulu.

Malgré toute chose, Kendrick Lamar montre le visage d’un artiste profondément talentueux tout au long de sa performance, sachant intégrer les codes d’autres styles dans son univers hip-hop et se démarquer par la même occasion d’absolument tous les autres rappeurs de sa génération.

Et puis, qui d’autre pourrait se targuer d’avoir sorti un album au niveau de To Pimp A Butterfly dans la décennie?

* Photo par Thomas Delplanque.

De l’autre côté de l’océan

Trois heures plus tôt, et toujours en rap, le MC de Londres, Central Cee, foule les planches de la Scène de la Montagne, quinze minutes après l’heure annoncée par Osheaga (un DJ a tout de même pris le plaisir d’occuper le public durant une dizaine).

Une courte vidéo en noir et blanc annonce le ton, sombre et intimidant, alors que le rappeur fait comprendre de nombreuses fois après être entré sur scène à travers sa performance qu’il tient Londres, et la Grande-Bretagne, dans son cœur, multipliant les références et les mots provenant du « slang » anglais.

Habillé d’une tenue à couleur unie, classique à la culture de la rue anglaise, Cee rappe avec un débit rapide, sur des instrumentales de drill lui ayant procuré son succès et un rideau de flammes, occasionnellement propulsé devant lui.

* Photo par Thomas Delplanque.

Les festivaliers ne se montrent pas forcément familiers avec les paroles de ses titres, avant que l’artiste n’interprète cette Sainte Trinité : A Day in the Life, Sprinter, puis l’immensément populaire Doja, laissant à chaque occasion le public quelque peu perdu sur le reste des paroles après avoir chanté cette première phrase que l’on ne présente plus.

L’artiste quitte la scène, et en regardant rapidement autour de soi, on le remarque, que les visages de la foule sont jeunes, dans la vingtaine en majorité.

Après avoir misé sur un public plus âgé le vendredi, et un autre dans le début de l’adolescence la veille, le festival Osheaga prouve une fois de plus qu’il est capable d’attirer n’importe quelle clientèle tant son affiche s’avère diversifiée et éclectique.

* Photo par Cassandra Lacroix.

Sans limites

Éclectique, et cela jusqu’au bout.

Quelques minutes avant Central Cee se produisait Tom Odell, un autre artiste britannique à l’univers diamétralement opposé à son compatriote.

Odell installe tout au long de sa performance une ambiance douce, lover, l’artiste enchaînant ses succès au piano avec cœur, talent, mais surtout, une voix puissante et juste.

* Photo par Cassandra Lacroix.

Armé de lunettes fumées et d’un style plutôt bourgeois, le musicien propose l’un des concerts les plus mémorables de la journée, d’un point de vue personnel, terminant en crescendo par l’interprétation du succès commercial Another Love.

Puis on se retrouve avec de la drill anglaise.

Comme quoi, les horizons musicaux sont vastes, et Osheaga en propose pour tous les goûts.

Vraiment, pour tous les goûts.

À 19h10 débute Kim Petras, artiste pop allemande et figure de la communauté LGBT, dû à son titre de la « plus jeune personne à recevoir une opération de transition », apparemment.

La musique s’avère sympathique, entraînante. Les paroles, un peu moins.

Le capital de sympathie de Petras et sa présence scénique sont indéniables, seulement, son univers tourne beaucoup, peut-être un peu trop autour de la vulgarité facile.

* Photo par Thomas Delplanque.

Cette dernière amènera pourtant un jeu assez amusant entre le public et le caméraman, filmant des expressions salaces écrites sur les téléphones des festivaliers, et les projetant sur les écrans des deux grandes scènes.

Odell, Cee et Petras, trois segments ne partageant rien en commun, mais dressant dans les grandes lignes le portrait de cette nouvelle génération de mélomanes.

La beauté d’un festival.

 

S’amuser sur scène

Nombre d’artistes semblent parfois blasés, pas forcément heureux d’occuper une tête d’affiche, tant une vaste expérience a le pouvoir de tuer l’enthousiasme.

Absolument tout le contraire de Fred Again.. [n.d.l.r.: oui oui, ça s’écrit bien avec deux points]

* Photo par Cassandra Lacroix.

Le producteur de 30 ans, de son vrai nom Frederick John Philip Gibson, promet qu’il « ne prendra rien pour acquis » durant son passage, et force est de constater que ses actions refléteront ses mots prononcés.

Fred Again.. débute avec une version de dix minutes du titre Kyle (I Found You), prenant plaisir sur les planches accompagné de son fidèle compagnon Tony Friend.

Au cours de la chanson, un message est projeté sur les trois écrans des scènes voisines, expliquant en français son parcours, et à quel point il se sent chanceux d’être dans les rangs de cette édition d’Osheaga.

Une touche charmante de la part du Britannique.

* Photo par Cassandra Lacroix.

Fred Again.. vit sa musique, alterne entre synthétiseur et pads, vibre au son de ses propres productions.

Le DJ continue de remercier la foule, cette dernière lui rend en s’ambiançant durant l’entièreté de son segment, sautant encore et encore face à cet artiste généreux.

Pourtant, la générosité semble avoir ses limites.

Ayant dépassé son temps alloué de trois minutes, la production d’Osheaga coupe les enceintes de la Scène de la Rivière, laissant place au génie Lamar.

* Photo par Cassandra Lacroix.

Fred Again.. remercie une dernière fois le public sur les écrans, sans le moindre son, à la manière de Machine Gun Kelly à la fin de sa performance, sur cette même scène, il y a un an de cela.

Le golden hour est déjà passé, on aperçoit la grande roue illuminée en arrière-plan, et il ne reste plus que quelques heures au festival.

On se dit à l’année prochaine alors.

 

Photos en vrac du dimanche

Kendrick Lamar

par Thomas Delplanque

Fred Again

par Cassandra Lacroix

Saint Levant

par Thomas Delplanque

Kim Petras

par Thomas Delplanque

Japanese Breakfast

par Thomas Delplanque

Central Cee

par Thomas Delplanque

Ambiance générale

par Cassandra Lacroix

Foals

par Cassandra Lacroix

Julia Jacklin

par Cassandra Lacroix

Tom Odell

par Cassandra Lacroix

beabadoobee

par Cassandra Lacroix

Hollow Coves

par Cassandra Lacroix

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