crédit photo: Marie-Claire Denis
Marcus Miller

Festival de Jazz de Montréal 2022 – Jour 2 | L’énergique pépinière de Marcus Miller avec le fantôme de Miles

Héritier de la fin de carrière de Miles Davis, le bassiste Marcus Miller nous présente sa nouvelle formation de jeunes talents avec les claviers Alexis Lombre et Julian Pollack.

Le concert commence doucement avec un nouveau titre aux nombreuses références au titre A Night In Tunisia de Dizzy Gillespie avec le son reconnaissable de la basse de Marcus Miller.

Il faut dire que c’est un des rares bass hero de ce monde qui a atteint la notoriété dans les années 1980 avec ses collaborations avec un Miles Davies dans ces derniers miles et plus ou moins inspiré. Miller lui apportera des compositions qui marqueront la fin de carrière de Miles comme sur les albums Tutu ou Amandla.

Le jeu de Marcus Miller est fortement inspiré du funk et est marqué par une forte utilisation du slap, cette technique qui consiste à faire claquer les cordes contre la touche pour un effet percussif particulier. Certaines mauvaises langues disent qu’il en abuse et que c’est un effet facile. Ce qui n’est pas totalement injustifié mais Miller sait se démarquer sur d’autres points.

Marcus Miller a peut-être hérité ça de Miles, il sait s’entourer de musiciens émergents et leur laisse une grande place dans ses concerts. En 2010, sur le tournée Tutu Revisited, j’avais pu découvrir le trompettiste Christian Scott aTunde Adjuah qui depuis étend sa réputation de plus en plus et vient régulièrement au festival de jazz de Montréal dans des salles de plus en plus grandes.

Ce soir, la formation est composé de Donald Hayes au saxophone, Russell Gunn à la trompette, aux claviers : Julian Pollack et Alexis Lombre ainsi que Anwar M. Marshall à la batterie et bien sûr Marcus Miller à la basse électrique et à la clarinette basse.

De cette formation, je retiens la présence des deux claviéristes qui ont des jeux bien distincts mais complémentaires : à gauche, Julian Pollack est plus raffiné avec des harmonies complexes et avec des sons plus expérimentaux; à droite, Alexis Lombre a un jeu plus direct et énergique.

Marcus Miller s’exprime régulièrement dans un français de qualité et nous présente son titre Mr Pastorius en hommage à LA légende de la basse Jaco Pastorius, titre paru sur l’album Amandla de Miles Davis sorti en 1989. Le trompettiste Russell Gunn utilise sa trompette bouchée et prend la position courbée et reconnaissable de Miles, ce qui n’est pas sans laisser un petit malaise. C’est peut-être beaucoup dans l’identification avec Miles…

La soirée se poursuit avec ce qui sera l’apogée de la soirée, le titre Bitches Brew tiré de l’album du même nom de Miles (en 1970) et qui ouvrira les portes au jazz rock et aux excès de mauvais goûts qu’offrira régulièrement le genre. Ici, Miller en présente une interprétation ouverte et laissera une grande place à son band pour multiplier les solos et briller. Par contre, une tentative de duel saxophone / trompette ne décolle pas vraiment : absence de chimie entre les deux ou soirée moyennement inspirée pour le duo?

Le titre suivant est plus introspectif avec un titre en formation réduite qui met à l’honneur Miller à sa clarinette basse, le temps de laisser retomber la poussière. S’ensuit pour finir le titre Tutu, le hit incontournable de Miller qui termine en puissance un concert énergique emmené par la direction de Miller et l’inventivité des musiciens.

En rappel, Miller commence un long jam par la mélodie de Gens du pays de Gilles Vigneault qui arrive ensuite au riff de basse le plus connu de Come Together.

Avec Marcus Miller, on assiste toujours à un concert de qualité et le fantôme de Miles est très présent, parfois même lourd. C’est aussi de nouveaux talents : si les cuivres étaient plutôt tranquilles ce soir, j’ai eu la joie de découvrir la talentueuse claviériste Alexis Lombre dont l’énergie et la chaleur ont brillé ainsi que son comparse de clavier Julian Pollack.

Anecdote de plus en plus répandu, ma voisine a filmé intégralement le show avec son cellulaire jusqu’à ce que je me tanne et que je lui fasse remarquer que c’était particulièrement désagréable d’avoir un écran en permanence dans mon champ de vision. En tout cas, je lui souhaite bien du plaisir à regarder ses cadrages croches non stabilisés avec un son trop compressé… Ce qui me fâche le plus, c’est qu’il existe vraisemblablement une captation vidéo PROFESSIONNELLE disponible sur les internets parmi les nombreux festivals d’été fréquentés par Marcus et sa gang. Après ce cruel épisode de manque de savoir-vivre, j’ai pu enfin profité pleinement du show.

Paolo Angeli en première partie

En première partie, un one-man band du jazz, Paolo Angeli.

C’est un guitariste qui utilise une guitare sarde préparée. Concrètement, c’est une guitare acoustique frankeinstein avec un pic et un cordier de violoncelle, des cordes à résonances sympathiques, un système de marteaux qui frappe individuellement chaque corde et piloté vraisemblablement par un système de pédalier… Le tout agrémenté de nombreuses pédales d’effet et d’un chant de type mélopée à base de «Aaaah» et autres «Ooooh». Ça ressemble à une trop longue démonstration de pédales d’effet avec des accords dissonants et un chant lancinant.

Un des très rares concerts où je n’ai pas tenu jusqu’à la fin et je suis capable d’en prendre.

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