crédit photo: Alexandre Guay
Etienne Coppée

Étienne Coppée à Coup de cœur francophone | Pleurer les spectacles d’appartement

La façade de la Chapelle Notre-Dame-de-Bon-Secours qui découpait le ciel sombre de l’automne ne laissait pas présager la singularité de l’expérience dans laquelle le public d’Étienne Coppée s’embarquait ce soir. L’artiste a annoncé sur les réseaux sociaux que ses spectacles du 9 et du 10 novembre à Coup de cœur francophone seraient spéciaux. Il flirtait peut-être avec l’euphémisme. « Spectacle » n’est en fait probablement pas le terme approprié. Parlons plutôt d’une invitation dans la maison éphémère d’Étienne Coppée.

On nous accueille dehors avec chaleur. C’est le premier contact avec une personne membre de l’équipe et c’est loin d’être le dernier. Toute la soirée, les petites abeilles d’Étienne butinent et s’affairent à ce que le tout soit réussi. Le récit commence au premier étage de la chapelle, dans la « cuisine », où un énorme buffet attend les chanceux et les chanceuses qui croyaient seulement être venu·es écouter le doux folk du gagnant de la 25e édition des Francouvertes. Chili, crudités, bouchées, biscuits et café garnissent la table. Les gens se servent, perplexes, quoiqu’amusés. « Bienvenue chez Étienne! »

Plus haut, un énorme salon décoré avec soin invite le public à habiter l’espace, à faire comme chez soi. Les convives s’y promènent, une coupe de vin rouge à la main et quelque chose à mi-chemin entre la curiosité et l’émerveillement tapi au fond de l’œil. C’est évident : la soirée ne sera pas ennuyante.

Les surprises se poursuivent

Des affiches barrées du mot « confessionnal » nous guident vers un couloir étroit où sont filmées des entrevues. À notre arrivée, cinq personnes répondent aux questions de Sarah, membre de l’équipe d’Étienne, qui demande à ses intervenants et intervenantes de réfléchir sur l’œuvre du chanteur. Des moments filmés, comme l’entièreté de la performance d’ailleurs. On espère qu’ils contribueront à un projet cinématographique quelconque : tous les ingrédients y sont.

Cela fait déjà une trentaine de minutes que Sors-tu? a pénétré dans la chapelle et le spectacle s’apprête déjà à commencer. On descend l’escalier et prend enfin place dans la majestueuse salle qui fourmille de spectateurs et spectatrices visiblement excité·es de connaître la suite. D’entendre la musique.

Chapelle ou salon?

Étienne et son équipe ne laissent pas planer le mystère du décor trop longtemps. On apprend que l’artiste, à ses débuts, performait dans des appartements. D’où le parcours immersif et convivial.

J’ai voulu revenir à ça ce soir, sauf que là mon appartement est [vraiment] grand!

L’ambiance est réussie : l’éclairage tamisé, la chimie entre les musiciens et musiciennes et l’humanité criante d’Étienne Coppée contribuent à ces allures de rencontre familiale, de moment de partage. Pas étonnant de la part d’un l’auteur-compositeur-interprète dont les thèmes de prédilection sont l’amour et l’amitié.

Étienne s’est entouré d’une solide équipe, dont ses acolytes les plus fidèles : Flavie Melançon (dont la voix épate à chaque fois), Raphaël Pépin-Tanguay et Bruno St-Laurent. Julien Comptour et Sabrina Fournier complètent le band. Tantôt debout au devant de la scène, tantôt installé·es dans les nombreux canapés qui jonchent l’espace, ils et elles manient claviers, guitares, trombone, autoharpe, flûte traversière, et surtout voix, qui s’harmonisent pour créer des moments de gospel qui frôlent le spirituel. Les pièces Rien de plus grand et Je voudrais voir New York, tirées du dernier et seul album d’Étienne Coppée, Et on pleurera ensemble, en font partie.

Seul ou à plusieurs

Plusieurs mains (et plusieurs mois) ont été nécessaires pour mener à bien le spectacle. On note Flavie Melançon, Nicolas Ouellet et Philippe Brach à la mise en scène. Une apparition de Salomé Leclerc et Simon Kearney ajoute aussi à l’interprétation de L’été indien de ta vie, tirée du EP éponyme. Le morceau s’allonge, enjolivé par les voix des deux invité·es, et se transforme en L’été indien de Joe Dassin, au grand plaisir du public qui chantonne et rigole. D’autres trésors déterrés ponctuent la soirée, comme une reprise surprenante de Minuit chrétien, qui s’adapte bien à la Chapelle Notre-Dame-de-Bon-Secours, évidemment.

Étienne s’offre cependant quelques moments en solo au piano, qu’il a d’ailleurs déménagé de chez lui jusqu’à la chapelle. « Y’a beaucoup de chansons que j’ai composées à ce piano », nous apprend-il. Dont une née la veille, qu’il nous interprète même si elle est vierge de paroles. « Les grands espaces comme ça, où le son est magique, ça crée souvent des nouveaux morceaux. » À en juger par les multiples ovations offertes par le public et l’émotion plus que palpable dans la salle, le mérite revient aussi à Étienne Coppée et ses ami·es. Même si le principal intéressé ne semble pas avare d’attention.

« Ça fait bizarre de recevoir autant d’amour juste dirigé vers moi, confie-t-il après le rappel. Applaudissez-vous aussi. » Ce qu’on a fait, docile, mais déjà nostalgique d’une soirée à l’effigie d’un artiste parfaitement non conventionnel.

Une autre représentation de ce spectacle d’Etienne Coppée se tiendra ce soir, même heure même poste.

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