Jimmy Hunt

Critique | Jimmy Hunt joue Maladie d’amour en intégral au Cabaret du Mile-End

« Ça va ? Vous vous sentez pas trop dans un lancement ? J’espère que non. C’est ça le but ».

Vrai que la formule conventionnelle du lancement peut être un peu lassante, parfois. Trois ou quatre chansons, sur l’heure du souper, dans une salle remplie de journalistes et d’amis artistes, et des remerciements à n’en plus finir ; ce n’est pas exactement l’expérience de concert la plus enthousiasmante. Mais ça marque au fer rouge la parution d’un album. C’est efficace à défaut d’être palpitant.

Jimmy Hunt, lui, a décidé de se la jouer différemment. Prévu à 20h, le concert a commencé un peu après 21h30, alors que le Cabaret du Mile-End débordait de beaux gens qui bavardaient. Il y avait des amis artistes en masse (Lisa LeBlanc, Bernard Adamus, les gars d’Avec pas d’casque, Fanny Bloom et bien d’autres), mais beaucoup de fans aussi, qui avaient payé 15$ pour assister à la soirée.

« Quinze piasses pour un lancement, c’est pas mal cher… », soupirait l’un d’eux près du bar. On y reviendra.

Mais au fond, c’était un lancement qui n’en était pas un. Plutôt un concert de 90 minutes, de grande qualité. « Y’en a qui connaissent l’album un peu, déjà ? », demande Hunt à la foule conquise. « Tant mieux parce qu’on le joue au complet. Dans l’ordre. »

Hunt était flanqué de quatre excellents musiciens, dont son bras droit pour le nouvel album, le guitariste aux cheveux doux Emmanuel Ethier, ainsi que François Lafontaine aux claviers, qui a été appelé en renfort à moins d’une semaine de préavis. Arborant une nouvelle coiffure rockabilisée, Lafontaine s’est très bien tiré d’affaire, ajoutant parfois quelques touches d’improvisation qui détendaient l’atmosphère et donnaient envie aux musiciens de jammer. (On y reviendra, ça aussi).

 

Maladie d’amour et plus encore

Si vous l’ignoriez toujours, le nouvel album de Jimmy Hunt, Maladie d’amour, est disponible chez les disquaires et en ligne depuis le 1er octobre dernier. Et c’est sans doute le meilleur album francophone de l’année.

Huit jours plus tard, donc, Maladie d’amour nous était présenté en intégral, sur scène, à commencer par les excellentes Antilope et Marie Les Bleus.

Plus tard, Jimmy Hunt laisse la guitare de côté pour jouer du synthé sur Nos Corps, chose qu’on n’avait encore jamais vue de la part de Jimmy Hunt.

Les chansons se succèdent, dignement interprétées par un quintet de feu. Hunt, lui, n’a jamais paru aussi absorbé. Son chant est plutôt soigné (ce qui n’était pas sa grande force, plus tôt en carrière), incarné et sa poésie truffée d’humour subtile frappe dans le mile. 

Grand moment lors de l’interprétation de la chanson titre, avec Hunt seul à la guitare électrique légèrement saturée (au lieu de l’élégante guitare acoustique de l’album). « La nuit / je fume devant chez toi / sans que tu me vois / je veille sur ton sommeil / c’t’une maladie mentale / ou une maladie d’amour ».  Chair de poule garantie.

Tout de suite après, la belle Kandle – une autre amie artiste – s’est jointe à Hunt pour leur joli duo Don’t Let Me Go. Légèrement en retrait sur scène (alors que les musiciens s’étaient éclipsés pour laisser place aux deux chansons acoustiques du set), tout le monde a remarqué sa présence, sauf le technicien de son, apparemment, reléguant sa présence à un rôle de figurante au micro muet. Dommage.

Après Un nouveau corps, qui conclut l’album, la troupe est revenu pour interpréter trois chansons inédites, des « retailles » de la session d’enregistrement de Maladie d’amour, qui pourraient voir le jour en 2014 sous la forme d’un mini-album. Comme Avec pas d’casque l’avait fait avec Dommage que tu sois pris

La dernière chanson interprétée (on n’a jamais su le titre) ne prendra fort probablement pas cette forme sur album, mais les musiciens se sont amusés à l’étirer, jammant pendant une bonne quinzaine de minutes vers une finale bruyante et joyeusement chaotique.

Toute une soirée, finalement. Le genre de lancement qui ne fait pas que marquer au fer rouge la disponibilité d’un album. C’était un show à voir, une occasion unique d’entendre un excellent album interprété d’un bout à l’autre, dans l’ordre, par des musiciens qu’il sera impossible de réunir pour une tournée.

Dernière chose aperçue en sortant du Cabaret Mile-End : le gars du bar de tantôt, qui avait le sourire fendu jusqu’aux oreilles. Quinze piasses pour ça : meilleur rapport qualité-prix ever !

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