Critique album | Mange L’Ours Mange – Loin de l’oeil

Mange L'Ours Mange - Loin de l'oeil Mange L'Ours Mange Loin de l'oeil

La frénésie des comebacks se poursuit, même au Québec. Après Les B.B., Possession Simple, Vilains Pingouins et autres Parfaits Salauds, c’est au tour de Mange L’Ours Mange de sortir de son hibernation et de passer à l’attaque avec un quatrième album anachronique, plus ou moins réussi en première moitié, mais source de quelques bons moments bien rock lors d’une seconde partie surprenante. Qu’on ramène Paul Sarrasin et son perfecto de cuir !

Après quinze ans, on se demandait bien ce que MOM pouvait offrir de neuf. Le hard rock alternatif que la formation québécoise proposait jadis s’inscrivait dans le courant d’une certaine époque, mais d’autres formations ont pris le relais depuis et apporté le genre à un autre niveau… avant que celui-ci ne meurt de sa belle mort. Ci-gît le rock-à-couilles québécois. Les inconsolables peuvent se rabattre sur Gros mené et les Dales Hawerchuck.

L’électro-pop à tendance rock industriel n’est plus tout à fait au goût du jour non plus… Il y a longtemps qu’on a entendu un groupe québécois s’illustrer dans ce créneau.

Et pourtant, Mange L’Ours Mange rapplique avec un album qui sonne exactement comme la suite logique de leur matériel précédent : résolument rock-à-riffs, distorsion bien croustillante (mais étrangement camouflée au mix), voix un peu ado et textes accessoires. Les influences metal, grunge, punk bien en vue, ils foncent droit devant avec un disque fidèle à leur style, comiquement illustré par une pochette où l’on peut voir une mère-monstre allaitant ses poupons avec trois de ses quatre seins. What the…

Mais revenons à la musique. Lorsque le groupe met la pédale douce, surtout en première moitié d’album, le décalage d’époque se fait sentir. On ressent un plaisir coupable à hocher de la tête au son de Kaska Der Mike, un riff Metallica/Alice In Chains plutôt amusant avec un refrain accrocheur, mais c’est pas mal tout ce qu’il y a de notable au départ, avec la correcte 222 Sluttish Avenue.

 

La bête prend son erre d’aller…

C’est en deuxième moitié d’écoute que ça se passe :  l’ours rugit davantage et nous rappelle à quel point le rock québécois manque cruellement de ce genre de force brute.

Bien que très simple, la grungesque Len de Lel (une chanson que Alice In Chains ne renierait certainement pas) lance les quinze dernières minutes sur les chapeaux de roue,  après quoi Sudarium (dont le riff et le tempo rappellent un peu Go With The Flow de Queens of the Stone Age) et la plus punk Du haut de mes rollers poursuivent dans cette même lancée, avant de conclure avec Terrifié! Terrifier!  (voir vidéoclip avec des meneuses de claque qui se la pètent ci-bas) et la sludge Bête de foire, qui conclut l’album de belle façon (serait-ce de la harpe que nous entendons!?).

Dans le communiqué qui accompagne l’album, on mentionne que « Franck Lizotte et François Bruneau (également réalisateur du disque) ont créé Loin de l’oeil sans aucune contrainte ni direction pré-établie, suivant l’inspiration du moment et l’urgence de produire un nouveau disque ».

Soit. Dans cette optique, Loin de l’oeil est peut-être une façon de secouer la rouille, ce qui expliquerait pourquoi la face B (au sens figuré) sonne comme un groupe mieux réchauffé qu’en première demie.

Alors si le retour est durable et que MOM entend produire d’autres albums, un peu plus d’audace au niveau de la production et des compositions plus mordantes remettraient ce bon vieux train sur les rails. Tant qu’à proposer, de façon indépendante, un album condamné à ne jamais passer aux radios commerciales, aussi bien en faire une bombe atomique, non ? Et à partir de là, qui sait…

Pour l’instant, celui-ci est pour nostalgiques trentenaires seulement.

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