crédit photo: Morgane Dambacher
Coup de coeur francophone (CCF)

Coup de coeur francophone 2021 | Une soirée entre amis avec Kanen et Matiu

Kanen et Matiu ont pris d’assaut le Verre Bouteille mardi soir dans le cadre du festival Coup de Coeur Francophone. Réunis pour un plateau double, les deux amis se sont échangé la scène et ont fait de précieuses apparitions sur les prestations de l’autre, offrant deux paysages musicaux différents, mais complémentaires.

La première est montée sur scène sous un éclairage rouge. Elle a interprété, comme pièce d’ouverture, la très douce Tes veines en canot, sous un nuage de fumée, gracieuseté d’une machine à glace sèche particulièrement performante.

Le Verre Bouteille est bondé et tout le monde boit ses paroles. Difficile de faire autrement devant la prestance de l’interprète qui se trouve sur scène.

Elle offre ses salutations aux spectateurs dans sa langue, l’innu-aimun, pour ensuite les traduire en français. Devant elle sont assis beaucoup de gens qu’elle ne connaît pas, mais qui eux, semblent bien la connaître. La foule chantonne ses paroles avec elle. On comprend que les premiers rangs sont occupés par des membres de sa famille et des proches d’elle et Matiu.

La soirée en est une d’amitié: les deux artistes qui montent sur scène ont grandi sur la même rue. « Ce soir, je joue avec les amis, dit l’artiste en pointant vers ses musiciens, et on joue aussi avec Matiu, mais je trouvais qu’on manquait quand même d’amis ».

Plus tôt dans la journée, elle avait partagé sur Instagram qu’un invité surpris ferait son apparition à son spectacle. Les indices: il vient de la Côte-Nord, a les cheveux frisés, mais n’est pas André Sauvé.

C’est donc ainsi qu’elle a demandé à Louis-Jean Cormier de monter sur scène. Ensemble, ils ont interprété une chanson mariant à merveille les styles des deux artistes, aux airs de pop-folk. « C’est Elisapie qui nous a matchés pour qu’on écrive une toune ensemble. On l’a écrite par textos », a-t-elle raconté.

Celui qui a récolté un Félix dans la catégorie Album de l’année – Adulte contemporain au dernier Gala de l’ADISQ est retourné s’asseoir au fond de la salle au bar, tentant tant bien que mal d’écouter la suite du spectacle malgré des voisins assez bruyants.

Le spectacle a continué, et Kanen a charmé la foule en offrant une prestation impressionnante. Elle a chanté ses pièces autant qu’elle les a jouées: on pouvait lire les émotions dans son visage et sa gestuelle autant que dans sa voix. Elle habite la scène comme si elle était sienne.

Avec une chanson country, elle a chanté l’amour à sa langue et à sa communauté, communiquant le souhait d’être capable de dire « je vous aime » en innu-aimun. Le coup de coeur de Sors-tu?, cependant, c’est la pièce Tshukain. Celle-ci est ponctuée de distorsion frappante, à en faire lever le poil sur les bras.

Kanen et Matiu se croisent sur scène pour la dernière chanson de la première. La voix rauque et grave du deuxième complète avec grâce celle haute et claire de Kanen, et c’est ainsi que la première partie prend fin.

 

Matiu

Pour la prestation de Matiu, l’humour était à l’honneur. Entre les chansons qui font taper du pied et des mains, la foule se tordait de rire. L’artiste de la communauté Uashat mak Mani-Utenam lui parlait comme si elle était une vieille amie. Il a passé un bon moment à demander aux spectateurs d’où ils venaient, même s’il peinait à les voir derrière le nuage de fumée qui envahissait toujours la scène.

« Je vais vous amener sur la Côte-Nord, là où ça sent l’épinette », a-t-il prévenu, avant de jouer un country folk rock, parfois engagé, d’autres fois parlant plutôt de soirées arrosées « quand les flos sont couchés ». L’artiste ne s’est pas gêné pour couper ses chansons en deux: blagues de Paris Pâté, petite leçon d’innu-aimun, toutes les raisons semblaient bonnes pour faire la discussion à la foule.

Sa musique donne le goût de bouger, mais la foule a répondu très timidement à l’invitation que lui a lancée Matiu à danser. Pourtant, il l’a gâté avec des chansons qu’elle connaît bien: beaucoup chantaient à tue-tête les paroles en même temps que lui. La cerise sur le sundae: il reprend des chansons du terroir québécois avec une précision et une fidélité sans pareil. Le temps d’une chanson, il semblait que Richard Desjardins était sur scène. Puis, autour des Colocs d’être repris.

La foule a exigé un rappel, et ne se fait pas prier. Kanen et Matiu se sont à nouveau retrouvés sur scène et ont clos la soirée avec une autre pièce enivrante.

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