crédit photo: Patrick Beaudry
Travis Scott

Travis Scott au Centre Bell | La rage dans la peau

Des flammes. De l’autotune. Des mosh pits et un défoulement ardent. Travis Scott était de retour dans la métropole pour présenter son spectacle de la tournée nord-américaine Circus Maximus Tour, près de cinq ans après avoir mis les pieds sur le sol québécois pour la dernière fois. Le rappeur texan s’est montré généreux à souhait envers son public, électrisant l’aréna à travers les succès de sa riche palette trap.

La soirée débute.

Greetings from Utopia. Before the show starts, open that shit up.

Une voix féminine, qui ponctuera souvent le spectacle, annonce ces quelques mots en boucle en guise d’introduction. Des mosh pits se forment.

Vient le sample de Gentle Giant.

Puis Travis Scott jaillit du sol.

Des flammes, des artifices.

Ça commence.

La rage, commence.

* Photo par Patrick Beaudry.

 

À l’écoute

Logiquement, Travis Scott débute son spectacle avec HYAENA, le premier titre de son quatrième et plus récent album, l’accompli Utopia, paru à l’été 2023. L’Américain poursuit avec les morceaux de ce même projet, enchaînant sur THANK GOD et MODERN JAM.

Une particularité flagrante du spectacle de Travis Scott? La scène n’est pas rectangulaire, et n’est simplement pas disposée sur une extrémité du parterre du Centre Bell. Un plateau en forme de serpent au milieu de la fosse sert de terrain de jeu à l’artiste, permettant à Scott de se balader de tous bords tous côtés et donc, de donner l’occasion à l’intégralité de ses fans de l’apercevoir au moins une fois à quelques mètres à peine.

Travis Scott a essuyé un tollé légendaire à la suite de la tenue de l’Astroworld Festival en 2021. Inutile de préciser encore les tragiques incidents.

Mais l’événement est isolé et Travis Scott chérit ses fans, quoi que quiconque ose en dire. Son spectacle à Montréal en est un énième exemple.

Dès le premier quart de la soirée, l’annonceuse suggère de « sélectionner des participants » pour prendre part à l’utopie. Ne sachant où le rappeur désire se diriger durant l’interlude, la foule réagit malgré tout d’emblée, chaque membre du public voulant devenir l’heureux élu pendant que les projecteurs se baladent à travers le parterre et les gradins du Centre Bell.

Travis Scott pose son choix sur une poignée de personnes, et les invite à survoler deux par deux la scène sur une plateforme pendant que l’artiste reprend le train de son spectacle.

Scott vient de faire fleurir des souvenirs impérissables dans la mémoire de ces chanceux.

Ces quelques membres du public sélectionnés sur le tas raconteront l’anecdote à leurs amis, à la famille, comme quoi ces dizaines de dollars dépensés se seront transformées en une expérience sans prix, inqualifiable, en un claquement de doigts, dès que Travis Scott pointait en leur direction.

* Photo par Patrick Beaudry.

Et les exemples de la générosité dégagée par le rappeur ne manquent pas : avant d’entamer NO BYSTANDERS, Travis Scott remarque un membre du public particulièrement jeune. L’artiste s’offre une trentaine de secondes pour vanter les mérites de sa présence, poursuivant son discours improvisé en suggérant au garçon de chasser ses rêves les plus fous et de renvoyer tous ceux qui ne croiront pas en lui.

Travis Scott aime ses fans. Ne vivons pas dans le passé.

 

Atteindre l’idéal

Après cinq ans d’attente, Travis Scott lançait à la fin du mois de juillet dernier Utopia sur les plateformes, clôturant définitivement l’ère d’Astroworld. Scott manie un univers propre et marque admirablement les différentes périodes de ses albums dans l’image qu’il projette, ou simplement dans la musique directement. Regroupées dans un seul concert, les différentes époques de La Flame présentées permettre de se réaliser encore davantage à quel point Travis Scott agit comme une figure de proue du rap contemporain, et comment l’artiste écrit une légende qui deviendra référence du hip-hop des années durant. Scott met son âme quand il foule les planches, et son énergie inégalée est à l’instant répliquée par son public.

Le rappeur n’hésite pas à piocher dans du vieux matériel, interprétant Mamacita et Upper Echelon, tirées de ses deux mixtapes gratuites. Owl Pharaoh, son premier projet long, fêtait justement ses 10 ans l’année dernière. D’un rappeur prometteur à une superstar mondiale, du chemin en a été parcouru, c’est certain. Look mom, he can fly.

Travis Scott invite le public dans le désert texan de son premier album, Rodeo (Maria I’m Drunk, 90210, Nightcrawler), le fait ensuite voyager sur les montagnes russes du regretté Astroworld (BUTTERFLY EFFECT, SICKO MODE). La foule est particulièrement réactive, elle sait que les chances de voir Scott de ses yeux ne sont pas fréquentes.

Elle est réactive, mais va entrer en transe quand elle entendra ce morceau. CE morceau. Le niveau supérieur, la quintessence du rage rap.

* Photo par Patrick Beaudry.

Si le « FE!Nometer » permet de constater l’appréciation d’une venue par Travis Scott sans que celui-ci en laisse expressément un mot, il n’est pas insolent d’affirmer que Montréal s’en sort plutôt bien dans l’équation. Un peu moins que New York, mais davantage que Toronto.

Travis Scott interprète 11 fois le titre FE!N, alors que le public semble de plus en plus réceptif au morceau tant les minutes s’écoulent. Sans vouloir jouer les rabat-joie, la rumeur selon laquelle Scott s’attarde une heure à répéter la chanson est fausse. Suivant la première fois, l’artiste ne reprend que l’introduction du morceau en collaboration avec Sheck Wes et Playboi Carti, ce qui s’avère assez toutefois pour enflammer de plus belle un public déjà bouillant.

À noter que Travis Scott a inclus le titre BACKR00MS dans sa setlist pour la deuxième fois de sa tournée seulement, le morceau de Playboi Carti en collaboration avec le Texan étant paru la semaine dernière. À donner hâte de savoir ce que le rappeur démoniaque d’Atlanta réserve à ses auditeurs prochainement, lui qui se fait dangereusement plus actif ces derniers temps.

 

À en faire trembler le Centre Bell

Malgré la discographie, malgré les talents sur scène de Travis Scott, malgré l’aura du rappeur, un reproche ne peut lui échapper : les basses sont encore trop puissantes. L’élément avait déjà agacé l’un de nos chroniqueurs en 2019, et sans que cela ne gâche complètement le concert, l’ingénieur son aurait mieux fait de diminuer ces fréquences en spectacle.

Utilisées avec parcimonie, les basses font trembler un corps entier et offrent ce sentiment escompté de concert marquant. À l’inverse, elles peuvent empiéter sur les hautes fréquences et ne ressortir dans les haut-parleurs qu’un ramassis brouillon et indigeste. Il n’est pourtant pas compliqué de remédier au problème, et il est étrange de savoir pourquoi Travis Scott (et d’autres rappeurs du courant) s’entête à ravager les oreilles de basses destructrices.

* Photo par Patrick Beaudry.

Après l’éventail de FE!N, Travis Scott dit au revoir à ses admirateurs montréalais avec un enchaînement solide : SICKO MODE, l’introduction d’Antidote et goosebumps. Le rappeur quitte la scène sur TELEKINESIS en remerciant la foule.

Travis Scott tient le monde à ses pieds et semble avoir atteint l’utopie. Saurait-il aller chercher des sommets encore plus hauts?

* Photo par Patrick Beaudry.

 

Grille de chansons

  1. HYAENA
  2. THANK GOD
  3. MODERN JAM
  4. Aye
  5. BACKR00MS
  6. sdp interlude
  7. 3500
  8. Nightcrawler
  9. SIRENS
  10. Upper Echelon
  11. Praise God
  12. GOD’S COUNTRY
  13. MY EYES
  14. BUTTERFLY EFFECT
  15. Highest in the Room
  16. Mamacita
  17. CIRCUS MAXIMUS
  18. DELRESTO (ECHOES)
  19. Maria I’m Drunk
  20. CAN’T SAY
  21. MAFIA
  22. I KNOW?
  23. 90210
  24. MELTDOWN
  25. TOPIA TWINS
  26. NO BYSTANDERS
  27. FE!N (x 11)
  28. SICKO MODE
  29. Antidote
  30. goosebumps
  31. TELEKINESIS

Photos en vrac

* Photo par Patrick Beaudry.

* Photo par Patrick Beaudry.

* Photo par Patrick Beaudry.

* Photo par Patrick Beaudry.

* Photo par Patrick Beaudry.

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