James Blake

James Blake à l’Olympia de Montréal | Quand découverte et nostalgie se rencontrent

Montréal a été honoré de recevoir James Blake à l’Olympia, ce 10 octobre, au cours de sa tournée pour son récent album, Playing Robots Into Heaven, sorti à peine un mois plus tôt.  Une immense file de spectateurs et spectatrices entourait le bâtiment de l’Olympia. Bientôt, le chanteur britannique reconnu pour sa production électronique expérimentale allait réchauffer les corps habillés trop légèrement pour la vraie première journée d’automne, et peut-être ressusciter, ou garder en vie une époque dont le feu brûle encore pas si loin.

Dès les premières notes de Asking To Break, retour aux sonorités dance d’une autre décennie, celle qui a mis au monde le producteur électronique et chanteur britannique. On est pas loin de CMYK, du iPod Classic et des bonnes années de Pitchfork. Le nouvel album de Blake s’inscrit dans l’ère de la modernité de par la complexité de sa production, mais sait bien raviver le souvenir de ses débuts en tant que producteur et la charge émotive qui y est associée, du moins, pour les milléniaux comme moi.

Dès les premières notes de piano de l’iconique reprise de Limit To Your Love, la foule réagit avec ferveur. Il y a là élément de surprise : personne ne s’attendait à entendre une pièce datant de 2011 sur cette nouvelle tournée. Une douche de lumière rouge sur le chanteur et pianiste s’alterne avec un éclairage maximaliste bleu qui pompe au rythme des 808 qui font vibrer les corps et les esprits qui habitent l’Olympia le temps d’une soirée.

Une caractéristique notable de la performance live de James Blake est la similitude frappante entre sa voix en concert et les versions studio. Lorsque sa nouvelle chanson Loading démarre au milieu du spectacle avec sa large étendue vocale, propre au R’n’B et à la soul, c’est l’apogée de ce phénomène. Cependant, musicalement on est ailleurs, et c’est tant mieux. De légers changements au niveau de la disposition des accords, puis le trio des musiciens Ben Assiter, Rob McAndrews et James Blake amènent un dynamisme qui n’a pas d’égal à ce qu’on retrouve sur l’album.

D’ailleurs, un moment fort du spectacle est la montée finale de Loading qui, en live, est drastiquement accentuée, couronnée de son apogée, à 3:38 : le synthétiseur entre en scène comme un orgue d’église qui avale tout sur son passage, rappelant légèrement la fin de Watcher Of The Skies par Genesis. Ce moment est parsemé des exclamations de la foule en délire. Mais par délire, je veux dire « délire de catégorie mélomane tranquille ». Personne n’est là pour danser vraiment, ni même sur les pièces house qui suivront comme Fall Back. Pas d’artifices sur scène ni hors scène, peu de mots, seulement le trio de musiciens jouant ensemble depuis 2010. Seulement la musique.

Impossible de passer sous silence l’enchaînement de Say What You Will et Retrograde. Une fascination nostalgique et une satisfaction profonde ont envahi l’Olympia, qui a pu être déconcertée par le côté brusque de l’enchaînement des différents styles musicaux plus tôt dans le spectacle. Il est probable que c’eût été un choix artistique délibéré de la part de James Blake, mais l’ordre des chansons a pu sembler déroutant de temps à autre. Mais bon, tout est oublié lorsque le classique Retrograde emporte tout avec lui.

 

La fin du concert est marquée par la reprise de Godspeed de Frank Ocean par James Blake. « This love will keep us from blinding of the eyes, silence in the ears, darkness of the mind ». Ces mots résonnent dans tout l’Olympia avec une force qui leur est propre, déposant sous les yeux des spectateurs et spectatrices quelques larmes et le souvenir d’une performance de la part de James Blake en ce 10 octobre froid et inoubliable.

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