Ghost

Ghost au Métropolis | Gloire à Satan, gloire à l’orgasme féminin

C’est dans un Métropolis plein à craquer hier soir que les Suédois masqués ont prouvé que la flamme brûlait plus que jamais, dans un spectacle diablement impressionnant.


Ghost, c’est un peu comme cette femme mystérieuse, un fantasme un peu interdit qui se réalise : la première fois, c’est l’extase totale. La deuxième fois c’est toujours aussi bon, mais la saveur et l’excitation baissent un peu. Alors pour leur quatrième passage à Montréal, et le deuxième au Métropolis, on se demandait ce que les ghoules pouvaient bien nous offrir de plus. Ils ont simplement monté la barre d’un cran niveau sonore et scénique, et quelle claque. Ce n’est pas pour rien que Ghost est un des rares nouveaux groupes sur la scène capable de faire complet dans un Métropolis.

Niveau introduction on repassera, c’était moins bien fait que la dernière fois, et juste interminable. Mais quand les lumières se sont éteintes, et que le premier ghoule guitariste est sorti du noir avec juste une lumière blanche qui découpait sa silhouette, on savait qu’il allait se passer quelque chose ce soir. Ghost explose avec le récent Square Hammer, un titre incroyablement entraînant et accrocheur  qui s’avère splendide en concert. La scène est immense, digne d’un Iron Maiden des débuts, avec plusieurs plateformes et marches, et même un sol en damier. La batterie siège à gauche, les claviers à droite, et au milieu apparaît dans une ovation le majestueux Papa Emeritus III. Troisème chanteur de la formation, il s’avère être certainement le meilleur chanteur de la courte histoire de Ghost, alors que ces prédécesseurs pouvaient parfois laisser à désirer niveau performance vocale. Autre progrès qui fait une différence énorme : un jeu de lumière éblouissant et même un peu de pyrotechnie. Alors que le fond de scène est toujours décoré des immenses vitraux sataniques, les musiciens occupent l’espace en maîtres de leur élément, et c’est un pur plaisir à regarder… Et à entendre. Encore un point sur lequel Ghost nous surprend : le son est énorme, puissant à souhait, et très bien définit pour apprécier chaque mélodie épique à souhait comme From The Pinnacle To The Pit, joué en deuxième.

Finalement, l’excellence du son fait juste ressentir le talent musical de Ghost à envoyer des refrains mélodiques très pop à faire danser des jeunes filles pour les couper à merveille avec des gros riffs de guitare presque Black Sabbathiens, pesants avec une touche malsaine et sombre, le tout enrobé de paroles démoniaques. Alors oui, même si beaucoup les critiquent, comme le groupe américain Origin qui a sorti un chandail anti-Ghost « No Fucking Gimmicks » : si on enlevait leur mascarade et déguisements, la qualité de leur musique et compositions seraient assez solides pour leur garantir du succès. L’aspect théâtral ne fait que les porter encore plus haut.

La valse de Secular Haze, le puissant Con Clavi Con Dio du premier album, l’irrésistible Circe : Ghost commence à être doté d’une discographie contenant assez de bombes musicales pour nous offrir un spectacle remarquable. On se serait peut-être passé de l’espèce de reprise pop au milieu du concert, beaucoup d’autres chansons du groupe auraient mérité cette place.  Changement de costume, Papa Emeritus III enlève la grande robe et la coiffe papale pour son look plus épuré, révérend, qu’on peut voir dans les derniers vidéo-clips. Son charisme et sa présence étrange et envoûtante viennent ajouter à la magie du concert. Il tient littéralement le public au bout de ses gants blancs.

Les flammes et fumigènes exultent sur fond du lumières rouges pendant Year Zero. On est au Métropolis et Ghost est en train de nous en mettre plein la vue à coup d’explosifs sur une scène à plusieurs étages, tel un groupe des années 80 dans un stade. Incroyable. L’intensité ne baisse pas vraiment, peut-être pendant certains titres n’ayant pas autant de succès que les majestueux He Is ou Per Aspera Ad Inferi. Puis c’est déjà le temps du classique Ritual, qui voit une foule possédée chanter « Smells like dead human sacrifice ». Heureusement, contrairement à un concert de Watain qui sent réellement la mort, ça sent plutôt l’encens.

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Puis Papa Emeritus III s’assoit au bord de la scène, et s’embarque dans un long et captivant monologue. Avec un accent scandinave rendant parfois difficile la compréhension. Il démarre d’ailleurs comme cet article en décrivant la relation du public à Ghost comme une relation amoureuse, et comment garder la flamme, alors que certains les accusent d’être prévisibles. Juste ce discours était imprévisible. Le pape satanique ne manquera de faire allusion à une autre personne démoniaque  en mentionnant les élections américaines, promettant des meilleurs jours à venir malgré la situation. Par exemple avec la musique, et ce que fait Ghost en conclusion, peu importe l’étiquette qu’on veut leur donner : « a Rock’n’Roll show ». Avec la même morale au final : du fun, du sexe et du rock’n’roll. C’est vendredi soir, et il nous encourage à faire la fête, et peut-être rentrer accompagné à la maison pour une partie de plaisir charnel. Il remonte alors jusqu’à l’époque médiévale en expliquant qu’à travers les âges, l’église avait considéré l’orgasme féminin comme un pêché. Mais eux Ghost, au contraire : ils vénèrent Lucifer, invoquent Satan, et glorifient l’orgasme féminin. Alors il est peut-être temps justement,  nous propose-t-il, de finir cette soirée avec un orgasme. Les ghoules remontent  sur scène et c’est Monstrance Clock qui vient finir la communion avec le public montréalais. Come together, together as one. « Merci beaucoup Montréal ! », salue Papa Emeritus III au milieu des colonnes de fumée qui explosent jusqu’au plafond. Merci Ghost, d’être ce phénomène musical fascinant et différent dans notre époque de revivals et reformations, d’être aussi envoûtant et charismatique, et de faire l’effort de donner des prestations aussi remarquables. Hear Our Satan Prayer, For the cuming of seed.

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Ouverture ratée: Marissa Nadler

Tout le monde se demande bien ce que fait chanteuse de folk américaine en première partie de Ghost. Non pas qu’elle ne soit pas talentueuse, bien que ses chansons tournent vite en rond. Une pop sombre et feutrée, avec des touches électriques apportées par le guitariste qui l’accompagne. Mais quel est le rapport avec un groupe de hard rock occulte suédois? Aucun, et en témoignera le brouhaha grandissant de la foule qui écoutera le premier morceau avant de se demander combien de chansons elle va encore jouer. Alors soit elle couche avec un des ghoules, soit c’est un piston de l’industrie imposée par une personne de pouvoir, ou bien Ghost sont vraiment étranges, mais encore une fois, combien de groupes, même locaux, auraient mérité cette première partie très discutable.

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