Koriass

Francofolies 2014 – Jour 2 | Retour sur Koriass orchestral

C’est un rituel : l’émancipation musicale d’un rappeur passe souvent par la création d’un spectacle plus imposant avec des «vrais» instruments. Vendredi soir, c’était Koriass qui se lançait dans l’arène de la maturité avec un déploiement orchestral bien rodé, pratiquement parfait au niveau technique. Retour.

8h00 tapante : on se place sur l’étroite scène du Club Soda. À droite, la section des cordes, à gauche, celle des cuivres, puis tout autour, l’ensemble rock classique qui suit Koriass à chaque spectacle, notamment l’illustre Bobby One et le grand Manifest qui trône sur un piédestal faramineux au milieu de tout le monde.

Koriass arrive avec son énergie des grands jours, entonnant un Montréal-Nord bien senti, en guise d’échauffement. «C’est un show orchestral, mais j’veux pas que le monde soit vedge», déclare-t-il avant d’entonner Choses, alors que Bobby lance des vuvuzelas dans la foule. Idée sympathique, mais qui brisera l’intensité de certains moments plus intimistes.

«Cette chanson-là est dédiée à Boom Desjardins», annonce-t-il, avec son irrévérence notoire. Les sons subtils et aérés de 88 mph suivent : on apprécie que l’orchestre supporte la musique au lieu d’enterrer le vibe de la chanson. La foule, un peu endormie, se laisse transporter dans l’univers sombre des pièces de Rue des saules, le plus récent album du rappeur écrit pendant une dépression. Évidemment, on est loin des grosses bombes à la Saint-Eustache, mais Koriass profite de l’intensité dramatique de son gabarit scénique pour ajouter de la profondeur à ses nouvelles chansons.

Photo par Richard Mercier.

Photo par Richard Mercier.


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Renversement de tendance avec la dose rock L’ère de glace. Les cuivres et les cordes forment un tout saisissant, bien calibré, qui rehausse l’inquiétude globale du propos. La chanteuse Safia Nolin s’amène avec sa timidité attachante pour quelques chansons plus intimes, notamment Américain, Trouver Dieu et Supernova – probablement le moment le plus envoûtant de la soirée.

Les fans des premiers jours sont ensuite récompensés avec La neige au mois de mars, version jazzy. «En passant, c’est une chanson qui parle de vieillir et pas de cocaïne», nous rappelle judicieusement un Koriass un peu moins bavard que d’habitude. La fin du spectacle se fait sentir, alors que les trois gros hits Enfant de l’asphalte, Tséveudire et Saint-Eustache résonnent. D’ailleurs, le rappeur aura la mauvaise idée de faire monter sur scène deux jeunots au hasard pour chanter les paroles. Un peu long et inutile dans le cadre d’un spectacle aussi bien construit.

Après le spectacle, certains discutent plus ou moins intelligemment aux toilettes. «J’me sens comme une petite poutine…chu resté sur mon appétit», déclare un homme aux shorts bleus beiges, aux prises avec une carrure imposante. Il est vrai que, pour 30$, certains fans se seraient attendus à bouger un peu plus, comme c’est le cas habituellement avec Koriass. Compromis possible : une formule assise, qui aurait permis aux gens de se lever aux moments enthousiastes opportuns.

Reste que Koriass a livré le spectacle le plus audacieux de sa carrière et qu’il était, sans aucun doute, en grande forme.

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