Entrevue avec La Carabine | Rap sans prétention

Leur nom est partout ces temps-ci, mais on ne les connait pas encore très bien, ceux qu’on qualifie de révolutionnaires de la scène rap queb. Le duo La Carabine sera en spectacle le 2 février prochain pour nous présenter son tout premier album complet, Chasser ses démons, au Théâtre Ste-Catherine. La Carabine c’est qui? C’est Filion et Dom Polski, de leurs noms complets, Marc-André Filion et Dominique Polki. La Carabine c’est quoi? Quoi de mieux que de les laisser se présenter.

F0882ACE-5BFC-4B8B-AEDB-F9387ADAA395Vous vous appelez La Carabine, votre nouvel album s’appelle Chasser ses démons. Coudonc, êtes-vous des gars de chasse?

Filion : Pas du tout, on est même contre la chasse. Ben, pas complètement. En fait, moi en tout cas je suis contre la cruauté envers les animaux, mais je suis pour les gens en situation de survie qui vont manger ce qu’ils auront tué. Je suis contre les humains qui sont ben gearés avec des guns et tout. Ça, je trouve ça barbare.

Dom Polski: Aussi, sur le sens du nom de La Carabine, on a une admiration pour les self-made men, ceux qui réussissent leur affaire tout seul. C’est sûr et certain que ça peut aller avec la chasse, d’aller chercher ta nourriture toi-même. D’ailleurs, petite anecdote: une fois, on cherchait une carabine à plombs – c’est ben cute une carabine, ça fait pas mal…

: Ça pince. C’est comme notre musique, ça pince !

DP : On est allé dans un magasin de chasse pour demander une carabine en expliquant un peu notre concept, et le vendeur nous avait posé la même question. « Hey, vous êtes des chasseurs ! » Mais, on lui a répondu que non et il semblait très déçu…

Quels sont les démons que vous avez eu à chasser pour la création de l’album?

DP : On a une chanson qui s’appelle Adulte et je trouve que la transition vers le monde adulte, c’est difficile. Comment on évalue qui est un adulte ? Qu’est-ce qui est pas considéré adulte ? Moi avec mes cheveux longs et ma tuque, est-ce que je suis adulte ? Est-ce que le fait que j’aie une hypothèque fait en sorte que je sois adulte? Et le fait que je fasse du rap? Quand on parle de chasser ses démons sur l’album, c’est surtout sur le fait que oui, on a chassé des démons toute notre vie. On est dans le monde rap, mais on est un peu l’anti-thèse de ce milieu-là. On est complètement différents, on fait du son différent, on parle différent, on s’habille différent.

Vous n’êtes justement pas ce qu’on entend traditionnellement comme du rap queb. Comment vous qualifieriez-vous?

816AA966-926F-4F92-802C-F6993D90F1B1: On est rap queb, mais on veut pas sonner comme tout le monde. Si on était arrivé et qu’on avait décidé de faire le même son que Dead Obies ou Loud Lary Ajust, on aurait juste été un groupe de plus, selon moi. Eux font déjà bien que ce qu’ils font, donc pourquoi essayer de faire pareil. C’est pas nécessairement ce qu’on avait envie de faire non plus. On voulait faire un projet assez expérimental, pousser les limites de ce qu’on pouvait faire avec du analogue ou des vieilles machines, des vieux bruits, des snares ou même des claquements de porte pour les mettre dans notre musique. On voulait apporter des affaires weird et qu’on fasse « Esti que c’est pas rap », mais que ça soit exactement ce qu’on voulait. On fera rien de conventionnel. Au fond, c’est vraiment ça, La Carabine. C’est du rap sans prétention, influencé par ce qu’on écoutait quand on était jeune, début 2000. Juste la pochette est pas rap, même notre clip pour Cadenas en U est pas rap, ou encore notre logo qui est une copie du logo de Judas Priest. En fait, c’est une grosse blague!

Dans les sons qui ont été échantillonnés pour l’album, quel son est le plus spécial?

DP : Une pièce de théâtre. C’est juste des gens qui marchent, le bruit de leurs pas qui fait une genre de percussion et après t’entends une madame parler. C’est pris d’une vraie pièce de théâtre. Je travaille avec des tapes, des vrais magnétophones à ruban et j’enregistre des trucs comme ça.

Quels sont vos inspirations pour écrire vos chansons, en d’autres mots, comment en êtes-vous venus à écrire une chanson sur les cadenas en U?

: Y’a un gros meaning sur Cadenas en U !

DP : Cadenas en U, c’est dans le sens de s’accaparer les affaires et de se dire « Ça, c’est à moi. » En vrai, on a pas besoin de barrer les choses. Comme on a pas besoin de mettre une burqa sur une femme pour dire qu’elle est à moi. On a juste à croire que les choses sont à nous, et c’est tout. C’est à moi. On a pas à absolument signer sur tout.

: Aussi, si je peux me permettre, la scène rap au Québec est assez fermée. Les gens se sont accaparés un peu cette scène-là et c’est la leur. J’ai l’impression que leurs portes sont barrées et ne laissent rentrer personne à l’intérieur. C’est correct comme ça, ils sont là depuis longtemps. Pour un groupe comme nous, notre objectif est pas de rentrer nécessairement là-dedans. Dans le rock’n’roll, si tu fais du rock ou du indie rock ou whatever, le monde s’invite plus entre eux.

On retrouve dans vos textes plusieurs images assez comiques. Est-ce que c’est votre volonté d’écrire des textes drôles?

: La vie est assez triste comme ça. Un des moments que les gens ont pour se changer les idées, c’est en écoutant de la musique. La musique est pas faite juste pour quand t’es triste. Si je suis triste, je vais écouter sur Sarah McLachlan, pas un gros rappeur de l’Outaouais qui pleurniche sur sa vie difficile. Nous, ce qu’on veut faire, c’est amener un sourire, divertir les gens. Si un jeune en difficulté scolaire peut écouter notre musique et oublier ses problèmes pour un moment, pour moi, c’est mission accomplie.

DP : On écrit vraiment en image. Le but, c’est que t’écoutes et que tu puisses voir des choses. C’est super important pour nous que le monde puisse se promener dans la musique, qu’il puisse voir de quoi qu’on parle.

Est-ce qu’on retrouve un certain fil conducteur sur l’album?

DP : Ça change pas mal d’un morceau à l’autre. Souvent, l’écriture se fait en exercices de style, comme par exemple sur Cassette. On a essayé d’utiliser le son « as », comme cassonade, le plus souvent possible dans la chanson. Touche du bois, c’est la même chose, où on fait plein de métaphores sur le bois. Il n’y a pas de fil conducteur tout le long. Dans l’atmosphère sonore, oui par contre, ça c’est sûr et certain. Le but, c’était de créer un album comme ce qu’on écoutait quand on était jeune, en skate avec nos headphones. Et je trouve que l’album sonne comme ça. On y a mis tous les effectifs: on a travaillé avec Simon Gauthier qui travaille en analogue. Tout sonne comme je souhaiterais que ça sonne.

Finalement, à quoi ressemble un show live de La Carabine, question de se préparer au show du 2 février au Théâtre Ste-Catherine?

DP : Un dj, un drummer et nous qui se garoche partout.

: Énergie, énergie, énergie. On est pas juste debout sur scène à essayer de montrer qu’on est cool. On veut créer une expérience pour les gens qui viennent nous voir. Les gens embarquent et, à certains moments, trashent.

DP : C’est complètement une écoute différente. Les drums sur l’album sont super minimalistes et les percussions sont beaucoup plus échantillonnées à droite et à gauche. Donc en show, avec le drummer qui y va sans se gêner, c’est complètement un autre son.

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