Critique | Todo el cielo sobre la tierra au FTA

Dans le cadre du Festival TransAmériques, la tant attendue Angélica Liddell livrait une performance essoufflante, une œuvre expérimentale et anxiogène flirtant avec l’univers fantomatique de William Wordsworth, les 27 et 28 mai derniers au Monument National.

Le personnage principal, Wendy, est une femme-enfant à la personnalité et la sexualité troubles, qui alterne sans transition entre crises enfantines, auto-analyses et réflexions enragées contre une société qui accorde plus de valeur aux mères qu’aux autres seulement parce qu’elle sont mères.

Liddell donne à sa Wendy de Todo el cielo une énergie sèche et explosive, puisant jusque dans le clownesque pour rendre la folie, la paranoïa de son personnage.

Photo de courtoisie, par Ricardo Carrillon de Albornoz.

Photo de courtoisie, par Ricardo Carrillon de Albornoz.

 

Mise en scène allégée, texte chargé

Malgré la physicalité criante du jeu de Liddell, il ne s’agit pas tellement d’un spectacle pour les yeux que d’un texte dit et crié, quoique parfois dansé.

La pluralité des langues employées sur scène – Espagnol, Mandarin, Norvégien – fait qu’on a le regard rivé aux surtitres la majorité du temps et lorsqu’on a un répit pour le porter à la scène, on n’y trouve souvent que peu de mouvement. Ainsi, le trilinguisme de Tout le ciel au-dessus de la terre (le syndrôme de Wendy) eut put être un obstacle à la compréhension et à l’appréciation du spectacle, mais son intérêt étant principalement textuel, les surtitres suffisent.

Par contre, il y a la pertinence des personnages secondaires qui est questionnable : la pièce prend plus de sens (et d’intérêt) lors des monologues et crises de Wendy. Le reste semble accessoire et parfois même bâclé. Était-ce là l’intention artistique : de rendre ce qui est extérieur à Wendy absurde et superflu? C’est un des nombreux aspects du spectacle qui laisse place à l’interprétation.

Le décor est composé d’un tas de terre représentant  l’île norvégienne d’Utoya, théâtre en 2011 d’une tragédie meurtrière (pourquoi d’ailleurs cette tragédie en particulier ?) qui est malheureusement très peu exploité, et de chaises et d’étoffes éparpillés comme s’il y avait eu une tempête. La scène est donc assez vide, mis à part lorsqu’il y a l’orchestre – dont les valses par ailleurs impeccables accordent un répit agréable aux spectateurs, qui peuvent aisément se perdre lors des nombreuses longueurs.

On repart avec The House of the Rising Sun en tête, la seule pièce musicale jouée hors des scènes d’orchestre présentées en rafale. Cette référence voilée aux maisons closes et/ou à une prison pour femmes de la Nouvelle-Orléans appelle à des conditions féminines marginales et sombres, telles celle de la désespérée et révoltée Wendy.

Si le bris de tabous et le symbolisme inhérents à cette pièce en font une œuvre intéressante, qui porte à la réflexion, il aurait été néanmoins approprié de prendre en considération le spectateur – quoique cela puisse faire partie de la démarche de Liddell. La version imprimée de Todo el cielo  – voire une adaptation cinématographique, qui permettrait l’ajout de plans rapprochés – serait plus pertinente à consulter.

Photo de courtoisie, par Ricardo Carrillo de Albornoz.

Photo de courtoisie, par Ricardo Carrillo de Albornoz.

 

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