crédit photo: Gabriel Fournier
Orchestre Symphonique de Montréal

Concert de clôture de l’OSM à la Maison symphonique | Grandiose

En guise de clôture de la 89e saison de l’Orchestre symphonique de Montréal, la formation classique de renommée internationale a interprété, sans entracte, la Troisième Symphonie de Gustav Mahler ce mercredi 31 mai, accompagnée par le Chœur de l’OSM, le chœur des Petits Chanteurs du Mont-Royal et la mezzo-soprano Michelle DeYoung. Une soirée aux allures d’apothéose, illustrant l’entièreté des efforts des musiciens et du récent chef de l’ensemble, Rafael Payare, posés durant l’année.

Alors qu’un écran projette des images de l’OSM, ainsi que de celui qui a été désigné pour le diriger pour sa première saison en septembre dernier, Rafael Payare, une voix annonce les partenaires et suggère au public de rester silencieux, puisque le concert sera enregistré par caméra.

Il est également indiqué que l’Espace OSM sera ouvert à tous après la représentation, une occasion en or pour les mélomanes et les musiciens de se retrouver autour d’un bon verre.

Une animatrice présente quelques informations supplémentaires au public, partageant entre autres que le concert sera dédié à Barbara Bronfman, mécène de l’OSM décédée en 2021, et que la prochaine Virée Classique de l’OSM se tiendra du 16 au 20 août prochains.

Au menu du jour : la Troisième Symphonie du compositeur autrichien Gustav Mahler, composée durant les mois d’été 1895 et 1896.

S’étalant sur une durée de 100 minutes, exceptionnellement long pour une symphonie, la majorité de ces types de composition tournant autour de 40 minutes, la création du génie autrichien exprime le désir de représenter la relation entre l’Homme et la nature au travers de six mouvements.

Si une symphonie acclamée de Mahler termine la saison de l’OSM, une autre du même homme la débutait en septembre dernier, avec l’interprétation de sa Deuxième Symphonie, dite « Résurrection ».

 

Absolue

Andrew Wan, violon solo de l’OSM, entre sous les applaudissements, suivi de Payare, encore sous les applaudissements du public.

Huit cors débutent la symphonie sur l’ouverture cuivrée de Kräftig. Entschieden, d’un son plein, uni, comme si la section ne faisait qu’un.

Ce thème magnifique et caractéristique à l’œuvre en mineur se fait rapidement entendre, finement repris plus tard par un trombone de l’ensemble en solo, alors que l’Orchestre alterne entre les airs dramatiques et ces marches en majeur, variant les ambiances à merveille dans l’interprétation.

Cette puissance, seule une formation à grand déploiement de musiciens talentueux saurait l’offrir : on distingue des sections anormalement nombreuses, également deux sets de timbales!

Une grande maîtrise de tous semble se détacher; il demeure même possible de discerner les notes de mélodies techniques de cette dizaine de contrebassistes à l’unisson (l’acoustique de la salle aidant sûrement).

Le premier mouvement à lui seul pourrait constituer une symphonie, mais, évidemment, il y a plus.

Débutant par un solo de hautbois, s’ensuit le Tempo di Minuetto. Sehr mässig, au caractère intimiste et léger, en contraste total avec la force du premier mouvement; les bois et les cordes sont pleinement mis de l’avant, l’unique mouvement pouvant le permettre à ce point.

Le troisième mouvement, Comodo. Scherzando. Ohne Hast, amène quant à lui des sonorités davantage classiques, certaines séquences pouvant laisser croire qu’elles ont été écrites 100 ans auparavant : le clou du segment, évidemment le solo, durant l’interlude, d’un cuivre placé hors-scène, aux allures d’un lointain souvenir tant la disposition apporte une couleur originale.

 

Quand le chant se marie aux instruments

Sehr langsam. Misterioso est directement enchaîné, révélant encore une autre facette de l’œuvre de Gustav Malher. La soliste mezzo-soprano Michelle DeYoung se lève de sa chaise pour chanter, dans une performance exemplaire, le texte de Ainsi parlait Zarathoustra, du philosophe allemand Friedrich Nietzsche : sous des sonorités obscures, les vers sont entendus dans une Maison symphonique attentive, mais surtout, lus par cette dernière.

Les paroles sont projetées en temps réel en dessous du Grand Orgue Pierre-Béique, en français et en anglais, belle touche de l’OSM pour faciliter la compréhension du propos, originale, aussi.

Le poème se révèle à la fois dramatique et optimiste, sous-entendant qu’à travers la plus grande souffrance se cache toujours cette éternelle joie humaine : « Volupté, plus profonde que la peine du cœur. »

Le court cinquième mouvement, Lustig im Tempo und keck im Ausdruck, ajoute des dizaines de voix du Chœur de l’OSM et du chœur des Petits Chanteurs du Mont-Royal (malheureusement pas le plus audible, bien que l’on sache que le coffre des jeunes ne s’avère pas des plus puissants, leur disposition éloignée dans la salle ne contribuant pas à la cause), sous le son des cloches, alors que le Langsam. Ruhevoll. Empfunden, véritable hymne à l’amour, conclut cette soirée magistrale.

Le mouvement est solennel, envoûtant, émotionnel, avant que l’orchestre complet exploite son plein potentiel sous des trémolos de cordes, de longues notes de cuivres et des sonorités soutenues de timbales en finale de la symphonie.

Durant l’entièreté de l’œuvre, Payare montre le visage d’un chef talentueux, charismatique et passionné, dansant en dirigeant, qui arrive à brillamment succéder à Kent Nagano.

Le diplômé d’El Sistema parvient à venir chercher le meilleur de ce que chaque musicien a à offrir à l’ensemble, ce que l’on demande essentiellement d’un chef d’orchestre.

L’ovation dure plusieurs minutes, chaque section et soliste a droit à son petit moment de gloire.

Loin de certaines symphonies (trop?) conventionnelles, par exemple, certaines de W.A. Mozart, la Troisième de Mahler s’avère une œuvre grandiose et surtout, profondément audacieuse dans sa forme.

Après cette clôture de la 89e saison, un constat s’impose : l’OSM apparaît comme la référence absolue en matière de musique classique à Montréal, et l’une des formations classiques les plus en vue au pays. À donner hâte à n’importe quel mélomane de découvrir le contenu de la 90e, c’est certain.

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