Bluesfest d’Ottawa 2013 – Jour 10 | B.B. King, Alice In Chains, Skrillex & Boys Noize et plus

Le début de phrase le plus souvent entendu par des artistes sur scène au cours de cette édition 2013 du Bluesfest d’Ottawa est sans doute : « Je ne sais pas trop pourquoi on appelle ce festival le ‘Bluesfest’, mais… « . Il est bien vrai que du indie rock au métal, en passant par l’électro et la pop bonbon, on nous bombardait de toutes les saveurs… et très peu souvent de blues. Mais en ce dernier soir de festival, le bluesman des bluesmen, B.B. King, est venu rétablir les faits avec son (probablement) dernier tour de piste. 

« My name is B.B. King, I’m 87 years old and I’m happy to see you all! ».

Bon sang qu’ils étaient nombreux à l’acclamer et bon sang que l’ovation était bruyante, les spectateurs étant visiblement aussi heureux de le voir que lui l’était de se trouver sur scène à Ottawa.

Achalandage

Un aperçu de l’achalandage durant le concert de B.B. King.

Jamais le site des Plaines LeBreton n’a paru aussi congestionné que dimanche soir. Très curieuse idée, d’ailleurs, d’octroyer à B.B. King la scène secondaire au lieu de la scène principale. La circulation sur le site devenait carrément impossible pendant une heure et demie.

Ils étaient donc des dizaines de milliers à venir contempler la légende en chair et en os, pendant qu’il est encore temps.

Pour la rencontre, ça ne pouvait qu’être spécial. En ce qui a trait au concert en soi, on repassera…

Le roi du blues a d’abord mis une vingtaine de minutes à se pointer sur scène. Ses musiciens, aussi talentueux soient-ils, ont mis la table pendant beaucoup trop longtemps avec un jam blues convenu, qui aurait dû durer 2 minutes en réalité. Puis, il est apparu, sous une ovation digne de Nelson Mandela à l’ONU. Son entourage l’a accompagné jusqu’à son trône – une chaise bien normale – au beau milieu de la scène.

Il enfile sa fidèle « Lucille » et se lance dans un premier solo… Ouille, ça craint.  La mollesse dans l’interprétation est presque caricaturale.

L’ennui – et très peu de gens oseront l’admettre – c’est que le roi est en fin règne et c’est tout à fait compréhensible. À 87 ans, on ne s’attend pas à ce qu’il soit une bête de scène apte à tenir 75 minutes de solos endiablés. Ses doigts ne peuvent tout simplement plus suivre la cadence, et personne ne lui en tiendra rigueur.

Mais doit-on vraiment exposer sa majesté à ce genre d’exhibition ?  La réponse (malheureusement) est oui. Parce que les fans font preuve d’une indulgence qui dépasse l’entendement, et le roi a toujours envie de rencontrer ses loyaux sujets. Jusqu’à sa mort, sans doute.

Et il est très communicatif, le vieux routier. Il jase beaucoup plus qu’il ne joue, multipliant les compliments, les déclarations d’amour à Ottawa-la-jolie (qui le lui rend bien), les remarques aléatoires comme « shake your booty! » ou « I like your hat » à la première rangée et… les jokes flirt envers de jeunes dames.

Côté musique, on a pu entendre Rock Me Baby, Guess Who?, Everyday I Have the Blues, The Thrill Is Gone et Nightlife/please Send Me Someone To Love. Lorsque B.B. King chante, on ressent toute la profondeur d’une voix qui a fait du chemin, parcouru des milliers de kilomètres sur la route sinueuse d’une vie frappée par la misère.

Mais autant B.B. King a encore toute la présence d’esprit pour communiquer avec son public, autant son jeu de guitare, lui, est rendu sénile. Son groupe fait tout ce qu’il peut pour compenser, et compenser, et compenser.

« À ce point-ci, tu ne viens plus entendre B.B. King. Tu paies pour le voir », soulignait justement un spectateur à sa compagne stupéfaite du ratio musique/bla-bla de l’artiste. L’amour (envers les légendes) rend aveugle. Et sourd, apparemment.

« Si vous me ramenez, je reviendrai avec grand plaisir », a-t-il laissé entendre en guise d’invitation à ce qu’on l’invite à nouveau, avant de refuser de terminer son show à l’heure convenue. « Ou je peux vous emmenez avec moi au Mississipi », rajouta-t-il, enjôleur. La réaction de la foule ne laissant aucun doute : il a beau être l’ombre de lui-même en tant que musicien, sa royauté lui survivra dans le coeur des fans de blues, inconditionnels comme occasionnels.

Vive le roi.

 

Dog Blood, Alice In Chains et autres

Tout de suite après la prestation de B.B. King, on retrouvait Dog Blood, un duo aussi peu blues qu’il est possible de l’être.

Photo de courtoisie.

Dog Blood. Photo de courtoisie.

Quel étrange contraste, ça en était presque hostile. Alors que les spectateurs plus âgés quittaient les lieux en pliant leurs chaises, une horde de nymphettes surexcitées envahissaient le territoire.

Du haut de leur poste de commandement, Skrillex et Boys Noize déversaient leur EDM boosté au Red Bull, comme une armée nucléaire qui tentait de repousser l’ennemi – l’adulte moyen, appréciant un brin de mélodie dans sa musique – derrière les lignes de combat (la sortie du site).

Mission réussie : l’alliance américano-allemande a remporté haut la main la bataille des Plaines LeBreton, version 2013.  L’ennemi a retraité et la nation « déficit d’attention » pouvait célébrer la victoire sur le vaste terrain trois fois moins occupé qu’une demi-heure auparavant.

Plus tôt en soirée, c’est le groupe phare du grunge-métal Alice In Chains qui livrait un combat… contre la chaleur accablante. Les boyaux d’arrosage se faisaient aller, aspergeant la foule qui séchait au soleil, pendant que Jerry Cantrell et son nouveau Layne-Staley, l’excellent William DuVall, menaient de front une bande étonnante par sa pertinence post-Staley.

Photo par GjM Photography.

William DuVall de Alice In Chains. Photo par GjM Photography.

Si le choix de DuVall comme nouveau chanteur d’Alice In Chains s’est avéré judicieux sur les albums Black Gives Way To Blue (2009) et The Devil Put Dinosaurs Here (2013), il en est de même en spectacle.

Sa prestance sur scène et son remarquable chant tiennent bien la route lors de l’interprétation de vieux classiques comme Would?, Man In The Box, Down In A Hole, No Excuses et Rooster.  Même que DuVall apporte une nouvelle énergie qui s’agence aussi bien à l’approche de Jerry Cantrell que Staley savait le faire.

Plus tard en soirée, Serena Ryder a démontré qu’elle avait l’étoffe pour tenir son bout sur une grande scène avec une prestation convaincante. Elle a le vent dans les voiles, celle-là, et rien ne semble laisser croire que ça pourrait s’estomper de sitôt.

Ensuite, le groupe vancouvérois Yukon Blonde a démontré son savoir-faire en matière d’indie rock entraînant sur la grande scène. La formation canadienne est toujours un choix judicieux sur une programmation de festival.

 

Photos en vrac
par Greg Matthews

Serena Ryder

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Alice In Chains

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Yukon Blonde

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