St Germain

St Germain au Métropolis | Jazz à l’année

Ce mercredi 6 avril, une neige imprévisible et téméraire vient nous surprendre en fin de journée à Montréal. Alors on se demande déjà, sur le chemin du Métropolis, ce qu’on aurait pu souhaiter de mieux que le jazz envoûtant aux accents blues de St Germain pour nous envelopper et nous réchauffer, à défaut de voir le printemps s’installer…

 

À 19h50, on pénètre dans une salle encore peu peuplée, où le DJ Fred Everything commence à mettre l’ambiance à travers une musique électro-dansante, sous des projecteurs rougeoyants comme un soleil incandescent.

En attendant que St Germain ne vienne s’approprier la scène, on s’amuse à détailler les tenues des spectateurs qui arrivent au fur et à mesure, en remarquant l’effort tant du côté masculin que celui féminin pour soigner l’élégance de leurs tenues.

Improvisations et chants africains

Une heure plus tard, sous une lumière bleue turquoise, et alors qu’on deviendrait impatient, un premier instrumentiste arrive et joue avec une drôle de guitare. Il est vêtu d’une longue tenue africaine blanche et d’un chapeau. Puis, les sept autres musiciens du groupe le rejoignent sur scène.

Ils commencent avec un air aérien, aux sonorités des musiques du monde. Tous, ils font durer le plaisir et étirent leur improvisation, où des parties vocales africaines s’entremêlent, puissantes, comme un appel.

On a à peine le temps de remarquer que la salle est maintenant pleine à craquer, que le second titre s’enchaîne. Un synthétiseur tient une même petite note dans l’aigu, tandis que le percussionniste joue un rythme africain. Le public embarque et s’occupe de la partie « claps » en tapant dans les mains. On note aussi que c’est un des premiers concerts à dominante acoustique où les voix ont été enregistrées au préalable et passent en programmation. Doucement, les musiciens s’animent et commencent à danser. La rythmique devient endiablée, et tous les musiciens dansent de gauche à droite, excepté St Germain, qui est bien occupé et concentré à gérer ses programmations.

Par moments, un côté espiègle est véhiculé. D’ailleurs, le bassiste et le guitariste se provoquent en duel, face à face, et se poussent du regard pour reculer puis avancer comme le chat et la souris. L’ambiance est survoltée.

Ensuite, toute une nuance de jaunes est diffusée sur scène, pour un morceau sonnant davantage « jazz » et moins « africain » que les précédents, en tous cas au début. Le tempo reste cependant rapide et le rythme soutenu, les instruments improvisent tour à tour. Les musiciens prennent plaisir à diriger le public vers une émotion particulière, électrisée.

Le titre suivant s’installe avec une longue introduction batterie et piano, ce dernier faisant des petites envolées lyriques aiguës, limpides et aériennes. Puis, le reste des musiciens s’intègre au duo. C’est un morceau un peu plus relaxant, toujours rythmé mais moins rapide et « déchaîné ». Le saxophoniste a pris la flûte et se livre à une improvisation pendant que les autres musiciens tapent dans les mains. On entend des sifflements dans le public, qui semble conquis.

L’interprétation que St Germain nous offre sonne maintenant blues. Un saxophone noyé dans la réverbération crée un moment évocateur, une sorte de rêverie, de chimères. Plus le concert avance, plus on remarque que la scène est le terrain de jeu de St Germain et ses musiciens, comme une cour de récréation où ils se défoulent dans un chaos apparent, pourtant très organisé musicalement.

Un public animé et participatif

Le premier solo de percussion – aux congas – fait son petit effet. D’ailleurs, il est drôle de voir les spectateurs danser et bouger de plus en plus vivement, à mesure que les titres s’enchaînent. Un peu plus tard, un autre solo aux congas nous est présenté, plus long, et dans lequel on distingue plusieurs nuances de type rallentando et accelerando, sur un rythme indéniablement afro-cubain.

Quand le percussionniste remercie le public au nom du groupe et nous présente l’équipe, on retient la pluralité des origines des musiciens présents ce soir, par exemple : la Martinique, le Sénégal, la Guyane française, la Guadeloupe, le Brésil… Un tonnerre d’applaudissements se fait entendre pour Ludovic Navarre alias St Germain, puis le groupe reprend avec un morceau où la guitare détient la pleine-parole, et s’exprime de façon de plus en plus virtuose. Le percussionniste vient au centre avec ses instruments et marque le rythme entre la guitare et le saxophone.

 

St Germain terminera la soirée avec un public animé, exalté par la chaleur, le soleil – on oserait presque dire les vacances et le voyage – que ces musiciens ont partagé.

Un petit bémol reste toutefois à signaler, n’ayant rien à voir avec la qualité du spectacle présentée ce soir, mais plus la direction artistique de l’artiste. Si on connaissait St Germain de longue date, sans nécessairement avoir entendu le dernier album, « être dérouté » aurait été faible pour décrire le virage à 180˚ qu’il a pris. On se serait attendu à quelque chose de beaucoup plus « blues tranquille et relaxant », plutôt que cette explosion d’énergie quasiment sans pause du concert présenté ce soir. On retiendra une chose essentielle de ce spectacle au Métropolis : St Germain est l’équivalent d’un cocktail vitaminé au réveil!

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