Morrissey

Morrissey à Montréal | Les sceptiques ont eu tort

Pas facile d’y croire. Quand nous avions annoncé, à la mi-février, la venue de Morrissey à Montréal pour la première fois en près de 22 ans, la nouvelle avait été accueillie avec… scepticisme. Quand un show de Morrissey est annoncé, il a presque autant de chance d’être annulé que d’avoir lieu. Et pourtant, il était là ce soir, devant nos yeux. Le mythique alt-crooner britannique, ex-chanteur des Smiths. En grande forme. Tout en voix. Se donnant corps et âme pour un public en liesse. Quelle soirée!


L’historique d’absentéisme de Morrissey

Au fond, on ne peut pas trop blâmer ceux qui s’attendaient à une annulation de la part de Morrissey. C’est si fréquent qu’il largue des concerts qu’un site répertorie méticuleusement les annulations depuis 1991, et les chiffres sont assez étonnants. Bon an mal an, Morrissey fait faux bond environ 30% du temps. En 2013, il aurait annulé 78% des concerts pour lesquels des billets avaient été vendus.

Il y a à peine deux semaines, il faisait le coup à Vancouver, Winnipeg et Edmonton. Ces spectacles sont toutefois techniquement remis à l’automne. Mais bon, ça sentait pas bon pour Toronto et Montréal. Mais heureusement, on a tenu le coup. Lui aussi, il a tenu le coup. Et ça a valu le coup.

Sur place, il y avait déjà de l’électricité dans l’air dès notre arrivée. L’ambiance d’un grand rendez-vous attendu depuis trop longtemps, des retrouvailles nostalgiques. Des quarantenaires qui font la file devant le MTELUS, ce n’est pas courant. Une foule bien compacte à 19h45 non plus.

Avant d’entrer dans la salle, on constate d’abord qu’il a tenu parole auprès des groupes de protection des animaux. En annonçant la levée de son boycott canadien de près de 15 ans, Morrissey s’était engagé à faire un don à des organismes dans les villes où il jouerait, en plus d’inviter ces groupes à installer des stands lors de ses concerts. Il y étaient, distribuant des dépliants aux intéressés. La marque Canada Goose n’a pas eu droit à une très bonne publicité ce soir.

 

La première partie du spectacle était assurée par, hum… une sélection de vidéoclips pour le moins hétéroclite. Oui oui, des vidéoclips. Un écran géant qui occupait tout l’espace devant la scène, sur lequel était projetées des vidéos des Ramones, de Patti Smith au Grey Old Whistle Test, d’Edith Piaf et Les Compagnons de la chanson, de Bruce Lenny, de Jobriath, un musicien glam américain des années 1970 mort du SIDA au début des années 1980. Morrissey va d’ailleurs interpréter plus tard une de ses chanson, Morning Starship.

Après 35 minutes à regarder des vidéos, l’immense drapé tombe, et Morrissey arrive sur scène, acclamé tel un Messie. Il est accompagné de cinq musiciens pour le moins anonymes, tous vêtus d’un chandail promotionnel de la tournée de Morrissey, et laissés hors des projecteurs. On ne nous les présentera jamais. C’est Morrissey qu’on est venu voir, et ces pauvres mecs sont visiblement accessoires.

Ils font toutefois le travail : le son est impeccable, l’interprétation musicale est sans faille. Le vieux classique Suedehead part le bal, suivi de Is It Really So Strange des Smiths, et la foule est gonflée à bloc.

Il en jouera quatre de son ancien groupe, y compris How Soon Is Now?, bien entendu, mais aussi What She Said juste avant le rappel, et Girl Afraid, apparemment pour la première fois en solo (selon Setlist.fm).

Sinon, il pige un peu partout dans son répertoire solo, de la récente World Peace Is None of Your Business à la bonne vieille Everyday Is Like Sunday, en passant par Jack The Ripper et Life Is A Pigsty. Les projections à l’arrière servent parfois le militantisme de l’artiste, comme lors de I’m Throwing My Arms Around Paris où l’on pouvait voir un gilet jaune, ou encore les cruels visuels de taureaux maltraités durant The Bullfighter Dies. Heureusement, dans la chanson, c’est le taureau qui gagne. Sur les images, c’est moins évident… « There was a bull. And there was a pig », dira le chanteur après ce petit numéro troublant. Le message est assez clair.

Mais sinon, les tendances controversées du chanteur prendront bien peu de place, laissant tout l’espace au personnage plus grand que nature, à l’artiste démesuré, à l’icône du rock. Il approche la soixantaine, mais Morrissey a encore beaucoup à offrir, comme en témoigne sa prestation sans anicroche de ce soir. Sa voix est toujours aussi nette, sa présence sur scène inspirée.

Après une bonne centaine de minutes et une vingtaine de chansons, il revient pour entonner First of the Gang to Die en choeur avec le public, et quitte pour de bon, laissant derrière un sentiment de satisfaction et de j’en-aurais-pris-encore. Le parfait équilibre pour un concert réussi.

Grille de chansons

  1. Suedehead
  2. Is It Really So Strange? (The Smiths)
  3. Alma Matters
  4. Hairdresser on Fire
  5. I Wish You Lonely
  6. How Soon Is Now? (The Smiths)
  7. I’m Throwing My Arms Around Paris
  8. Girl Afraid (The Smiths)
  9. World Peace Is None of Your Business
  10. Morning Starship (reprise de Jobriath)
  11. If You Don’t Like Me, Don’t Look at Me
  12. Munich Air Disaster 1958
  13. Back on the Chain Gang (reprise des Pretenders)
  14. The Bullfighter Dies
  15. Life Is a Pigsty
  16. Jack the Ripper
  17. Seasick, Yet Still Docked
  18. Everyday Is Like Sunday
  19. Something Is Squeezing My Skull
  20. What She Said (The Smiths)

Rappel

First of the Gang to Die

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