Gala GAMIQ

Le GAMIQ est-il (encore) en train de l’échapper ? (Ou pourquoi la scène locale est mal servie par son gala)

Le Gala Alternatif de la Musique Indépendante du Québec lançait la semaine dernière son processus de scrutin en vue de son 11e gala annuel, qui aura lieu le 27 novembre 2016 au Bain Mathieu. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on nage en pleine confusion…

« Une première nomination au GAMIQ », affiche fièrement l’artiste Thierry Bruyère sur sa page Facebook. Il en va de même pour Simon Kingsbury, Francis Faubert et probablement plein d’autres artistes qui bûchent fort, mais ne génèrent pas assez d’attention auprès du grand public pour faire pencher les jurys de l’ADISQ en leur faveur. C’est ce pourquoi le GAMIQ existe : mettre en lumière les artistes moins connus mais oh-combien-pertinents, qui remplissent le Divan Orange au lieu du Métropolis, qui récoltent de maigres chèques de Bandcamp au lieu d’une redevance iTunes. Les ventes d’albums et de tickets ne comptent pas ici. Le critère numéro un, c’est la qualité de l’oeuvre et de l’effort, tel que jugé par un jury censé être aux faits de sa scène émergente.

Une nomination au GAMIQ devrait donc être un honneur digne de mention, une tape dans le dos qu’il faut partager fièrement.

Le problème, c’est qu’ils ne sont pas vraiment en nomination. Oups.

Les organisateurs du GAMIQ ont tout simplement décidé de publier la grande liste de tous les inscrits et d’inviter tous ces artistes à inciter leurs proches à « voter » pour eux, sur la plateforme ProjetPapineau.com, laquelle appartient à l’organisateur du GAMIQ, Patrice Caron. C’est le « premier tour », une loooongue liste qui inclut, finalement, tous ceux qui s’y sont inscrits. Et les artistes et les labels s’y pensent « nommés ». Avec raison. Dans un communiqué, les mots utilisés sont « la longue liste des productions en lice ». On parle d’autour de 350 productions. Ça rend les « nominations » un peu moins spéciales, ‘mettons.

 

Le vote du public (qui compte pas vraiment)

Rendu sur la plateforme, le public est invité à voter. Dans le vide, mais bon…

En réalité, le public est invité à écouter tous les artistes en nomination qui se sont inscrits – enfin une bonne idée ! – jusqu’au 28 novembre, et s’ils aiment, ils peuvent manifester leur intérêt. À quoi sert ce « vote public fantôme » ? Ça servira « d’indicateur à l’interne », selon Pat Caron. Indicateur de quoi au juste ?  Mystère.  Mais ça ne compte pas pour le 1er tour.

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Euh… Navet Confit, as-tu bien compris ?

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C’est pas mal ça, ouais.

Aujourd’hui, le GAMIQ corrige le tir par voie de communiqué en annonçant qu’il y aura finalement cette année un Prix du public qui « récompensera les artistes les plus populaires selon le scrutin public en ligne, toutes catégories confondues ». Bonne chance avec ça, public.

Pendant ce temps, les membres du jury de l’industrie – dont nous sommes – reçoivent effectivement un lien vers leur « bulltein de vote » (sic) : un sondage Google qu’on peut remplir ad nauseam, voire même partager à tous nos amis (même si un petit paragraphe inoffensif nous demande de ne pas le faire, svp). Parce que la Google Sheet, vous le devinez, ne contient aucune source d’identification.

Mais pourquoi les membres du jury souhaiteraient-il que tous leurs amis votent à cette étape ?  Notamment parce que parmi les catégories, il y a une section « Carrière », laquelle comprend « Média de l’année », « Festival de l’année » et « Salle de spectacle de l’année ». Et que le jury est « composé majoritairement de journalistes (médias écrits, radios, TV, web), de programmateurs de salles de spectacles et de festivals en provenance de partout au Québec ». Inutile de dire que plusieurs membres du jury aimeraient bien que des centaines de personnes « votent » pour leur site web, festival ou salle.

Une fois le bulletin de vote rempli, aucune idée s’il est bien acheminé, mais le formulaire nous demande de « Partager le lien vers ce formulaire pré-rempli ». Euh. Hein?

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Après onze ans d’expérience, on serait tenté de croire que le GAMIQ apprendrait de ses erreurs, investirait dans un mode de récolte de votes digne de ce millénaire et peaufinerait le processus d’une année à l’autre. Mais ça ne semble pas être le cas. Chaque GAMIQ apporte son lot d’absurdités, de processus tout croche et de confusion…

Pendant longtemps, tout le milieu a fait preuve de clémence envers ces petits pépins techniques récurrents, qui n’enlèvent rien à la bonne volonté du GAMIQ. Mais l’amateurisme de l’organisation est non seulement gênante, mais aussi blessante pour des dizaines et des dizaines d’artistes qui prennent leur musique plus au sérieux que le gala qui est censé les représenter et les féliciter.

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