crédit photo: Morgane Dambacher
IAM X OSM

IAM x OSM à la Maison symphonique | Un amour impossible

Après trois reports en trois ans, IAM x OSM eut enfin la chance de se produire sur les planches de la Maison symphonique ce mardi 3 octobre. Un excellent et mémorable concert de rap? Évidemment, à quoi s’attendre d’autre. Un résultat escompté d’une collaboration entre ces deux institutions? Loin de là.

Dès l’entame de la soirée, il est à se demander si la Maison symphonique connut déjà une ambiance aussi électrique et survoltée dans son histoire. Des membres du public arborent fièrement des maillots de l’Olympique de Marseille, des casquettes d’équipes de la MLB ou simplement leurs plus beaux survêtements de sport. Un auditoire différent à ce que la salle de la Place des Arts accueille régulièrement.

Une voix classique débute pour expliquer les modalités du concert, avant de laisser place à une présentation plus divertissante que d’habitude, ponctuée d’une production rap en arrière-fond.

L’orchestre, dirigé par Dina Gilbert, entame une introduction instrumentale à l’allure impériale, orientale, mystérieuse, plutôt de bon augure pour la suite de la performance, avant de laisser la place aux membres d’IAM.

* Photo par Antoine Saito.

Là se dessine le problème premier de la soirée. La foule se lève à l’instant où elle aperçoit Saïd et Shurik’n, avec une acclamation particulièrement puissante, un vrai triomphe. Après tout, les fans auront attendu longtemps avant ce concert, d’abord programmé en avril 2020.

Seulement, la Maison symphonique ne reçoit d’habitude pas un tel enthousiasme peu contenu, autant de décibels d’un seul coup. L’École du micro d’argent est interprétée en guise de premier morceau, l’orchestre s’efface d’emblée face aux productions et à la fougue de ces quatre rappeurs.

Sans remettre en question le talent d’arrangement de l’orchestrateur Blair Thomson, il est évident qu’en essayant de faire rivaliser une flûte ou un hautbois face à la puissance d’IAM, un gagnant se dessine (et s’entend) en moins de deux. L’équilibre est capital.

 

Atypique

Une partie de la faute de cette union manquée peut également être jetée sur le public. L’enthousiasme d’apprécier ces légendes en direct s’avère logique, même nécessaire, mais des chants de supporters de football lancés plusieurs fois durant la performance n’agrément pas un spectacle, doit-on le rappeler, à la Maison symphonique. Des éclairages évoquant l’ambiance d’un concert davantage populaire sont également à dénoter dans le courant de la soirée, n’existant simplement pas dans la formule de la musique classique.

* Photo par Morgane Dambacher.

Les membres d’IAM quittent à de nombreuses reprises la scène entre deux morceaux, accordant au public des séquences instrumentales fantastiques de la part des musiciens de l’OSM. À peine quelques secondes plus tard, de nouveau enterrés.

Le neuvième morceau interprété, Mon texte, le savon, révèle un caractère plus calme de la part des rappeurs marseillais, permettant enfin d’apprécier l’ajout de l’orchestre, permettant enfin de s’imaginer ce que le mariage entre le rap et le classique aurait pu offrir si cette direction avait été complètement assumée durant le concert en entier.

Aussi excellente et maîtrisée soit-elle, peut-être aurait-il fallu simplement laisser tomber la trame des DJ Kheops et Daz afin de seulement miser sur une instrumentation orchestrale?

Ou peut-être que la collaboration entre IAM et l’OSM cache un amour impossible, le Roméo et Juliette de la musique.

* Photo par Morgane Dambacher.

 

Légendaires

Si la rencontre entre ces deux puissances musicales respectives ne semble pas avoir donné l’issue désirée, la performance des quatre rappeurs marseillais à elle seule eu tout sauf l’effet de décevoir.

Akhenaton, Shurik’n, Kephren, Saïd: rarement le public aura droit dans sa vie d’apprécier des rappeurs d’un tel niveau sur scène. Revisitant principalement les titres de L’École du micro d’argent, probablement le projet le plus influent de l’histoire du rap francophone, IAM enchaîne succès après succès durant la soirée : Nés sous la même étoile, Petit frère, La saga, Elle donne son corps avant son nom. Toujours devant un public récitant religieusement les paroles.

Le groupe interprète vers le milieu du spectacle sa chanson phare de la première heure, l’ironique Je danse le Mia. IAM les dénonciateurs, oui, mais IAM qui sait comment s’amuser également, tandis que les membres du collectif décident de taper leurs meilleurs pas de danse durant le morceau.

* Photo par Morgane Dambacher.

Le collectif voue depuis ses débuts un attachement particulier à la culture populaire, multipliant les références aux samouraïs ou à l’univers de Star Wars dans les textes de ses chansons. Invitant l’auditeur à se tourner vers le penchant sombre de la force, les quatre rappeurs se présentent au public brandissant chacun un sabre laser rouge sur L’Empire du côté obscur.

Une scène profondément amusante quand on se rappelle l’endroit où la performance est donnée.

* Photo par Antoine Saito.

Shurik’n distribue les poignées de mains à la manière du pape, idolâtré, comme le reste des artistes sur scène, par une génération entière d’amateurs de hip-hop

* Photo par Morgane Dambacher.

En guise de clôture, les artistes n’ont d’autre choix que de terminer sur Demain, c’est loin, tous assis sur un banc spécialement posé pour le dernier morceau. Neuf minutes coup de poing, les rappeurs lançant punchline après punchline criantes de vérité et de cette réalité sombre.

Des textes intelligents et aussi profondément authentiques, des flows inventifs, cette rage, ce désir brut de vouloir vraiment dire quelque chose. Du rap, du vrai rap, comme on en fait de moins en moins aujourd’hui dans la francophonie.

Après la tremblement d’IAM, la Bande organisée de JuL, SCH, Naps ou Soso Maness semble avoir pris le relais de la cité phocéenne. Pas vraiment la relève espérée, d’un point de vue personnel. En attendant la prochaine perle de demain. On espère que demain ne sera pas trop loin.

IAM x OSM tiendra encore trois autres représentations à la Maison symphonique, du 4 au 6 octobre.

* Photo par Morgane Dambacher.

 

Photos en vrac

* Photo par Morgane Dambacher.

* Photo par Morgane Dambacher.

* Photo par Morgane Dambacher.

* Photo par Morgane Dambacher.

* Photo par Morgane Dambacher.

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