crédit photo: Marc-André Mongrain
Ibrahim Maalouf

Festival de Jazz de Montréal 2023 | Ibrahim Maalouf lance les festivités extérieures en grand!

Après les prestations remarquables de Natalia Lafourcade et Brad Mehldau en préouverture mercredi, le volet extérieur du Festival International de Jazz de Montréal était lancé en grande pompe jeudi soir, avec un concert des grandes occasions signé Ibrahim Maalouf sur la Place des Festivals.

Sur papier, confier le grand spectacle d’ouverture d’un festival extérieur à un trompettiste jazz peut paraître un peu smooth. Mais c’est mal connaître Ibrahim Maalouf.

Le musicien franco-libanais a de la dégaine hip-hop dans le corps, un souffle jazz et subtilement arabisant dans la trompette et un entourage qui lui permet d’aller dans des zones dansantes ou rock avec du muscle.

Ça donne tout un show, d’autant plus qu’il a un charisme fou. Dès la première pièce, Nomade Slang, le musicien se lance d’un bord à l’autre de la scène et transporte la foule avec son sourire contagieux et son invitation à la danse. On se croirait dans un show pop!

Question d’ajouter à l’empathie locale, il rappelle qu’il y a près de 20 ans, il avait joué au Festival de Jazz de Montréal en compagnie de sa bonne amie Lhasa, et constate avec émotion le chemin parcouru, avant de se lancer dans l’interprétation de Right Time, titre justement passablement rock.

Avec le saxophoniste Mihai Pirvan et le trompettiste Yacha Berdah, on croirait avoir droit à un power trio de cuivres. Les trois comparses sont à l’avant-scène, et Maalouf n’hésite pas à laisser le spotlight à ses collègues.

 

Derrière les trios collègues, on retrouve le reste du band de course. Le guitariste François Delporte se démarque particulièrement sur des pièces comme Money, particulièrement hard rock avec des solos en pleine gueule. Ça déménage!

Ceux qui sont familiers avec son matériel récent savent que des rappeurs viennent souvent faire leur tour sur ses chansons, du moins sur album.

Les raps d’Erick Arc Elliott sur Money et de D Smoke sur The Pope sont bien présents en spectacle, mais en trames enregistrées. Un détail qu’Ibrahim Maalouf défend bien en soulignant que « les rappeurs mettent souvent les instrumentistes dans une boîte, alors moi j’ai fait l’inverse et j’ai mis tous les rappeurs dans une boîte! »

L’époustouflante chanteuse brésilienne Flavia Coehlo, elle, est pour sa part bien présente : magnifiquement vêtue et coiffée, elle vient semer le party sur l’hymne à la fraternité El Mundo, chanson très funky, un peu eighties. Le parterre de la Place des Festivals, rempli à rebord jusqu’au Complexe Desjardins, ne s’est pas fait prier pour danser.

Plus tard, Maalouf conclut sa prestation avec une magnifique interprétation de sa pièce Speechless, qui intègre le fameux tout premier discours du personnage de Charlie Chaplin dans The Dictator (film sorti en pleine Seconde Guerre mondiale, en 1940) : un vibrant appel à l’unité, l’amour, le respect et la démocratie.

Let us fight for a world of reason, a world where science and progress will lead to all men’s happiness. Soldiers! in the name of democracy, let us all unite!

La composition musicale qui l’accompagne épouse parfaitement ce discours marquant dans l’histoire du cinéma, et osons le dire, dans l’Histoire moderne point.

Maalouf et sa troupe n’allaient pas quitter sur un ton aussi dramatique. La fête remonte à la surface avec le dernier morceau, Red and Black Light, où l’artiste invite la foule à chanter avec lui.

Pour un trompettiste jazz, c’est tout un exploit d’aller réussir à chercher la foule avec une telle efficacité. Tout un show pour lancer les festivités!

Razalaz, Hawa B et Kokoroko

Il faut dire que tout était en place pour une soirée réussie : l’ambiance était fébrile et la météo clémente, malgré l’apparente médiocrité de la qualité de l’air (qui a cause des annulations de spectacles extérieurs organisés par la Ville à quelques endroits à Montréal).

Vers 18h, la foule affluait déjà sur le site, ce qui a permis à l’excellent projet Razalaz de se faire valoir devant une belle foule fournie.

Quelques mois après avoir lancé l’album Jungle givrée à 12 musiciens sur scène au Ministère, Olivier Salazar (son nom à l’envers donne le nom du projet) disposait cette fois-ci de 6 collègues musiciens (deux cuivres, batterie, basse, guitare et claviers) pour défendre les excellentes compositions qui pigent autant dans le jazz et le funk que dans les saveurs latines.

Sympathique jeune homme, Salazar s’amuse à raconter des histoires entre les pièces pour mettre l’ambiance et nous laisser imaginer les contextes qui ont mené à la création de morceaux comme l’endiablée Nacho Tortuga ou encore la brumeuse Déjeuner nocturne.

La formation donnera deux spectacles le mercredi 5 juillet prochain au Dièse onze.

Un petit détour s’imposait ensuite pour enfin voir sur scène quelques chansons de Nadia Hawa Baldé, alias Hawa B, une prometteuse artiste soul-jazz montréalaise à tendance R&B.

Magnétique sur scène, elle chante avec assurance ses compositions tantôt en français, tantôt en anglais.

Si aux premiers abords, ses chansons paraissaient denses et touffues, une apparition de Greg Beaudin sur une chanson rap-rock en français nous dévoilait un autre côté plus transparent et sympathique de sa personnalité musicale. Une artiste à suivre, assurément.

Vers 20h, le site du festival était désormais envahi par des milliers et des milliers de spectateurs, et c’était déjà la congestion sur Sainte-Catherine, là où la troupe afrobeat londonienne Kokoroko donnait son tout premier spectacle au Québec.

Sheila Maurice-Grey mène de front cet adorable projet qui fait le pont entre le jazz et l’afrobeat de brillante manière.

On s’attendait peut-être à une prestation un peu plus endiablée de leur part, mais leur petit côté sompteux et décontracté a fait bonne figure.

Pour le reste, il faisait bon circuler sur le site achalandé du festival, pour admirer la foule éclectique et les enfants jouer dans les nombreuses attractions ludiques, qui célèbrent la musique sous toutes ses facettes.

Le FIJM se poursuit ce soir (vendredi) avec Cimafunk sur la Place des Festivals, ainsi que Tina Leon, Valaire, Hailu Mergia et Alias en extérieur, ainsi que les spectacles en salles d’Avishai Cohen, Buddy Guy, Mark Guiliana et Snarky Puppy.

Photos en vrac

Grille de chansons (Ibrahim Maalouf)

  1. Nomade Slang
  2. Right Time
  3. Todo Colores
  4. True Sorry
  5. Money
  6. Feeling Good
  7. El Mundo (avec Flavia Coelho)
  8. Capacity to Love + The Pope
  9. Speechless
  10. Red and Black Light

    Musiciens :

  • François Delporte (guitare)
  • Pierre Gibbe (basse)
  • Mihai Pirvan (saxophone)
  • Yacha Berdah (trompette)
  • Frank Woest (claviers)
  • Hugo Crost (batterie)
  • Nutone (direction musicale et percussions)

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