Chapelier Fou

Critique concert: Chapelier Fou à Montréal pour le Festival de Jazz

Lundi 2 juillet 2012 – Théâtre de Quat’Sous (Festival de Jazz de Montréal)

Louis Warynski, dit Chapelier Fou, s’installait au Théâtre de Quat’sous pour 2 soirs à l’occasion du Festival de jazz de Montréal: hier et ce soir. Son intrigant amalgame de sonorités organiques sur rythmes électro froids prenait tout son sens avec le grand gamin français dressé devant nous, bien à l’aise dans un environnement sonore parfaitement contrôlé.

Chapelier Fou. Photo par Jean-François Leblanc

À l’écoute de son plus récent album, Invisible, on croirait presque entendre Amon Tobin remixer des morceaux de Yann Tiersen.  Le violon élégant et fougueux de Warynski s’emporte et se multiplie sur une trame rythmique composée de petits bruits disparates. Les compositions se développent lentement, occupent progressivement de l’espace. Il s’en dégage à la fois un plaisir cérébral contagieux et une sensibilité à fleur de peau, une vaste palette d’effets, de l’étrange au féerique.

Le fait de voir Chapelier Fou à l’oeuvre devant nous, seul avec ses machines et deux instruments, ajoute une touche intéressante.

D’abord, on saisit mieux l’approche de l’artiste, la construction de son univers musical envoûtant. Le grand Messin – tout comme Cascadeur qui le précédait la semaine dernière dans cette même salle – active ses trames préenregistrées, manipule certains sons, modifie légèrement les percussions électroniques, rajoute à l’occasion une pincée de synthé puis empoigne le violon (ou, à l’occasion, la guitare électrique) pour coucher une ligne mélodique qu’il fait passer par une pédale de répétitions en boucle. Et puis une autre, et puis une autre, s’harmonisant ainsi jusqu’à ce qu’on ne puisse plus distinguer laquelle est jouée au présent.

Chapelier Fou. Photo par Jean-François Leblanc.

Musicien formé jeune au Conservatoire et titulaire d’une maîtrise en musicologie, Louis Warynski sait très bien ce qu’il fait derrière son air de garçon timide et insouciant. Sa maîtrise du violon est phénoménale, même si Chapelier Fou ne se la joue pas virtuose pour deux sous.

Il est beau à voir jouer, d’ailleurs. Transporté par ses propres mélodies, on dirait que le contact de sa joue au bois du violon déclenche chez lui une sorte de transe. Peut-être est-il transporté dans le même univers que le personnage d’Alice au Pays des Merveilles à qui il doit son nom…

Heureusement, il s’y perd mais il ne s’égare pas. il demeure bien en contrôle de son petit monde musical. Chaque son est minitieusement calibré pour s’agencer à l’ensemble chargé, dense, si bien que le tout paraît presque ludique.  On ignore si Chapelier Fou disposait d’un agencement de haut-parleurs particulier, mais une attention particulière était portée à la disposition des sons dans l’espace: certains éléments du rythme semblaient provenir de l’arrière de la scène alors que la mélodie se déposait à l’avant-plan. Idem pour l’effet stéréo, subtilement omniprésent.

C’était bien misé de la part du Festival de Jazz de proposer à Chapelier Fou d’installer ses pénates au Théâtre de Quat’Sous. La petite salle intime, fraîchement renovée, faisait honneur à la qualité sonore concoctée par l’artiste. Un beau moment musical à vivre.

 

François & The Atlas Mountains

François & The Atlas Mountain. Photo par Frédérique Ménard-Aubin

Après son rappel, Chapelier Fou a gentiment incité le gens à se rendre au Quartier des Spectacles pour aller voir ses bons amis de François & The Atlas Mountains sur la Scène Bell.

Influençables que nous sommes, nous avons obtempéré. Bon, ok, leur performance acoustique exclusive de Slow Love, captée dans l’après-midi en plein coeur du Quartier des Spectacles, nous avait déjà titillés. Sans compter que leur album E Volo Love (paru en 2012) nous avait charmé par l’audace avec laquelle il incorpore des teintes multiculturelles à une pop mélodique, flirtant avec le new wave.

Le groupe n’a pas déçu, bien au contraire: les particularités de son approche semblaient magnifiées. La voix de François Marry, bien que chambranlante et imparfaite, véhiculait de l’émotion pure, rehaussée par l’ensemble polyphonique.  L’abandon de soi des musiciens donnaient du souffle à l’esprit jubilatoire et parfois même tribal des compositions de François & The Atlas Mountains.

Quelle belle façon de conclure un lundi soir!  Merci de la suggestion, Chapelier Fou!

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