crédit photo: Nadim Zakkour
Men I Trust

Men I Trust au MTelus | Le joyau de l’indie

Le groupe originaire de Québec Men I Trust se produit au MTelus pour deux soirées d’affilée, à guichet fermé. Sors-tu? a assisté à la première représentation. Entre l’univers dream pop envoûtant installé par la formation et la voix superbe de la chanteuse Emmanuelle Proulx, compliqué de ne pas ressortir de la salle absolument conquis.

Men I Trust, l’exemple parfait démontrant que, parfois, la décision de l’indépendance paie, démontrant qu’il est possible de se faire connaître sans passer par les voies traditionnelles. S’occupant presque seuls de tout ce qui a trait au groupe, les membres de Men I Trust sont peu à peu parvenus à se forger une place de choix sur la scène indie du Québec, mais surtout d’ailleurs. Seulement trois dates dans la Belle Province, avant de s’envoler vers d’autres contrées.

 

Sur un nuage

Après avoir accueilli une soirée hard rock mardi (Royal Blood), puis rap le lendemain (Lil Yachty), le MTelus prend une tournure beaucoup plus apaisée ce jeudi avec l’arrivée du trio québécois sur les planches. Un trio? Jessy Caron et Dragos Chiriac se trouvent sur le côté gauche de la scène, Bernache menant au milieu tandis que deux autres musiciens accompagnent Men I Trust à droite de la chanteuse.

Gagnant la scène sous une intro plus alternative qu’indie, la formation débute la soirée avec l’un de ses plus gros succès, l’excellent Tailwhip. Pas le seul morceau d’Oncle Jazz interprété, on entendra notamment dans le courant de la performance Days Go By, I Hope to Be Around, mais surtout un magnifique medley de titres du projet combinés à des simples et autres.

« Vous écoutez Oncle Jazz », énonce la chanteuse et guitariste de Men I Trust dans un penchant français de l’ouverture de l’album homonyme, avant d’enchaîner sur des chansons comme Numb ou Hard to Let Go.

En fermant les yeux, en se concentrant seulement sur la musique et sur la voix angélique de Bernache, on ressent cette impression particulière, celle de flotter dans les airs, de se faire doucement accompagner dans cet univers si doux.

Le genre de Men I Trust semble difficile à proprement qualifier : de la dream pop, de l’électro à tendance indie saupoudré de jazz et d’une pincée d’alternatif. Le son Men I Trust, il appartient à Men I Trust et bien à eux seulement. Une preuve assez concrète du propos : la formation interprète vers le milieu de la soirée un inédit.

« On a une nouvelle chanson, elle a pas de titre mais on va vous la faire ce soir », explique Emma Proulx. Les cinq musiciens enchaînent avec le morceau mystère, ce dernier se fondant parfaitement dans le reste du répertoire, au point où, sans la précieuse information, les amoureux les plus fous du groupe auraient pu croire qu’ils avaient honteusement omis d’apprendre un passage des quatre parutions de Men I Trust.

« En tout cas, j’espère que vous l’avez trouvé cool parce qu’elle est pas mal finie! », lance la meneuse de Men I Trust.

Si on ne s’affirme pas fanatique du groupe, le concert peut s’avérer peut-être un peu plat, l’ambiance installée ne collant pas au caractère d’un établissement comme le MTelus, recevant d’habituel des performances plus agitées. Mais dans le cas contraire, quel trésor, quelle soirée magique pour chaque personne présente se reconnaissant dans l’univers du trio.

 

Faire tomber les barrières

En parlant de se reconnaître, une intervention d’Emmanuelle Proulx vers le milieu du concert permet de poser cette touche humaine à l’artiste, le concept de célébrité éloignant souvent la réalité que, bien, ce sont encore des humains comme nous tous.

« Quand je veux parler en français je me gère full mal », plaisante la chanteuse après avoir chanté en anglais, avant d’expliquer qu’apercevoir son visage sur la devanture du MTelus a eu un certain effet, « qu’elle a capoté », de ses mots, alors que l’artiste allait assister autrefois aux performances de ses musiciens préférés dans la mythique salle.

Jouant grandement sur la notion des ombrages, ne laissant apparaître souvent que le contour des musiciens ayant pour effet d’embellir le caractère déjà onirique, il faut saluer la palette des éclairages durant la soirée. L’installation d’une toile blanche en forme de demi-ovale derrière la formation permet de contrer le fond plutôt éloigné de la scène du MTelus, et donc, d’accroître la proximité avec la salle. Et pourtant, on aurait sûrement aimé en voir plus! Durant son passage printanier à la dernière édition du festival Santa Teresa, Men I Trust projetait le nom du groupe ou encore le dessin pouvant être retrouvé sur la jaquette d’Oncle Jazz, un exercice qui aurait probablement pu être répété ce jeudi 28 septembre. Pas un énorme reproche, mais on sent qu’il était possible d’exploiter davantage la bonne idée.

Clôturant entre autres sur le magnifique Show Me How, Say Can You Hear ou Billie Toppy, le passage de Men I Trust semble avoir conquis les esprits tant les acclamations fusent de part et d’autre. Réellement le joyau de l’indie, des artistes qui méritent 10, 15 fois plus d’attention qu’ils ne le récoltent déjà. D’un point de vue personnel, le meilleur groupe québécois en activité, seulement derrière Karkwa.

« Merci Montréal », glisse Bernache en quittant la scène, suivi par les autres musiciens.

À voir ce que la formation aura à proposer en 2024, année qui marquera le lancement d’un nouvel album.

 

Savoir respecter l’autre

Twin Shadow, musicien américain, tenait la première partie de la soirée, débutant son passage montréalais vers 20h30. L’artiste explique d’emblée à quel point ouvrir pour Men I Trust représente un honneur à ses yeux, avant d’enchaîner sur des compositions folk et alternatives.

Sans être très marquante ni originale, la musique de Twin Shadow s’avère sympathique, en plus de mentionner qu’il est toujours agréable de constater l’enthousiasme d’un musicien qui a réellement l’air heureux d’être là.

Où est le problème? Sans en faire une généralité, le MTelus pouvant contenir plus de 2000 auditeurs à sa pleine capacité, il est nécessaire de souligner que la quasi-totalité du public aux alentours de votre rédacteur parle constamment durant la performance de l’Américain, enterrant ses compositions déjà peu sonorisées.

Il est évident que certains types d’art ne touchent pas les masses, mais il faut savoir respecter l’autre, respecter l’artiste devant nous.

Quand il vient le temps d’applaudir, par contre, on répond présent par centaines.

Un brin hypocrite.

Men I Trust se produira ce vendredi 29 septembre au MTelus, avant de continuer sa tournée à Toronto et aux États-Unis.

 

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