Orchestre Symphonique de Montréal

L’OSM à l’Esplanade du Parc olympique | Le Vieux Continent au goût des violons

À peine quelques jours après avoir reçu la tornade Fierté x Metallica, l’Esplanade du Parc olympique faisait office du nouveau terrain de jeu de l’Orchestre symphonique de Montréal, seulement le temps d’une soirée, alors que l’ensemble classique lançait ce mercredi 16 août sa 10e édition de la Virée classique.

Ce n’est pas tous les jours que l’on peut apprécier de la musique classique gratuitement.

À l’extérieur.

Et de la musique classique d’une telle qualité.

Un désir de rendre ce style plus accessible de la part de l’OSM semble se dessiner peu à peu depuis quelques années, l’instauration du grand concert au pied du mont Royal de l’Orchestre Métropolitain en 2019 reflétant le propos.

Loin des prix parfois exorbitants de la Maison symphonique et de la rigueur émanant habituellement de ces musiciens, un penchant plus engageant agrémente la programmation de la formation, des activités comme des concerts jeunesse, des contes ou encore du yoga en musique étant offertes dans le courant de la semaine au Quartier des spectacles.

 

Quand le classique prend l’air

Suivant des publicités sur le Parc olympique, l’éducation musicale de la jeunesse et celles d’autres organisations, plusieurs personnes se passent le micro pour offrir de courts discours devant le parterre de la scène, la mairesse de la Ville s’avérant également présente.

Andrew Wan, violon solo, entre sous les applaudissements, suivi du maestro Rafael Payare, qui en est déjà à son troisième concert à l’Esplanade du Parc olympique.

* Photo par Antoine Saito.

L’orchestre débute aussitôt avec l’ouverture de l’opéra Le Barbier de Séville, de Gioachino Rossini, excellente introduction à ce voyage musical en Europe.

Car ce sont bel et bien les voisins outre-Atlantique qui seront mis à l’honneur durant cette ouverture de la Virée classique : des compositeurs italiens, allemands, français, au son de l’Espagne, l’Ukraine, la Russie.

Pour permettre à ces milliers d’auditeurs d’apprécier pleinement le concert, des écrans ainsi que des enceintes sont aménagés partout à travers le parterre de l’endroit.

Nous ne retrouvons évidemment pas l’acoustique splendide d’une salle adaptée telle que la Maison symphonique, mais, à l’exception de quelques problèmes de son anodins vers le début de l’œuvre, la disposition offre une écoute au-delà de la simple acceptabilité.

Après les dernières notes magistrales de l’ouverture du Barbier de Séville, typique au flambant caractère italien, la mezzo-soprano Isabel Leonard foule les planches pour interpréter un autre tableau de l’opéra, Una voce poco fa.

Dotée d’une voix exemplaire, atteignant parfaitement les notes dans l’aigu, la vocaliste montre un penchant très maniéré dans son interprétation, enchaînant les expressions faciales et les différents tons en chantant.

Les paroles sont projetées sur les écrans, en français et en anglais, dépeignant le texte de Cesare Sterbini : une femme qu’on tente de soumettre à tout prix, luttant pour son indépendance.

* Photo par Antoine Saito.

Nous restons en Espagne plus tard dans la soirée, puisqu’une Fantaisie sur Carmen est interprétée par Bomsori Kim, violoniste sud-coréenne.

Les doigts de la musicienne s’emballent, atteignant avec justesse et virtuosité les notes à l’extrémité de son violon, alors que les variations alternent entre des segments techniques et d’autres, plus doux.

Le ton de la soirée s’éclaircit peu à peu encore : des pièces connues, d’autres moins, des segments solos tout comme des séquences orchestrales, des interprétations sobres, extravagantes.

Là se détache le mandat même de la Virée, c’est-à-dire présenter au grand public à quel point la musique classique représente un vaste héritage envers la culture moderne, et à quel point il semble également compliqué de ne pas y trouver son compte.

Pour les amateurs de piano, voici du Chopin et du Liszt; pour ceux préférant une approche plus académique de la musique, voilà Le Clavier bien tempéré, de Jean-Sébastien Bach. Vous préférez les grands orchestres flamboyants? Pas de problème, venez écouter les neuf symphonies de Beethoven.

À se demander s’il est possible de n’absolument rien aimer du classique.

* Photo par Antoine Saito.

 

Une promenade au musée

Après avoir présenté deux scènes hautement populaires de l’opéra original de Georges Bizet, L’amour est un oiseau rebelle et Près des remparts de Séville, l’une des membres de l’OSM et Rafael Payare se permettent un interlude amusant, discutant au micro, dans une conversation presque naturelle, le ressenti du chef d’orchestre envers son nouveau chez-lui, la ville de Montréal.

Ça humanise le personnage, celui dont on voit souvent le dos, mais plus rarement prendre la parole.

À l’image de ce désir de démontrer l’étendue extraordinaire de la musique classique, Rafael Payare et ses musiciens optent pour le chef-d’œuvre absolu de Modeste Moussorgski, l’orchestration de Maurice Ravel des Tableaux d’une exposition, en guise de clôture.

La pièce semble moins accessible que ce qui la précédait, davantage que d’autres compositions russes nichées de Stravinsky ou de Rachmaninov, par exemple, mais les tableaux ont le mérite de diviser.

* Photo par Antoine Saito.

Variée, l’œuvre de Moussorgski permet de faire briller chaque section de l’ensemble (dont le vilain petit canard de l’orchestre, le saxophone, instrument que les compositeurs russes semblent tout particulièrement apprécier : on rappelle le concerto de Glazounov, Roméo et Juliette de Prokofiev, la Valse #2 de Shostakovich), des séquences pastorales, cuivrées, frappantes, pouvant être distinguées à travers la demi-heure de l’interprétation.

Et puis, après le mystérieux et très imagé tableau de la sorcière Baba Yaga, nous entrons enfin dans La Grande Porte de Kiev.

Payare bouge au son de ces notes lentes, soutenues de l’orchestre, tire le meilleur de chacun des musiciens présents.

Quelques secondes s’écoulent, avant que la foule ne se lève d’un pour acclamer l’ensemble.

L’orchestre entame un petit rappel bonbon, La chevauchée des Walkyries, de Richard Wagner, la soirée se terminant pour de bon par la suite.

* Photo par Antoine Saito.

En soi, à l’exception du classique, quelle musique réussit à autant faire l’unanimité chez les différentes générations de mélomanes? Quels autres genres musicaux arrivent à ramener des dizaines de milliers de Montréalais en soirée de semaine, comme l’OSM et l’OM y parviennent si bien depuis quelques années? Quelle autre branche de la musique permet à n’importe quel artiste de n’importe quelle origine de se retrouver et comprendre une partition posée devant lui, le langage musical s’avérant le seul universel?

On le compte probablement sur les doigts d’une main.

Et à la place de compter, utilisez vos doigts à des fins plus efficientes.

Comme pianoter ou apprendre à gratter les cordes d’une guitare.

La Virée classique de l’OSM se poursuit jusqu’au dimanche 20 août.

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