JFK

JFK à l’Opéra de Montréal | Superproduction à l’américaine

L’opéra JFK de David T. Little sur un livret de Royce Vavrek, dont la première mondiale avait eu lieu en 2016 au Texas, a pris ses quartiers à la Salle Wilfrid-Pelletier pour quelques représentations. Retour sur la première d’un spectacle auquel on est peu habitué.


JFK s’appuie sur quelques faits biographiques de l’ancien président des États-Unis mais se permet de broder une histoire complètement inventée sur les six dernières heures de sa vie. Nous sommes donc plongés dans un songe qui fait intervenir différents protagonistes de son entourage, et dont les ficelles sont tirées par les Trois Destins. La rêverie oscille entre le cauchemar et le merveilleux tandis que le traitement du sujet peut placer le spectateur dans une position délicate : que retirer réellement d’un opéra qui s’appuie sur des faits réels tout en en romançant d’autres et en brossant un portrait peu glorieux de John F. Kennedy ?

Opéra-blockbuster

L’opéra JFK déroute car plusieurs de ses aspects pourraient le faire appartenir au genre de la comédie musicale avec notamment des décors spectaculaires, des costumes prodigieux, une mise en scène bien pensée et des éclairages originaux. La lumière verte au début n’est pas sans nous prévenir déjà d’une possible descente aux enfers et que le songe présenté sera plutôt un cauchemar qu’une simple et douce rêverie. Sur les plans énoncés ci-dessus, nous sommes véritablement embarqués dans un grand show à l’américaine, sans que rien sur le plan visuel ne soit laissé au hasard.

Le spectacle oscille entre passages émouvants et grotesques-kitsch assumés qui ne laissent pas de marbre le public. On retiendra sans doute le très beau début du troisième acte échangé entre Daniela Mack (Jackie) et Katharine Goeldner (son double plus âgé), rejointes peu après par Talise Trevigne (Clara Harris).

L’argument peut s’appuyer sur une solide musique, interprétée par l’OSM, qui n’est pas sans rappeler Bernstein à plusieurs endroits. Elle offre un grand support à l’histoire comme le ferait une musique de film hollywoodien, maintient sans cesse l’intérêt du spectateur et nous avons ainsi l’impression d’assister à un film vivant et en direct, un opéra-blockbuster en somme.

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L’une des plus grandes réussites de cette superproduction est sans aucun doute le casting des chanteurs et tout particulièrement le choix des solistes. Tous ont des voix exemplaires qui n’ont pas de mal à se frayer un chemin dans la masse même si cela implique une fois de plus un très bel équilibre compositionnel dans la partition de David T. Little.

On ne peut nier cependant quelques pertes de souffle à certains endroits (notamment dans le deuxième acte) qui auraient pu être facilement allégés sans rien ôter au spectacle. Le livret a également tendance parfois à s’enliser dans de fausses métaphores philosophiques qui ne servent pas l’histoire et ne la font pas plus avancer. Une interrogation demeure quant à la dénomination de l’opéra – JFK – alors que c’est véritablement le personnage de Jackie Kennedy qui est au centre de l’histoire et qui tient le rôle principal.

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Comme beaucoup de productions américaines, peu de choses sont négligées. En maître du spectacle qu’ils sont, les Américains repoussent les barrières classiques de la forme opératique pour immerger le spectateur dans une ambiance très spéciale, pas déplaisante bien qu’un peu déroutante au début.

L’on ne peut s’empêcher, cependant, de rester un peu sur nos gardes quant à la signification de tout cela en nous demandant s’il y a réellement un fond quelque part ou s’il s’agit tout simplement d’une histoire prônant une fois de plus, la gloire des États-Unis.

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