Marie-Gold

Entrevue avec Marie-Gold | Premier album en or

La rappeuse québécoise Marie-Gold fait paraître aujourd’hui même son tout premier album, intitulé « Règle d’or ». Un spectacle de lancement, évidemment annulé, était prévu mercredi dernier au Ministère. Qu’à cela ne tienne, Marie-Gold dépose néanmoins  son offrande dans l’univers du rap québ’ après quelques années d’apprentissage. « Cet album m’a surtout appris à définir mes couleurs et à tracer mon propre chemin dans le rap québécois, ainsi qu’à créer mon propre public ». C’est une Marie-Gold en complète évolution et décomplexée qui nous a accordé une entrevue téléphonique cette semaine.

 

Dès la sortie de son EP Goal : Une Mélodie en 2018, Marie-Gold était déjà en train de composer la chanson Doser, dernière de son nouvel album. Après un an et demi de travail acharné et de multiples collaborations, elle peut enfin présenter Règle d’or au public.

Le résultat, une belle continuité de sa musique d’avant, est soigné et à l’image de la femme cultivée, forte et sensible qu’est Marie-Gold. On sent qu’elle a davantage poussé ses limites et exploité son plein talent. « Ça a été un album très collaboratif qui m’a permis d’apprendre comment je voulais faire mes albums dans le futur ».

Contrairement au EP qu’elle avait autoproduit, Règle d’or a été réalisé avec la participation de nombreux artistes, musiciens et producteurs. « Je pense que ça m’a permis d’aller dans des zones dans lesquelles j’aurais pas pu aller toute seule ». Dans son album, Marie-Gold explore différentes directions musicales, sans négliger le plus important pour elle : les textes. Chaque chanson est associée à un moment personnel et  émotif, et découle d’une inspiration naturelle. « Il n’y a aucun texte que je sens forcé là-dedans. Je pense que ça va se ressentir dans la pureté de l’album. »

Parmi les collaborateurs sur Règle d’or, on compte Francis Leduc-Bélanger (arrangements violons et trompette), Sarah-Judith Hinse-Paré (violons), Karolanne Carbonneau (guitare), Olivier Bernatchez (overdub drums), Mathieu McConnell (contrebasse), Clément Langlois-Légaré (guitare et arrangements), David Osei (piano) et Étienne Dupré (basse). Le mixage a été réalisé par Igor Dubois et le collectif parisien Novengitum.

Les artistes invités sont Stone, J-Kyll, ainsi que Kirouac et Lydia Képinski. Ces deux derniers artistes ont prêté leurs voix pour la chanson Goélands, hymne décomplexé à la fête. « Je me suis dit que j’aimerais ça avoir un powerfull feat, c’est-à-dire un espèce de triangle qui représenterait toute la jeunesse montréalaise. J’ai l’impression un peu qu’on s’adresse à un public similaire, mais avec des musiques différentes », explique Marie-Gold en parlant de Kirouac et Lydia Képinski. Le trio d’artistes représente et véhicule bien le message de Goélands.

Pour sa part, Mémoire est la chanson de l’album qui a fait le plus sortir Marie-Gold de sa zone de confort. « C’est un beat reggaeton dancehall, c’est vraiment pas ce que j’ai l’habitude de faire. J’ai vraiment hésité à la mettre sur l’album parce que ça détonne un peu, mais quand je la joue en spectacle, les gens qui réagissent en général sont ceux qui me disent : « hey, j’écoute pas de rap, mais cette toune-là, je l’ai aimée » ». En plus d’être un texte très significatif pour elle, la chanson Mémoire est selon Marie-Gold une des plus accessibles.

Un produit à la hauteur de ses efforts

« Je pense qu’un premier album, c’est une belle carte de visite », mentionne l’artiste qui a beaucoup appris du processus. « J’ai énormément retravaillé certaines chansons. J’ai passé tellement de temps à réenregistrer, peut-être cent fois le même verse, sans exagérer. Je me suis beaucoup acharnée sur certains trucs, et j’ai appris finalement qu’un moment il faut plus «let go» sans toutefois négliger la qualité du produit ».

Lors de la réalisation de son EP Goal : Une Mélodie, Marie-Gold explique qu’elle était dans un très bel état d’esprit, très libre. Elle était seule chez elle, avec une certaine paix d’esprit créée par l’absence d’internet et de téléphone. Le tout était beaucoup plus encadré pour la création de son album Règle d’or, qui porte un nom inspiré d’une fameuse citation de l’écrivain George Bernard Shaw. « Il y avait d’autres facteurs extérieurs qui entraient en compte, mais c’est pour le mieux, parce que je veux que mon album parle à plus de gens et ça, ça nécessitait la collaboration que j’ai eue ». Marie-Gold se dit une artiste grandie et espère que cela transparaisse dans son nouvel album.

Je veux que les efforts mis sur la musique et les émotions soient ressenties. Je veux que l’on voit le travail, la qualité qui a été recherchée dans les détails, autant dans la musique que dans les textes.

Sans inquiétude pour la suite

Marie-Gold ne s’en fait pas outre-mesure face à l’annulation de son spectacle de lancement du 25 mars qui devait avoir lieu au Ministère. Elle se dit beaucoup plus préoccupée par sa perception de la consommation, des habitudes de vie, de la situation environnementale et de la gestion des événements à travers le monde. « J’ai beaucoup plus été frappée par la crise humanitaire que par l’annulation de mon lancement qui me semblait être un peu une fourmi dans tout ça ».

Elle était loin de se douter que sa performance aux Francouvertes dans le cadre de la série J’aime mes ex serait sa dernière avant un moment. Elle n’a pourtant aucun regret d’être apparue sur scène qu’un bref instant, laissant la vedette à sa marionnette. « Je me suis dit « ok j’ai comme un 15 minutes carte blanche, j’ai envie de faire de quoi de complètement disjoncté et absurde ». C’était donc avec ma marionnette et je suis contente d’avoir poussé mon idée à bout ».

* Marie-Gold en ouverture de soirée aux Francouvertes le 9 mars dernier. Crédit photo: Maryse Boyce

 

Les circonstances sont difficiles présentement et surtout incertaines dans le milieu culturel, mais elle croit que « la musique et l’art peuvent très bien survivre sur Internet ». La rappeuse est « 100% dans l’acceptation » et vit ce confinement comme tout le monde. « Ça me donne l’espace mental pour créer, surtout que l’école est arrêtée. » Elle a d’ailleurs sorti sur sa page Facebook une chanson intitulée L’amour au temps du corona.

 

Grande lectrice, elle recommande fortement Pour nous libérer des rivières : plaidoyer en faveur de l’art dans nos vies de Hugo Latulippe, une lecture inspirante pour elle durant cette quarantaine.

La jeune artiste voit le report de son spectacle comme une manière de laisser du temps aux gens pour consommer son album. Elle reste positive et fidèle à elle-même. « Je vais avoir créé une plus grande crowd, un plus grand public et quand cette crise sera finie, on va se faire un party en bonne et due forme pour célébrer ça! »

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