Jesuslesfilles au Pantoum | Quinze ans, un long fleuve de rock
Jesuslesfilles fête ses 15 ans. Pourtant, malgré cette relative longévité, nous avions réussi l’exploit de ne jamais voir Jesuslesfilles en show. Ce n’était pas faute d’entendre le nom, de voir le nom, d’avoir écouté les albums, bref, nous connaissions sans les connaître, et c’est donc avec une certaine curiosité que nous nous rendions à ce spectacle du 17 juin au Pantoum. D’autant plus que le groupe n’a inscrit que trois dates à son calendrier pour célébrer sa quinzaine ; une à Alma le 22 avril dernier, une à Québec qui nous réunit aujourd’hui, et enfin une dernière à l’Esco le 9 septembre prochain.
Dès que les six musiciens entrent en scène, on plonge dans le vif du sujet, sans présentation ni flafla. Un entrain prometteur, mais, paradoxalement, ce n’est pas une grande énergie qui se dégage de la scène. L’ensemble paraît avoir du mal à décoller. Les musiciens restent assez statiques et le son semble jouer en la défaveur du groupe – on aurait cru entendre une seule et même longue chanson, comme un amalgame d’instruments et de voix. Hormis quelques mots attrapés de-ci de-là, impossible de comprendre les paroles pourtant chantées en français. Bien dommage, car leurs albums enregistrés – et leurs quinze bougies ! – témoignent d’un groupe bien assis dans son style.
Quoique peu prononcée, on retrouve tout de même avec plaisir la voix au timbre spécifique du guitariste Martin Blackburn – le même frontman qu’aux débuts du groupe, le seul avec le batteur Benoît Poirier – en duo avec la chanteuse et claviériste Yuki Berthiaume-Tremblay.
Mention spéciale pour le titre Parasol, venu apporter un nouveau souffle rythmique au concert et chanté à tue-tête par la foule, ainsi que Mercredi, là aussi entonné par cœur du côté du parterre.
Pour la chanson L.A., Jesuslesfilles convie sa comparse Laurence-Anne sur scène. Celle-ci venait d’ailleurs de se produire avec le groupe La Sécurité en première partie. Là encore, le micro ne semblait pas rendre justice à cette participation, puisqu’on distinguait mal la voix de la chanteuse invitée.
Soulignons toutefois qu’une telle invitation sur scène, alors que la musicienne avait foulé les planches juste auparavant, donnait un sentiment d’assister à des retrouvailles privées auxquelles le public avait été convié par hasard, à la limite voyeur. Ce sentiment se voit encore renforcé lorsque le chanteur explique à la blague : la bookeuse du Pantoum est l’ancienne bookeuse de Jesuslesfilles, la chanteuse de La Sécurité – qui a assuré la première partie de Jesuslesfilles au Pantoum ce soir-là – est la bookeuse actuelle de Jesuslesfille, la musicienne Melissa Di Menna à la guitare pour La Sécurité, est derrière le clavier pour Jesuslesfilles… Un véritable arbre généalogique musical! Pour reprendre les mots du batteur Benoît Poirier, réputé pour ses interventions fréquentes et cocasses durant les spectacles du groupe, presque tout le monde, cette soirée-là, faisait deux shows.
Après le dernier morceau, comme Jesuslesfilles n’a pas pour habitude de faire de rappel, c’est justement le batteur Benoît Poirier qui divertit les spectateurs – ceux qui ne s’étaient pas dirigés vers la sortie, bien entendu, puisque plusieurs habitués s’étaient déjà éclipsés. Deux classiques de chansons à répondre, Pour boire il faut vendre et J’ai fait une banqueroute, retiennent plusieurs spectateurs dans la salle. À dire vrai, c’était peut-être le meilleur moment du show, et on était prêts pour une veillée. Sachant que Benoît Poirier semble piocher souvent dans le répertoire traditionnel en guise de rappel, on espère avoir droit à d’autres classiques la prochaine fois.
La Sécurité, une ouverture entraînante
Voilà un autre groupe dont le nom ne nous avait pas échappé : La Sécurité, formé en 2021 par cinq membres pour la plupart bien actifs sur la scène punk rock montréalaise, qui ouvre le bal pour Jesuslesfilles. La veille, le quintette sortait justement son tout premier album, Stay Safe! Avec des accents new wave, art punk, pop et disco, ce nouveau disque est réalisé par Samuel Gemme et Félix Bélisle.
Bien que réservés pour la première chanson, les musiciens de La Sécurité ne tardent pas à prendre le rythme. La chanteuse principale et claviériste Éliane Viens-Synnott – également batteuse dans une autre vie – esquisse des mouvements de danse dès les morceaux suivants, Try Again et Suspens. Elle part carrément dans des chorégraphies complètes pour Le Kick, Serpent – très bons ! – et Hot Topic, avec une grande partie instrumentale et déhanchée par la chanteuse qui descend de scène, tourne autour de son clavier et de son micro, reprend le clavier.
Les paroles sont tour à tour chantées en français et en anglais, une gymnastique qui ajoute des nuances intéressantes entre chaque morceau. L’ensemble est soutenu par de solides lignes de basse du côté de Félix Bélisle. Laurence-Anne et Melissa Di Menna offrent également une bonne prestation, quoique plus discrète. À la batterie, l’Ontarien Kenny Smith arbore pour l’occasion de grosses lunettes de plongée – safety first !
La Sécurité a offert un très bon show d’ouverture, et le public en aurait pris davantage. Avec quelques morceaux de plus, le Pantoum aurait sans doute commencé à danser, tant le rythme devenait entraînant. On en redemande, et tant mieux, puisque le groupe donne d’ailleurs rendez-vous au public le 18 août prochain à l’Esco pour le lancement officiel de son premier album.
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