crédit photo: Pierre Langlois

Entrevue avec Swing | Paraphraser l’émotion

Le talentueux rappeur Swing, membre du collectif bruxellois L’Or du Commun pendant dix ans, fait cavalier seul depuis la sortie de son premier album, Au revoir Siméon, paru à la fin de l’année dernière. L’artiste belge donnera une performance à L’Anti Bar & Spectacles ce jeudi 9 mai, avant de fouler les planches de La Petite Boîte Noire le lendemain et celles du Théâtre Fairmount samedi.

Septembre 2023. Plus aucun signe de vie de la part de L’Or du Commun depuis des mois. Un single, Maladresse, vient enfin rompre le silence de l’un des membres du trio, Swing : l’artiste, qui avait lancé en 2018 et en 2020 deux excellents EP, annonce son premier album pour la fin de l’année.

« Faire de la musique en groupe, [ça amène] beaucoup de compromis, admet Swing d’emblée. C’est très différent que de faire de la musique en solo, et ça a fait nourrir l’envie de me dire aussi, en parallèle : ok, c’est quoi ton univers à toi? Qu’est-ce que toi, tu aimerais faire si tu étais seul sur un morceau, comment? C’est ça qui a donné naissance à mon premier projet solo, Marabout. Pour un premier projet, c’est un EP qui a assez bien marché. J’ai eu cette chance-là. Ça m’a aussi conforté dans l’idée qu’il y avait un truc à faire. J’avais envie de creuser encore plus », poursuit l’artiste bruxellois en entrevue.

Marabout et Alt F4, lancés alors que la carrière de L’Or du Commun battait son plein, apparaissaient davantage comme une « parenthèse » aux yeux de Swing, de ses propres mots. « C’était pas de l’amusement non plus, mais c’était le truc à côté, qui me permettait aussi de souffler. »

Après la parution d’Avant la nuit, dernier album en date de L’Or du Commun, Swing a enfin trouvé le temps d’aller au bout de son aspiration en solo. « Là où L’Or du Commun était le projet principal de chacun, on l’a tous maintenant mis au second plan. Nos projets principaux, pour ma part, c’est la musique en solo, pour Primero aussi, et Loxley, lui, fait une émission radio, un podcast, il réalise des docus et des clips. Et la chance qu’on a eue, c’est qu’on a eu tous eu cette envie-là au même moment, donc ça n’a créé aucune frustration », explique le musicien bruxellois.

La richesse est intérieure

Au revoir Siméon propose 15 titres tirant leurs influences dans le hip-hop, la soul, l’afrobeat, la house et le R&B. Si un certain courant du rap s’inspire d’une culture d’ego trip, de richesse et de violence, Swing n’appartient aucunement à cette école.

L’artiste préfère laisser libre cours à ses émotions, dévoilant des facettes intimes, voire sombres de sa personne. « [L’album laisse place à de] grands thèmes universels : ma vision de moi-même en tant qu’homme, comment se positionner entre ma projection future et puis la personne que j’étais dans le passé. Ce sont des questions qu’on se pose [souvent dans] nos vies : à quel moment tu dois être dans une optique d’acceptation de qui tu es et d’indulgence envers toi-même, et à quel moment tu dois être dans une optique de [remise en question]. Cet entre-deux, il est difficile à trouver », concède Swing.

Sa rencontre avec Crayon, producteur français avec qui il avait notamment collaboré sur le morceau Soon, tiré du EP ALT F4, a particulièrement confectionné son nouveau son. « [Le rap] te fait rentrer dans la musique par une porte qui est pas mal axée, finalement, sur les paroles et sur les rimes. Mais petit à petit, tu t’ouvres aux mélodies, tu t’ouvres à la musicalité. Et Crayon m’a aidé à m’ouvrir à ce petit plus. Par exemple, je pouvais faire une mélodie, un refrain, et puis il allait par après me dire « tu sais quoi, je vais changer les accords pour que ça accompagne mieux l’émotion de ce que tu racontes ». J’avais très peu conscience de ça avant, en fait », souligne Swing.

L’Or du Commun a fait partie d’un mouvement majeur pour l’industrie culturelle en Belgique au milieu des années 2010, qui a mis en lumière une panoplie d’artistes rap locaux comme Damso, Roméo Elvis, Hamza, Caballero & JeanJass et Shay.

« Si on revient à la base, avant 2010, je pense qu’il n’y a personne qui vit du rap en Belgique, ou très peu. Et actuellement, il y a beaucoup plus de personnes qui savent vivre du rap. Autant au niveau des artistes que des structures, c’est-à-dire que ce soit des managers, des bookers, des ingés-son. Il y a beaucoup plus de gens qui investissent du temps, qui travaillent dans l’industrie. C’est une chance. »

Déjà un album lancé il y a cinq mois à peine que Swing prépare un nouvel opus. « Je pense qu’après Alt F4, avec le Covid et tout ce qui s’est passé, ça m’a pris un peu de temps avant de me reconnecter à la musique. Mais là je sens que c’est une erreur que je ne veux plus commettre. Je ne me suis pas laissé le temps de me dire : c’est bon, j’ai sorti un album », dit l’artiste qui ne veut visiblement pas se reposer sur ses lauriers. Des maquettes commencent déjà à être conceptualisées, bien que Swing ne sait pas si elles prendront la forme finale d’un album ou d’un EP.

Pour voir le rappeur à l’œuvre, vous pouvez encore vous procurer des billets ici (Québec), ici (Sherbrooke) ou ici (Montréal).

Vos commentaires