Lisa LeBlanc

Lisa LeBlanc Symphonique à la Salle Wilfrid-Pelletier | La magie du sucré-salé en musique

Une vraie rock star, Lisa. Une star du disco, du country, du folk et maintenant du symphonique. Lisa LeBlanc clôturait la tournée de son album Chiac Disco, entamée il y a deux ans déjà, dans une formule avec orchestre à la Salle Wilfrid-Pelletier, vendredi dernier. Le public a naturellement été conquis face à la performance fantastique et hors norme des musiciens.

Il y a des choses qui s’agencent simplement bien ensemble, sans que l’on en doute : le vin et le fromage, Noël et la neige, une séance au cinéma et du pop-corn. Il y en a d’autres qui ne s’accordent pas, sans grande surprise : du chocolat et des brocolis ou des chaussettes et des sandales. Repoussant.

Et puis, au milieu de tout ça, il y a Lisa LeBlanc Symphonique, qui combine du disco et ses racines acadiennes sous une touche orchestrale. Le mélange est tellement improbable et atypique que personne ne sait à quoi il devrait s’attendre. Pour le mieux, en fait, ça ne viendra que quintupler la surprise du public face à ce concert maîtrisé et unique.

 

En décalage

On croirait entendre un spectacle de musique classique à la Maison symphonique (qui est à quelques pas de l’endroit, d’ailleurs) dans les premières minutes. L’Orchestre symphonique de Laval, sous la direction de Jean-Michel Malouf, entame la soirée avec une composition aux accents d’une musique de film, rappelant en partie la patte d’Howard Shore. Celle que l’on attend tous accède finalement à la scène sous les applaudissements, munie de sa guitare et vêtue d’un ensemble à paillettes.

Lisa LeBlanc débute sa performance avec un succès de la première heure, l’excellent Kraft Dinner, tiré de son album éponyme. La chanson est touchante, mais expose une romance tout sauf à l’eau de rose dans son texte. Et voilà, un premier décalage, cette fois-ci avec l’aspect conventionnel d’un orchestre, le premier d’une longue série.

Lisa LeBlanc Symphonique se repose en fait grandement sur ces fameux décalages. Un décalage comme lorsqu’on combine des vêtements de styles différents ou deux nouvelles saveurs ensemble. La première bouchée fait peur, la deuxième donne confiance alors qu’on se perd dans la beauté de la curieuse nouveauté à la troisième.

Lisa LeBlanc abandonne sa guitare pour le deuxième morceau interprété, Dans l’jus, s’adonnant en chantant à une danse libre sans réelle chorégraphie sur scène. Les musiciens poursuivent avec Pourquoi faire aujourd’hui, recevant dès les dernières secondes une ovation pour deux des plus grands succès disco du dernier album de Lisa LeBlanc joués consécutivement.

« Oh my god voyons, vous allez me faire brailler à la troisième toune », dit-elle face à une salle conquise après quelques minutes seulement.

 

Marquer les époques

Lisa LeBlanc possède cette magnifique qualité artistique qu’est celle de se renouveler à chaque projet paru. Elle annonce pendant le spectacle qu’elle revisitera différemment, en plus de présenter en majeure partie son dernier album, d’anciens titres de sa discographie. Et de quelle manière.

Difficile de reconnaître J’pas un cowboy tant l’orchestration s’avère différente, d’une manière si positive, de la version studio sortie il y a presque 12 ans déjà. Les arrangements sont signés Antoine Gratton, et le travail réalisé est colossal. L’Orchestre symphonique de Laval est parfois enterré par les instruments électriques accompagnant également LeBlanc, logiquement, mais la formation classique, particulièrement les cuivres, arrive malgré tout à prendre sa place durant la quasi-entièreté du spectacle.

Un exercice pas si facile que l’on pourrait le croire, rappelons-nous du décevant mariage entre l’OSM et IAM en octobre dernier.

Entre City Slickers and Country Boys et Gossip, Lisa LeBlanc demande à des personnes habillées chic de se lever pour laisser voir leur accoutrement : « Vous êtes trop beaux ça me distrait, trop de glitter », lance-t-elle.

Lisa LeBlanc donne aujourd’hui un spectacle en ville, profitons-en tout de même.

 

La sympathie incarnée

Suivant une séquence mélancolique et romantique avec La poudre aux yeux et Me semble que c’est facile, toutes deux tirées du récent projet de l’artiste, LeBlanc empoigne son instrument caractéristique, annonçant déjà un segment délirant et particulièrement énergique du spectacle.

« Banjo symphonique, on essaie ça », dit Lisa LeBlanc.

Lisa LeBlanc est technique comme jamais à son instrument, faisant danser ses doigts sur les cordes du banjo. La musicienne interprète You Look Like Trouble (But I Guess I Do Too) et Gold Diggin’ Hoedown, les deux pièces qui avaient d’ailleurs servi d’ouverture à la première partie impromptue de l’artiste au concert de Patrick Watson le mois dernier.

Lisa LeBlanc termine sur Veux-tu rentrer dans ma bubble, invitant la salle (sûrement trop « assise » pendant le reste du concert au vu de l’électrique performance) à se lever et à taper ses meilleurs pas de danse.

La musicienne refoule les planches en rappel, mais cette fois-ci sous le costume de Belinda, l’alter ego reine du bingo créé par LeBlanc pendant la pandémie. Elle interprète It’s Not a Game, It’s a Lifestyle, avant naturellement de clore pour de bon le spectacle avec la chanson qui l’avait propulsée au rang d’artiste célèbre à ses débuts, Aujourd’hui, ma vie c’est d’la marde.

Dire que « la princesse, c’t’une grosse salope » sous un fond de clavecin en accompagnement et d’orchestre, c’est encore ce que l’on peut appeler un décalage.

Des Montréalais face à des compositions disco et folk d’une Acadienne, dansant et criant quant à eux en chœur dans une salle d’ordinaire si rangée « aujourd’hui, ma vie, c’est d’la marde », ça ajoute encore au curieux événement. Même le plus créatif des bonhommes n’aurait pu penser à une scène pareille.

Il y a seulement l’excentricité et la folle ambition de Lisa LeBlanc pour mettre en œuvre cette idée.

Une soirée maîtrisée, unique et profondément agréable à prendre part. Le public montréalais peut lui dire à la prochaine sans regret, sachant qu’il a pu apprécier l’artiste au top de sa forme en cette première soirée de mars.

Au vu de son éclectique carrière menée jusqu’à présent, Lisa LeBlanc ne surprendrait certainement pas si elle sortait prochainement un album EDM ou un EP funk.

Bon retour en studio, alors.

 

Grille de chansons

  1. Kraft Dinner
  2. Dans l’jus
  3. Pourquoi faire aujourd’hui
  4. J’pas un cowboy
  5. Highways, Heartaches and Time Well Wasted
  6. City Slickers and Country Boys
  7. Gossip
  8. Entre toi pi moi pi la corde de bois
  9. La poudre aux yeux
  10. Me semble que c’est facile
  11. You Look Like Trouble (But I Guess I Do Too)
  12. Gold Diggin’ Hoedown
  13. Gossip II
  14. Veux‐tu rentrer dans ma bubble?

Rappel

  1. It’s Not a Game, It’s a Lifestyle
  2. Aujourd’hui, ma vie c’est d’la marde

 

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