
Fuudge, The Evil Five, PRINCESSES et René Lussier au Zaricot | Solidement rocker sans se nier en quatre temps
Parmi les choses qu’on adore en tant que mélomane, c’est de découvrir des groupes en concert, mais aussi de nouvelles salles de spectacle. À notre arrivée au Zaricot, après avoir passé sa porte d’entrée à moitié décapée, on fut enchanté par le décor bricolé de cette toute petite salle de St-Hyacinthe, qui accueille les meilleurs groupes et artistes du Québec depuis plus de 20 ans. Vendredi soir, Ligue Rock (13e édition!) avait programmé un maudit beau quartette de formations, chacune ayant une différente définition de ce qu’est du gros et bon son.
René Lussier
C’est aux alentours de 20h30 que ce vieux routier de René Lussier (1957- ) vint s’assoir sur scène avec sa guitare, accompagné à la batterie et aux percussions insolites de son fidèle comparse, Robbie Kuster (Louis-Jean Cormier, Patrick Watson). Et le fun que ces deux garçons avaient pendant cette petite demi-heure sans temps mort… leur enthousiasme fut complètement contagieux, mesdames et messieurs.
Pendant que Robbie le suivait du regard avec ses cadences syncopées, René malmenait ses guitares de façon frénétique, armé de moult pédales à effets spéciaux des plus fantastiques (dont une qui faisait jouer à l’envers ses riffs!), y allant par moment de vocalises approximatives mais ô combien jouissives ou d’hilarantes interventions. Comme pour introduire cette pièce qui parlait de poulets, ou encore la pièce Valise, dont une sortie de route pas synchro en fin de parcours fit éclater de rire le duo, pour que Lussier attrape le micro pour préciser qu’il manquait une paire de bas. Du génie!
Car sans cet humour absurde et pince sans rire, plusieurs rockeuses et rockeurs auraient pu être désarçonnés par le surréaliste jam en mode bruitiste offert par la dynamique paire, dont la maestria et la connexion cosmique décrochèrent plusieurs mâchoires. Car on n’était pas prêt, personne ne l’était. Car René préfère ce qui est imprévisible, aventureux, déjanté et surprenant. Et on en redemande.
Si on avait à décrire la musique expérimentale de cet habitué du FIMAV, on pourrait dire que, vendredi dernier, elle était souvent bruyante et distorsionnée (après tout, René a co-fondé Gros Mené), parfois country mais toujours aussi ludique qu’hallucinante. On ne pensait jamais voir un ventilateur de poche être utilisé en guise de pick. Et que dire de cet hommage à feu Robert Gravel, fondateur de la LNI, alors que le duo interpréta une composition à saveur patriotique, qui n’était pas sans rappeler un certain hymne interprété par Hendrix en 1969.
En fait, les mots ne rendent absolument pas justice à ce que c’est de vivre un show du guitariste avant-gardiste. Y fallait être là. Quiconque (lire : tous et toutes) osa les suivre dans leurs délires déambulatoires aboutit on ne sait trop où, mais on s’en fout car ce fut parfaitement fou. D’ailleurs, ça faisait bien trop longtemps que votre scribe fana de musique marginale n’avait assisté à un concert du légendaire et ô combien unique artiste, qui célébrait ses 50 ans de carrière en décembre dernier. On se promet de remettre ça bientôt-bientôt tellement c’était impressionnant, marrant, ahurissant, excellent. Quel talent.
PRINCESSES
Ensuite, ce fut au tour de PRINCESSES de venir rocker la place pendant une petite trentaine de minutes pas piquée des vers. Lancé en 2022, l’encore tout jeune power trio nous balança en pleine face les pièces de leurs deux EP, avec une fougue aussi belle que bonne, pareil comme l’humeur de ses deux souriantes mais frondeuses frontwomen.
Conjuguées avec d’efficaces et bien fuzzés riffs, les solides harmonies vocales de Flavie Léger-Roy (guitariste) et Marie-Philippe Thibeault-Desbiens (bassiste) nous renvoyèrent directement à l’époque où les filles d’Elastica, The Breeders et Bikini Kill bottaient des culs à pas mal de gars (oh que oui), alors que Rage Against the Machine dénonçait avec véhémence pas mal d’inégalités sociales en nous donnant de sales torticolis.
Pendant que Chouchoune se démenait derrière sa batterie (sous son masque de type kabuki), Marie-Philippe et Flavie livraient leur gros rock, qui oscillait parfois entre le son des Rolling Stones et celui de Gros Mené (encore eux?), lorsqu’il ne versait pas carrément dans le punk féministe. Et on ne dit pas ça seulement à cause de Fouille Fouille, leur jouissive chanson rendant hommage au clitoris (!), accompagnée d’une désopilante chorégraphie; notez que Princesses a aussi fait paraitre un recueil de nouvelles du même nom.
The Evil Five
Après ces deux prestations sans failles, les putois tripatifs avaient un mini-peu de pression et se devaient de livrer la marchandise. Ce que The Evil Five s’est acquitté de fort belle façon. Votre scribe avait très hâte d’enfin pouvoir entendre les compos de ce tout nouveau groupe qui n’est pas encore passé en studio.
Pour ce nouveau projet, le chanteur-claviériste Joseph « Joe Evil » Burnett retrouve trois de ses acolytes de GrimSkunk, soit le batteur Alain Vadeboncoeur, le guitariste-chanteur Peter Edwards et le bassiste-chanteur Vincent Peake (également leader de Groovy Aardvark), avec en prime un autre fourmilier, le guitariste Martin Dupuis, aussi aux chœurs. Inévitablement, ça sonne assez comme vous imaginez : un cocktail mixant rock lourd, proto-metal et punk enragé, barriqué dans une bonne dose de psych-prog bien dégorgé. Sans oublier d’ajouter dans le robuste trip une pincée de reggae et une grande rasade de fraternité perdurant depuis la fin des années 1980.
A-t-on réellement besoin de préciser que le concert de cette belle bande d’excellents rockeurs fut foutrement puissante? Bref, on a bien hâte que les vieux potes enregistrent Green Sun (riche pièce fleuve à plusieurs mouvements, composée par Martin), Hard Cell (de et avec Vincent au micro), Nice Dice (que GrimSkunk jouait en concert l’an dernier) et plus encore.
Fuudge
On remercia le grand manitou de Ligue Rock, Seb Collin, d’avoir devancé un peu le set de Fuudge, qui devait débuter à minuit, afin qu’on puisse en voir et en entendre un bon bout.
La foule avait peut-être rétréci de moitié, mais celles et ceux qui étaient toujours accueillirent avec vigueur l’ultra-lourd quartette.
De toute façon, c’était littéralement impossible de ne pas être ébranlé et subjugué par tant de robustesse. Hypnotisés par les riffs envoûtant de Fuudge, on en aurait redemandé si on n’avait pas été déjà demain (désolé, votre papa banlieusard de scribe n’a hélas plus 20 ans, même s’il ne porte que des t-shirts de bands).
C’est avec les tympans bien repus qu’on quitta le fort sympa Zaricot, après cette festive soirée débordante de maudit bon rock, beaucoup trop fort pour la ligue (c’est un compliment, bien évidemment).
Photos en vrac
René Lussier
PRINCESSES
The Evil Five
FUUDGE
- Artiste(s)
- Fuudge, PRINCESSES, René Lussier, The Evil Five
- Ville(s)
- Saint-Hyacinthe
- Salle(s)
- Le Zaricot
- Catégorie(s)
- Grunge, Progressif, Rock, Stoner rock,
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