Extreme

Extreme et Living Colour au MTelus | Une soirée plus que funky avec deux guitar héros

Mentionner que votre scribe avait hâte d’enfin assister à un concert de Living Colour relèverait de l’euphémisme. Si le quartette américain était passé en ville une demi-douzaine de fois pendant ses belles années (soit entre 1988 et 1993, dont en ouverture de nul autre que The Rolling Stones au Stade Olympique en 1989!), leur dernière visite remontait à 2003 (en ouverture de King Crimson!), bien que le groupe soit passé par la suite à la Place des Arts pour jouer de bien belles reprises (au sein de la caravane Experience Hendrix 2010).

Ainsi, vous vous doutez bien que la nouvelle à l’effet que leur tournée avec le groupe hard rock Extreme s’arrêterait à Montréal en a réjoui plus d’un.e, les deux groupes étant particulièrement aimés de la communauté des guitaristes du monde entier. Qui plus est, le samedi 28 septembre dernier, c’était également la dernière date de cette tournée mondiale avec le groupe de Nuno Bettencourt et Gary Cherone, après avoir tourné en Australie et en Angleterre l’an dernier, avant de tourner aux États-Unis en janvier-février.

Pur bonheur clair-obscur

À 20h tapantes, la marche impériale de Star Wars retentit dans l’enceinte du MTelus, annonçant l’arrivée de ce groupe métallique composé de quatre Newyorkais à la peau noire, étant évidemment beaucoup plus souriants et sympathiques que Darth Vador et ses sbires. Célébrant cette année le 40e anniversaire de fondation de Living Colour, le quatuor nous en a donnée plein la vue et les oreilles pendant les trois trop courts quarts d’heure qu’a duré leur tour de chant (on en aurait pris facilement le double).

Des six albums parus depuis le lancement de Vivid en 1988, les gars se sont surtout concentrés sur leurs trois premiers albums. D’emblée, on a lancé le bal avec les accrocheuses Leave It Alone (et son riff rappelant celui de leur collaboration avec Run-DMC, figurant dans la bande originale du film Judgment Night) et Ignorance Is Bliss, toutes deux figurant sur l’album Stain (1993). Ensuite, le vocaliste émérite Corey Glover nous a soufflé de ses prouesses vocales sur Sacred Ground (Collideoscope, 2003) et deux titres tirés de leur premier album, soit Funny Vibe et la puissante Open Letter (to a Landlord), dont la grandiose intro gospel vous a sûrement fait lever le poil — si vous y étiez, bien évidemment.

Quelqu’un a parlé de rap-metal?

En plus d’avoir joué avec tout le monde (d’Al Green à Depeche Mode, en passant par Joe Satriani, Billy Idol, Annie Lennox, Madonna, les Stones, etc.), le bassiste Doug Wimbish — en poste au sein de Living Colour depuis 1992 — a aussi été de la section rythmique originale des légendaires pionniers du hip hop de chez Sugarhill Records. Du coup, on nous a offert un succulent medley en mode rap-metal des immortels tubes que sont White Lines (Don’t Don’t Do It), The Message (toutes deux de Grandmaster Flash) et Apache (de The Sugarhill Gang).

Comme on n’avait pas l’temps d’niaiser, on a enchainé avec la vitriolique pièce titre de leur album de 1990 Time’s Up (après une courte intro rappelant autant Pink Floyd qu’Anthrax) et l’hymne Cult of Personality (LE succès du groupe), avant de terminer avec un coup sûr, soit leur reprise ultra-musclée de Should I Stay or Should I Go (The Clash), qu’ils se plaisent à jouer depuis leurs débuts. Ce trio de brûlots offert en fin de set nous a par ailleurs soufflé à l’oreille que le jeu de guitare acrobatique de Vernon Reid (et les multiples effets qu’il utilise, comme la pédale Whammy) semble avoir eu un grand impact sur le bon Tom Morello de Rage Against the Machine.

Après un set si puissant et efficace, sans aucun temps mort de ces vieux pros que sont Living Colour, on se croise les doigts pour que la troupe reviennent nous voir en tête d’affiche pour un vrai set avant longtemps. En attendant le groupe principal, pour nous préparer nos papilles auditives, on nous avait concocté une liste de lecture plutôt appropriée, incluant des hits sucrés et vénéneux de Def Leppard, Alice Cooper et autres Poison.

 

Des hits, des riffs…

On va d’emblée vider la question une fois pour toute : bien que plusieurs croient (à tort) qu’Extreme n’est qu’une power balade au succès planétaire, quiconque les a (re)vus en show peut vous assurer qu’en terme de blues rock, le groupe de Boston est difficile à battre, tant il assure grave.

Après une intro tribale à la King Kong (pour aller la bannière inspirée de leur dernier né, SIX, paru l’an dernier), Extreme a démarré sur les chapeaux de roues, avec deux pièces de leur album classique Extreme II: Pornograffitti (1990), soit les festives It (‘s A Monster) et Decadence Dance. D’ailleurs, dudit disque, on a aussi pu entendre, entre autres, une paire d’immenses power balades. On parle évidemment des incontournables que sont Hole Hearted et More Than Words, avec Nuno à la guitare acoustique 12-cordes, toutes deux accompagnées du grand chœur des fans montréalais d’Extreme. Un fort beau moment de communion acoustique vibrant d’intensité. En particulier lors de la seconde (avec sa marrante intro à la Stairway to Heaven), interprétée tendrement par le duo Gary et Nuno en totale symbiose.

En plus d’avoir joué la moitié des pièces leur plus que décent plus récent album (qui rappelle par moment le plus tranquille des Foo Fighters), on eut aussi droit à un trio de chansons de III Sides to Every Story, soit les très funkys et Hendrix-esque Rest in Peace, Cupid’s Dead (pendant laquelle le bassiste Pat Badger s’est amusé à lancer dans la foule tous les picks de Nuno!) et Am I Ever Gonna Change.

…des solos et les prouesses de Nuno

De leur quatrième album, Waiting for the Punchline, les gars ont joué deux pièces, soit Hip Today et surtout l’instrumentale Midnight Express. Sachez que cette dernière détient le pouvoir de décrocher pas mal de mâchoires. Sans déconner. C’en était impressionnant. Vraiment.

Un peu plus tôt dans le set, on a eu droit à un medley de pièces de leur Van-Halen-esque premier album paru en 1988 (Teacher’s Pet, Flesh ‘n’ Blood, Wind Me Up, Kid Ego et Mutha (Don’t Wanna Go to School Today)), avant que la troupe n’enchaîne avec Play With Me — qu’on entend en effet dans Bill & Ted’s Excellent Adventure — après avoir joué quelques quelques mesures de We Will Rock You de Queen en intro, juste pour le fun. Ils nous ont aussi joué le même tour, en jouant un petit bout de Take Me Home Tonight d’Eddie Money avant Banshee.

Parlant de reprises et de plaisir (pas coupable pentoute), lorsque Nuno est allé chercher une guitare rouge bariolée de jaune, on se doutait qu’il rendrait hommage à un de ses héros, Eddie Van Halen, en interprétant Ain’t Talkin’ ’bout Love. Vous vous souvenez de l’intro de la pièce He-Man Woman Hater sur Pornograffitti? Celle qui vous décroche encore et toujours la mâchoire? Ben oui, l’impossible reprise que fait Nuno (accompagné batteur Kevin Figueiredo) de Flight of the Wounded Bumblebee, un interlude classique du répertoire russe composée en 1900, suivait juste après, avant d’enchainer avec l’entrainante Get the Funk Out, juste avant le rappel (composé de deux pièces de SIX).

Aux micros

Si le chanteur Gary est une authentique et ultra énergique bête de scène (63 étés au compteur et toujours en voix), son guitariste Nuno (de 5 ans son cadet) est quant à lui un impressionnant guitar hero doublé d’un marrant commentateur entre les pièces. Le guitariste nous jasa entre autres du tout premier disque d’or du groupe (obtenu au Canada!) et de son chapeau de cowboy acheté l’an dernier à Nashville pour la modique somme de 7000$, et pris le temps de remercier l’équipe de techniciens suivant les groupes en tournée, avant de quitter.

Après un si généreux set (près de deux heures et demie, rappel inclus), les rockeurs et rockeuses sont repartis repus du MTelus avec un sourire grand comme ça (selon Nuno, la meilleure foule de cette tournée était à Montréal), et notre paire d’hôtes ont pu retourner à la maison avec le sentiment du devoir accompli.

P.S. S’il est aussi possible que ce trop-plein de suintant rock ait rendu dingues de jalousie certain.es des guitaristes présent.es, les tonitruantes mélodies entendues samedi dernier résonneront assurément entres les oreilles des mélomanes qui y étaient pendant longtemps.

Photos en vrac

Living Colour

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