crédit photo: Andy Jon
Sandra Contour

Entrevue avec Sandra Contour | L’art de sublimer la solitude

Sandra Contour continue de récolter les premières fois. Alors que le printemps d’une année d’accomplissements fleurit, l’auteure-compositrice-interprète almatoise fignole les derniers détails de la parution de son premier album, J’ai pas d’visite, le 10 mai, puis les lancements qui suivront, les 23 et 29 mai.

Quand Sors-tu? rejoint Sandra Contour au téléphone, il est 8h30. À 9h, ses collègues du concours Ma première Place des Arts, qu’elle a remporté en janvier dernier, l’attendent pour commencer une autre journée de composition. La petite équipe passe une semaine intensive au Studio B-12 pour écrire et enregistrer les pièces qui seront présentées le 4 mai au Labo de Ma première Place des Arts, tradition du concours.

« C’est possible de créer vite! annonce Sandra en grande pompe, comme étonnée par son propre propos. Faut juste starter la machine. Dans mon cas, d’habitude, elle est longue à starter. » L’écriture de chansons fait partie de son quotidien depuis 2019 seulement, alors qu’elle entamait un programme en composition et arrangement au cégep de Saint-Laurent. Avant ça, son journal intime et l’« écriture automatique » qu’elle y déversait représentaient son principal catalyseur d’émotions.

C’est peut-être en raison du caractère encore nouveau du métier que trois mois lui ont été nécessaires pour enregistrer les versions de base (guitare-voix) de ses chansons, chez elle à Québec en compagnie de son chat, qu’on entend d’ailleurs sur Rêver c’est pour les autres. « Ça a été une partie de yoyo, l’enregistrement », lance la chanteuse, qui a aussi participé aux Francouvertes ce printemps. « On a commencé en studio, et quand je suis retournée chez moi pour écouter ce qu’on avait, je pleurais. Je trouvais que le son me ressemblait pas, j’étais pas capable d’aller chercher l’émotion. »

Bien que décevante, la seule option pour rester loyale à ses doux morceaux folk aux textes touffus et bourrés d’images était claire : tout recommencer, cette fois dans un environnement connu et sécurisant qui apaiserait le syndrome de l’imposteur qui collait à sa première expérience comme artiste en studio. « J’ai dit à mon réalisateur [Gabriel Desjardins] : on scrap tout ce travail-là pis on recommence. »

Étrangement, cette brèche dans le plan initial concorde parfaitement avec l’album et son essence, et lui a insufflé plus de vérité. « Ça sonne vraiment « appartement », et c’est ça que je voulais, affirme Sandra. Les tounes parlent de solitude, donc ça avait quasiment pas le choix d’aller là. »

J’ai pas d’visite traite en effet du manque de visite (surprise), mais aussi de résilience et de la possibilité d’être « sa propre visite » dans une société où « la solitude est très taboue ». Les textes touchent également aux difficultés relationnelles, aux luttes de notre époque, à la fatigue, à l’évasion. L’écriture des neuf morceaux s’est enfargée dans la pandémie, ce « gros tapis qui dépassait où on n’a pas eu le choix de mettre les pieds », illustre l’auteure-compositrice-interprète.

Après les versions guitare-voix, dix (!) artistes supplémentaires ont mis leur main à la pâte de l’album, presque toustes avec des instruments à cordes, pour en faire une courtepointe de textures qui ne dénaturent pas pour autant le folk très pur, accessible, « absurde et un peu malaisant » et « qui fait pleurire » de Sandra.

« C’est ça que j’aime dans la musique, les affaires un peu croches où tu sens que t’as accès à ce qui se passe », détaille-t-elle. Le folk de Nick Drake ou encore celui de la chanteuse allemande Sibylle Baier, que son fils a rendu public des années après son premier enregistrement, sont selon elle de cette catégorie. Comme Sandra aime le rappeler, les chansons de J’ai pas d’visite se « distinguent de celles des robots. » Même si les robots sont partout. « J’ai utilisé un ordi, malheureusement », concède-t-elle en riant.

Musique et ergothérapie

Pour mettre au monde son premier album, l’auteure-compositrice-interprète a puisé dans sa propre solitude, mais aussi dans celle des personnes rencontrées par l’entremise de son métier d’ergothérapeute, qu’elle pratique encore à temps partiel. Un fil invisible semble relier les deux domaines pour elle : « entrer en contact avec les autres, prendre soin, essayer de comprendre ce qu’on est, ce qu’on vit, ce qui nous unit, ce qui nous sépare ».

« Voir les vrais problèmes du monde et la solitude chez les gens, ça me brasse. J’ai besoin d’être consciente que ça existe pour continuer à créer et continuer à être moi. »

Sandra Contour tiendra deux lancements d’album, le premier au Pantoum le 23 mai en compagnie de Luan Larobina et le second au Quai de brumes le 29 avec Patrick Bourdon. Le lendemain, le 30 mai, elle performera dans le cadre du tout nouvel évènement de Half Moon Run, L’Appel Montréal, avant de prendre la route pour plusieurs autres festivals cet été.

J’ai pas d’visite est disponible dès aujourd’hui sur toutes les plateformes d’écoute.

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