crédit photo: Marc-André Mongrain
Tami Neilson

Tami Neilson – Don’t Be Afraid (****) | Une affaire de famille

Tami Neilson - Don't Be Afraid Tami Neilson Don't Be Afraid

Pour Tami Neilson, la musique est une histoire de famille. Lorsque la chanteuse d’origine canadienne a perdu son père, en 2015, elle était en plein enregistrement de ce nouvel album, Don’t Be Afraid.

Ron Neilson a toujours joué un rôle important dans la vie sa fille. Ensemble, et avec d’autres membres de leur famille, ils ont formé The Neilsons, un groupe de musique country populaire dans les années 90. Tami a ensuite fait carrière solo. Relocalisée en Nouvelle-Zélande, aujourd’hui mère à son tour, elle nous arrive avec un troisième album solo qui change quelque peu la donne, sur lequel elle se fait à la fois plus vulnérable et plus redoutable que jamais.

Celle qui ne faisait que du country sur Red Dirt Angel en 2008 a évolué au fil du temps vers un son qui inclut un autre genre qu’elle affectionne, la musique soul. Dynamite! en 2015 mêlait bien les deux styles et faisait découvrir une Tami quelque peu différente, plus débridée.

Don’t Be Afraid pousse encore plus vers la soul, au détriment du country. S’ajoutent à la voix immense de la chanteuse les émotions à fleur de peau, qui découlent évidemment de la perte de son père.

La chanson titre fut d’ailleurs écrite par Ron Neilson (sa dernière composition en carrière), que Tami a complété avec son frère Jay. La pièce débute sur la voix ensorcelante de Neilson qui est accompagnée d’une simple guitare électrique, puis ensuite viennent s’ajouter progressivement la batterie et la basse, et finalement les chœurs. Le ton est décomplexé, presque autoritaire. Ça nous incite à écouter attentivement, comme si Tami Neilson était tapie dans une ruelle inquiétante en pleine nuit et nous invitait à nous approcher, à ne pas avoir peur, à venir l’écouter de plus près.

Ce petit côté « je n’ai rien à perdre » domine l’album au complet. On sent la chanteuse libre de s’exprimer. Elle est totalement en contrôle de son art. Sur Holy Moses, elle nous emmène dans un rock aux accents gospel fort entraînant auquel il est difficile de résister.

Grande amatrice de Mavis Staples (et de toute la famille Staples, en fait), Neilson n’a rien à envier au niveau vocal à la grande dame de la soul. Petite blanche canadienne qui vit en Nouvelle-Zélande, Tami Neilson possède la voix chaude et riche d’une Noire du sud des États-Unis. Et l’attitude qui vient avec.

Ceci dit, tout sur ce disque n’est pas que force et énergie. Lonely, par exemple, en duo avec Marlon Williams, est l’une des plus belles ballades soul que vous aurez le plaisir d’entendre en 2016, et peut-être même depuis longtemps. Il y a beaucoup de Patsy Cline dans la manière dont la chanson est arrangée, et dans la façon de la chanter. Le passé country de Neilson n’est jamais bien loin.

Notons également, parmi les meilleurs moments de l’album, la belle folie de Loco Mama, chanson aux accents latins, ou encore Bury My Body, un fascinant hymne à la résilience humaine.

Mais la plus belle pièce de l’album est aussi sa plus simple. My First Man est un hommage de Neilson à son défunt père. En quelques magnifiques couplets, la chanson parvient à faire passer de longs frissons dans le corps de celui ou celle qui l’écoute. Toute personne ayant perdu un parent sera sûrement touchée par cette splendide chanson. Neilson n’a jamais été aussi vulnérable et touchante que pendant ces quatre petites minutes.

Nourrie involontairement par le décès d’un être cher, Don’t Be Afraid est une œuvre riche et poignante. Tami Neilson propose ici un disque mature, vivant, humain, qui ne peut laisser indifférent, car la chanteuse puise dans les émotions les plus simples, mais aussi les plus profondes. Celles reliées à la mort et la fragilité humaine, mais principalement celles reliées à la famille, ce à quoi on peut tous s’identifier.

La chanteuse se produira en spectacle à l’Upstairs Jazz Bar & Grill de Montréal le 5 octobre prochain.

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