crédit photo: Camille Glaudu-Drouin
Yonatan Gat

Taverne Tour 2024 – Jour 1 | Yonatan Gat déçoit, Ben Shemie explore avec succès et Dirty Milk nous réjouit

Pour la première soirée du Taverne Tour, à la Sala Rossa, on navigue entre le rock aux saveurs orientales de Yonatan Gat et l’exploration de Ben Shemie. Au sous-sol, c’est Dirty Milk qui nous apporte du bonheur.

Yonatan Gat : Un départ agréable mais qui lasse sur la longueur

C’est le musicien d’origine israélienne Yonatan Gat, maintenant exilé à New York, qui termine la soirée à la Sala Rossa, pleine à craquer. Il monte sur scène avec sa guitare, accompagné d’un excellent batteur, d’un claviériste qui joue également les parties de basse et d’un membre au rôle indéterminé, assis derrière un ordinateur portable et des boîtes. Est-ce qu’il fait des traitements du son, lance-t-il des pistes pré-enregistrées, tape-t-il sa liste d’épicerie? Ce n’est pas clair.

Le premier morceau est instrumental et offre des ambiances éthérées qui ne sont pas sans rappeler le son plein d’écho de Gilmour à la guitare et les nappes de synthé de Rick Wright, on se retrouve quelque part entre Pulse et Meddle de Pink Floyd. Mais avec une petite twist orientale à la guitare, dans la façon de jouer entre les notes de notre gamme occidental.

Le titre suivant est une petite mélodie entêtante qui est jouée jusqu’à plus soif. On retrouve également une partie de guitare slide très approximative et impressionniste qui ne me convainc pas.

Il nous remercie ensuite de l’avoir écouté chanter en hébreu et affirme qu’il a « toujours considéré son pays comme un endroit malade. Maintenant on sait pourquoi… »

Ensuite, c’est un titre agréable qui hésite entre klezmer et surf rock, on ne serait pas étonné d’y entendre une citation du Apache des Shadows et du Sleep Walk de Santo & Johnny.

Le tout sonne comme certaines pâtisseries orientales. Les premières bouchées sont très agréables, mais rapidement le sucre donne mal au cœur. Je quitte la salle avant la fin, accompagné d’autres personnes.

 

Ben Shemie : bien au-delà des sentiers battus, une originalité gratifiante et réussie

La soirée a commencé avec Ben Shemie, le guitariste des Suuns, qui nous présente un projet solo dont il a le secret, quelque chose d’extrêmement original et très intrigant dont le résultat est fort réussi.

Pour planter le décor, au pied de la scène, un micro est branché dans diverses pédales et traitement qui sont injectés dans quatre amplis guitare, modèle Roland Jazz-Chorus, de différents formats et puissances.

Shemie commence en promenant son micro devant les amplis et cela produit des variations de notes en hauteur pour un résultat abstrait mais étonnamment dynamique. Pour les titres suivants, il y a une piste rythmique très minimaliste et une piste mélodique essentiellement monophonique avec un son entre celui d’un orgue percussif et d’un koto japonais. Shemie pose sa voix, traitée plus ou moins radicalement. On reconnaît le refrain final qui chante Fuck you all à plusieurs reprises et qu’on apprécie!

Il y a aussi un ordinateur portable affichant un compteur qui augmente et qui semble correspondre au nombre de notes jouées. Est-il rémunéré à la note? Le mystère reste entier et le compteur termine autour de 6 500 notes…

Entre post-rock minimaliste et hyper-pop, on est ici dans le rayon champ gauche, totalement unique à son concepteur. Une prestation à mettre dans la catégorie très originale et une belle réussite. Avec cette proposition hors-norme, Ben Shemie a réussi à faire bouger la Sala Rossa très remplie ce soir.

 

Dirty Milk : c’est sale, sautillant et jouissif

En dessous de la Sala Rossa, il y a la Sotterenea et la soirée y commence avec le groupe montréalais Dirty Milk, un quartet à deux guitares, basse et batterie, aux accents math-rock et post-rock. Le groupe a sorti l’EP Squirm en septembre 2023 et c’est fort prometteur.

La voix principale du groupe n’est pas sans nous rappeler celle de Joe Casey de Protomartyr, avec un registre tout aussi limité mais une puissance sonore maîtrisée et persuasive qui happe notre attention.

C’est sale dans le son, les compositions sont sautillantes, tout pour me faire aimer ça. Au cours d’un titre, on a droit à un petit solo de batterie aux accents quasi jazz et le morceau reprend ensuite avec des accents disco à la Blondie. Un batteur de qualité. Il y a aussi un intermède à la basse qui amène au titre bruitiste Decomposition, une exploration culottée d’ambiances sonores qui ne plaira pas à tout le monde mais qui me réjouit dans sa dissonance et son côté WTF.

Dirty Milk est un groupe à suivre et livre une belle prestation, fidèle à son EP. Un peu de fraîcheur math rock en ce morne hiver, ça redonne goût à la vie!

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