Les Deuxluxes

Entrevue avec Les Deuxluxes | Survivre en brûlant la chandelle par les deux bouts

Quelques jours avant la sortie de leur deuxième album Lighter Fluid le 28 février, le Sors-tu s’est assis avec Les Deuxluxes. Une conversation bien campée dans un café, ça doit faire changement du quotidien nomade et rock’n’roll du duo. En effet, Anna Frances Meyer et Étienne Barry ont multiplié les voyages hors du pays depuis leur premier album complet en 2016.

Les deux membres, qui parlent un franglais à faire rougir Denise Bombardier, ont quand même eu un peu de temps pour se remettre de leurs émotions des dernières années. En fait, c’est durant cette courte pause qu’est né Lighter Fluid. Le disque a été écrit dans un chalet près de Sutton. « On est entourés de nature absolument fabuleuse et il n’y a pas un chat », explique Anna Frances.

Ce qu’on a réalisé en faisant ça, c’est que c’est trippy, psychédélique tout ce qu’on vient de vivre, toutes les histoires, toutes les personnes qu’on a rencontrées un peu partout dans le monde.

Los Doslujos

Leur dernière grosse tournée avait lieu à Cuba, sous un rythme éreintant, avec treize spectacles en seize jours. « On a eu deux jours de plage, explique Anna Frances. Mais sinon, on se promenait dans tous les transports possibles : un bus scolaire de l’église presbytérienne qui disait Dios es amor, ou en calèche avec une moto… »

« Les gens à Cuba ne peuvent même pas bouger de ville en ville sans un papier officiel. C’est beaucoup de vivre avec ce manque de liberté-là… Tsé, les bands cubains ne font pas de tournée à cause de ça. Nous, on a fait plus de tournée dans ce pays-là qu’un band cubain. C’est surtout une expansion de notre world view. »

C’est que Les Deuxluxes semblent aimer défricher les pays latins. Depuis une tournée en Argentine avec Chocolat et Foreign Diplomats en 2016, le groupe gagne des irréductibles tranquillement. « On a des pockets de gens qui apprécient notre musique un peu partout dans les Amériques, et là, en Europe, explique Anna Frances. Au fur et à mesure, tranquillement pas vite, autant que nos petites jambes et nos petits dos peuvent tenir nos guitares dans les avions! »

C’est d’ailleurs pourquoi le groupe partira entre autres faire des spectacles en Espagne au printemps. « On est allés là il y a un an, explique Étienne. On avait fait deux shows et ça avait vraiment super bien été. Et maintenant, on a un booker, un tourneur là-bas. Là c’est l’Espagne, mais on va y retourner faire d’autres pays, on va faire des petites runs. »

Tous ces voyages dans des pays hispanophones ont inspiré la création d’une pièce espagnole, Encender. Une chanson qui cadre avec le thème du feu, exploré amplement sur le disque. « C’est un mot qui s’est greffé à nous, raconte la chanteuse et guitariste. On a découvert ce mot-là en lisant un article sur nous. Les Deuxluxes encendieron en el scenario. Ça a vraiment allumé de quoi, c’était vraiment un beau mot sonore. »

Quand les Deuxluxes rencontrent les Tr’ondëks

En plus des nombreux concerts, l’idée d’un film musical — un genre de western réinventé — trotte dans la tête du groupe depuis un moment. Le film n’est pas une priorité pour le groupe pour l’instant, mais il sait déjà quel genre d’histoire il veut raconter.

C’est à ce moment-là de la conversation qu’Anna Frances se transforme en experte, et donne un cours 101 sur l’histoire de la communauté Tr’ondëk Hwëch’in et comment la ruée vers l’or de la fin du XIXe siècle l’a façonnée. Le groupe l’a rencontrée dans un passage au Yukon, et son récit a laissé une trace chez les deux membres de la formation.

« Ils nous présentaient leurs chansons. Ces chansons, ils les avaient juste reçues dans les années 1990, cent ans après le gold rush. Et c’était parce qu’ils avaient un chef : Chief Isaac. »

« Un espèce de dandy autochtone avec un chapeau haut de forme », insère Étienne avant de laisser sa collègue continuer.

Lui, il a vu les Blancs arriver pendant le gold rush et il s’est demandé : « Qu’est-ce qu’on a ici qui a plus de valeur que nos propres personnes? Il y a nos chansons. » Donc il a confié les chansons à la tribu en Alaska à côté. Et les Alaskiens ont entretenu les chansons pendant cent ans. Finalement, dans les années 1990, les Alaskiens les ont redonnées aux Tr’ondëks. Ils ont reçu leur culture qui leur manquait. Il y avait de l’or partout au Yukon, mais c’était pas l’or qu’ils prisaient : c’était leurs chansons. Alors on aimerait faire un genre de Western qui incorpore justement des artistes autochtones comme ça, qu’on se fasse un vrai western canadien qui représente tout le monde vraiment.

Avec tous les voyages et les aventures qui attendent les Deuxluxes dans les prochains mois, parions qu’ils sauront vivre de nombreuses péripéties inspirantes pour ce film. Aussi bien dire que toutes leurs aventures mériteraient déjà de se trouver sur grand écran, à l’affiche partout sur la planète.

D’ici là, Les Deuxluxes présenteront leur nouvel album en spectacle un peu partout au Québec, notamment ce soir à la Petite Boîte Noire de Sherbrooke et demain au Zaricot de Saint-Hyacinthe, ainsi que le samedi 7 mars au D’Auteuil de Québe, le 11 mars au Minotaure de Gatineau et le 26 mars au Théâtre Fairmount à Montréal.


* Photo par Shanti Loiselle.

Questions bonus en rafale

Jeans ou velours?

É : Moi c’est jeans, j’aime les jeans. Il y a rien comme une bonne paire de denim ou un beau petit coat en jeans.

AF: Oui mais Étienne, il habite en jeans, c’est pour ça! Pis moi, le velours, c’est le luxe! J’en veux!

Bière ou joint?

É : Une petite bière frette après une grosse journée, ça se prend bien. Mais c’est sûrement le petit joint qui apaise tous les maux, et qui fait réfléchir. Le petit joint a contribué à cet album-là. On jouait une heure, deux heures, on prenait un break pour marcher dehors…

AF: Et on va flatter les chevaux à côté! Tu fumes ton bong, tu penses à la vie.

Talons hauts ou bottes de cowboy?

É : La botte de cowboy, c’est mon talon haut.

AF : Et moi c’est fini les talons parce que je joue du wah-wah pedal. Je dois porter des bottes en peu plus sensibles, avec un chunky heel à la place d’un styletto. Mes genoux m’en remercient!

 

Iggy Pop ou Dolly Parton?

É : Je vais y aller avec Iggy, parce que je sais que tu vas prendre Dolly. Non?

AF : It’s hard. C’est comme deux piliers de notre identité. Ok, je vais prendre Dolly parce qu’elle a plus de tounes, pis elle peut carry une toune. Dolly, on l’a vue une fois à Toronto et elle a joué 11 instruments! Mais oui, moi je choisis Dolly. Et toi tu choisis Iggy. Et ça forme une paire parfaite

É : Et voilà!

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