Dead Can Dance

Dead Can Dance à Montréal: Entrevue avec Lisa Gerrard

Dead Can Dance est de retour en selle et sillonne l’Amérique du Nord afin de promouvoir son nouvel album Anastasis, premier disque de matériel original depuis Spiritchaser, en 1996. En vue du concert prévu au Centre Bell ce soir, Sors-tu.ca s’est entretenu avec Lisa Gerrard alors qu’elle se trouvait à Vancouver au début août.

C’est avec beaucoup de candeur et de passion que la chanteuse et musicienne australienne de 51 ans aborde cette nouvelle tournée et l’album qui l’accompagne.

Lisa Gerrard au Centre Bell, le 24 août 2012. Photo par Martin Charbonneau

Manifestement, sa réunion avec son âme sœur musicale Brendan Perry l’enthousiasme au plus haut point, même si la relation a toujours été des plus exigeantes pour les deux partis. « Le mariage créatif, c’est très différent du mariage traditionnel, explique-t-elle de sa voix sereine, apaisante. Il n’y a pas de censure. C’est très dangereux. Il n’y a pas vraiment de limites. Tu te dois de dire la vérité à l’autre, même si c’est parfois difficile à entendre ».

L’acrimonieuse rupture de Dead Can Dance en 1998 avait laissé des séquelles sur les deux membres, qui ont ensuite chacun œuvré de leur côté. Perry s’est lancé dans une carrière solo relativement discrète et sporadique, alors que Lisa Gerrard signait plusieurs trames sonores de films (notamment Gladiator, Mission Impossible II et Tears of the Sun avec Hans Zimmer), pendant que le culte autour de Dead Can Dance s’enrichissait avec le recul.

Comme le temps arrange souvent les choses, Gerrard et Perry ont entrepris de collaborer de nouveau, en 2005, pour une tournée qui s’était arrêtée au Théâtre St-Denis, à Montréal. Deux soirs, à guichet fermé.

Mais cette nouvelle phase de leur union musicale n’avait rien donné sur le plan créatif. « Je ne sais pas trop ce qui clochait, mais nous n’étions pas prêts à créer à nouveau ensemble. Il manquait quelque chose, de l’authenticité dans nos intentions peut-être».

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Anastasis : La résurrection

La pochette d’Anastasis

« Lorsque Brendan m’a appelée, l’an dernier, afin de travailler ensemble à nouveau, je crois que nous en étions tous les deux rendus là. Nous avions une connexion si singulière par le passé, sur le plan créatif, et nous croyons tous les deux qu’il était possible de la ranimer. Nous devions refaire l’architecture de notre communication, et c’est ce que nous avons fait avec toute la sincérité du monde. La magie était là de nouveau ».

Bien que ce huitième album de Dead Can Dance s’inscrive dans la suite logique de cette vaste carrière à explorer de façon audacieuse une certaine forme de fusion ethnique musicale, Anastasis représente également la renaissance, le renouveau, tant dans son titre (« anastasis » est le mot grec pour « résurrection ») que sur sa pochette. Sur la photo noire et blanc qui recouvre l’album, on y voit des tournesols desséchés, mais au garde-à-vous, sous un ciel couvert. « À première vue, on y voit la mort, mais en y réfléchissant, il y a une nouvelle vie qui s’en vient. Les tournesols renaîtront ».

C’est là la seule explication que Lisa Gerrard propose, préférant laisser au journaliste (et aux auditeurs en général) la liberté de choisir sa propre interprétation. « Tout ce qu’on pourrait se dire au sujet de l’album se trouve justement dans l’album », se contente-t-elle de dire, gentiment.

 

Artiste jusqu’au bout des ongles

Si Lisa Gerrard n’aime pas suggérer une interprétation possible à l’album, elle devient beaucoup plus loquace lorsqu’on discute de son statut d’artiste et au rôle sous-estimé que jouent les artistes au sein de notre société qui tend à s’éloigner du sens profond de la vie et de l’humanité.

Lisa Gerrard au Centre Bell, le 24 août 2012. Photo par Martin Charbonneau.

« En tant qu’artistes, nous faisons un pied de nez à l’horrible médiocrité et à la superficialité qui nous entourent, afin de nous rapprocher de qui nous sommes réellement. Tu n’obtiens pas cela en magasinant chez IKEA ou en écoutant la radio commerciale ».

« Je dis ça, mais du coup, je comprends l’attrait pour ce genre de choses. J’aime bien, moi aussi, aller voir un Broadway ou m’emmerder en écoutant de la musique créée pour les gens qui n’aiment pas la musique. Mais je me dis qu’il doit y avoir autre chose dans nos vies, quelque chose de plus authentique, qui nous touche plus profondément ».

Sa réflexion sur le rôle complexe de l’artiste dans notre société moderne trouve sa conclusion naturelle, juste au moment de clore l’entrevue :

“Nous sommes des oracles: nous rapportons de l’information provenant de l’abstrait. Nous éveillons les engourdis. Plus que jamais, je comprends que c’est de là que provient notre nom. Dead Can Dance… ».

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; Citation en vrac
Les paradoxes de l’ère numérique

« Si nous ne vivions pas à l’ère de YouTube, je crois que plusieurs jeunes gens ne nous découvriraient pas.

En même temps, je déteste l’idée que notre premier concert soit filmé par des centaines de cameras. Je n’aime pas l’idée que certaines personnes préfèrent ça à l’intimité que nous proposons en spectacle. »

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