Critique théâtre | Empreintes au théâtre La Chapelle

Tout débuta à partir d’une petite annonce publiée dans les journaux et sur le web. Grâce à cet appel à tous, l’auteur et metteur en scène Geneviève L. Blais pu recueillir le témoignage d’une cinquantaine de femmes et ainsi les transposer au théâtre. Elle prendra aussi des extraits du roman d’Annie Ernaux, L’événement, pour compléter le collage de récits. Sept femmes sur scène se raconteront, elles raconteront leur histoire : celle de leur avortement. Sans aucun tabou, sans aucun ­jugement.

Empreintes-0689 Maxime CôtéUne n’a que 16 ans, elle ne veut pas avoir d’enfant maintenant; une autre n’a jamais voulu devenir mère; pour une autre sa carrière de danseuse prime avant tout. Paule Baillargeon, elle, donne vie aux mots d’Annie Ernaux, jeune fille enceinte en 1964 qui ne sait quoi faire pour s’en sortir. Chacune à une raison qui l’habite pour ne pas désirer cette grossesse, la décision ne s’en trouve pas plus facile à prendre pour autant.

Avec Empreintes, Geneviève L. Blais souhaitait parler de l’avortement par une approche humaine et sensible tout en laissant de côté le monde des statistiques et de la médecine, en oubliant le côté froid et chirurgical d’une interruption volontaire de grossesse. Elle y est parvenue avec brio. Nous nous attachons à l’adolescente, interprétée par Kathleen Aubert, qui a peur de se faire « arracher la face par sa mère ». Vous serez bouleversé par la dépression d’une jeune femme forte et indépendante, magnifiquement jouée par Isabelle Guérard. Vous vivrez la passion d’une féministe engagée, bénévole à SOS grossesse, qui ne se voit pas être mère, qui veut pouvoir choisir la vie qu’elle désire.

Empreintes-0624 Maxime CôtéAvant tout, la sincérité qui se dégage du texte frappe, elle en est même saisissante. Les comédiennes nous livrent avec honnêteté, humour et douceur les craintes, les hésitations, parfois même les petits bonheurs, vécus lors d’une grossesse non désirée. Sans aucun doute, ce sont des moments de vies bien réels qui se jouent sous nos yeux. La scène n’est pas habitée par des personnages de fictions, mais par des femmes qui se confient à nous, en toute simplicité.

Ces femmes évoluent dans un décor à la fois sobre et énigmatique — un mobile métallique rappelant un embryon — et une mise en scène épurée et rythmée. Les héroïnes déambulent, sans vraiment interagir entre elles, à la fois seules et entourées pour vivre cette épreuve. Par moment, Victoria Diamond ponctue le récit de chorégraphies de danse moderne, petits instants de grâce qui adoucissent le propos et mettent en valeur ce corps qui change.

Malgré le sujet, il ne faut pas croire que la pièce s’adresse uniquement à un public féminin, les hommes pourront eux aussi être touchés par le récit de ses femmes.

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La pièce Empreintes est présentée à La Chapelle  jusqu’au 5 mai 2013

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