Rencontre entre l’OSM, Adams et Volodin | Technique indiscutable mais pas d’alchimie au rendez-vous

Cette semaine, l’OSM se joignait au mouvement de célébration des 70 ans de John Adams, un compositeur américain très prolifique, et invitait pour ces trois concerts le pianiste russe Alexei Volodin. Au programme, deux oeuvres majeures d’Adams qui ont encadré la célèbre Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachmaninov pour piano et orchestre.  Une belle manière de faire d’une pierre deux coups en nous faisant découvrir ce compositeur et le pianiste russe qui n’avait pas encore été invité à Montréal.

Common Tones in Simple Time, la première pièce d’Adams de la soirée, est une oeuvre appartenant au courant minimaliste, dans la lignée de Steve Reich. D’une texture harmonique très plane et horizontale émergent quelques cellules thématiques. Le tapis sonore est en perpétuel mouvement, évolue lentement et ne s’arrête jamais. La fin se termine dans une série d’harmoniques aux violoncelles mêlées à des archets frottés sur les lames des xylophones donnant lieu à des sonorités presque irréelles, presque comme les spectres harmoniques naturels des notes. Nagano a proposé une version plutôt convaincante de cette première pièce, en y respectant l’ambiance flottante et fantomatique.

Kent Nagano

La Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachmaninov avec le pianiste Alexei Volodin fut en revanche l’objet de plusieurs questionnements. Dès les toutes premières notes, on a senti que l’orchestre serait fragile. Ce fut vérifié très rapidement. Il a été très difficile de suivre le discours tant l’accompagnement orchestral manquait de construction dans cette oeuvre tortueuse et décousue. Les vents accusaient parfois un temps et plus de retard sur la partie de piano alors qu’il s’agissait déjà du 2ème concert avec ce programme. Du côté de Volodin, c’est une version très classique et maîtrisée qu’il nous a proposée, mais sans aucune prise de risque. Cette recherche de la perfection fut probablement atteinte du point de vue de la réalisation technique, avec un toucher plutôt souple et linéaire mais un son parfois sec. Tout est calculé au millimètre près et la précision du jeu est impressionnante mais il nous a très clairement manqué une certaine explosivité et une libération expressive. Nous ne sommes pas en face d’une démonstration technique cependant mais associée à un orchestre fragile, l’interprétation assurée de Volodin dans la Rhapsodie, n’offrit aucune connexion ni semblant de cohérence. Nous, spectateurs, nous trouvons alors face à deux entités distinctes et ne savons pas vraiment quoi suivre, nous plongeant alors dans une perplexité auditive qui nous laisse sur notre faim.

Alexei Volodin

Alexei Volodin

Harmonielehre de John Adams encore, dernière pièce au programme de la soirée, est sans conteste une grande oeuvre pour orchestre du 20ème siècle. Et Nagano sembla aussi beaucoup plus concerné par l’interprétation de cette pièce inspirée du traité de Schoenberg sur l’harmonie. On y retrouve sans aucun doute cette empreinte minimaliste déjà entendue dans la première pièce, mais l’écriture y est moins horizontale. Nagano, précis et dynamique, a su tirer son orchestre lors de ces trois mouvements de caractères très différents : un premier mouvement emprunt d’accents mahlériens avec de grandes envolées lyriques, un second d’une écriture plus étrange et découpée qui s’associe parfaitement à l’idée de maladie et faiblesse physique et mentale, et un troisième qui rejoint la première pièce, s’élevant peu à peu vers des couleurs célestes. L’orchestre, mieux traité que dans la pièce précédente, a pu se libérer un peu et faire ressortir des motifs thématiques dans une balance bien maîtrisée.

En guise de bis, Nagano, qui a remercié le public montréalais de sa fidélité et de lui permettre d’explorer tous les types de répertoires (et il est vrai que l’on ne peut pas reprocher au chef d’orchestre de prendre des risques avec la programmation de l’OSM) a offert une courte pièce de quatre minutes, énergique et vibrante.

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