David Giguère

Entrevue avec David Giguère | Le danger et la remise en question

Fort d’un lancement réussi au Club Soda mardi soir, David Giguère se dit particulièrement fier d’avoir conçu un album plus épuré. Bien assis au fond de l’étroit mais sympathique Café Odessa rue Beaubien, l’auteur-compositeur-interprète revient sur le processus de création qui l’a mené vers Casablanca.

Beaucoup plus personnel, ce deuxième opus a été écrit dans l’urgence, cet été. « Pendant deux ans, je n’avais pas écrit du tout parce que j’étais trop occupé à tourner, raconte-t-il. C’est juste cet été que les 12 tounes ont débarqué. Au départ, c’étaient uniquement des petits textes improvisés, écrits rapidement, que j’ai ensuite retravaillés et fignolés. L’important, c’était de tout faire ça dans un court laps de temps pour m’éviter trop de questionnements. »

En studio, le fonctionnement est simple : David ne veut pas trop en mettre et préfère laisser les chansons parler d’elles-mêmes. « Dès les premières discussions avec le réalisateur Jonathan Dauphinais, on s’est dit qu’on voulait quelque chose d’épuré, de plus minimaliste. Il fallait qu’on se concentre sur les réels instruments que la toune a besoin plutôt que d’essayer de jouer toutes les notes qu’il y a sur le piano. »

L’effet Kanye

Résultat : un album beaucoup plus audacieux, mais moins accrocheur que son prédécesseur Hisser haut, paru en 2012. L’album Yeezus de Kanye West est d’ailleurs intervenu rapidement dans le processus créatif de Casablanca. « Jonathan m’a dit de l’écouter attentivement », indique David. « La plupart des chansons sont justement assez épurées : elles ont une ligne de basse, une ligne de synth et une ligne de voix. On voulait se permettre d’essayer des trucs comme ça, quitte à se tromper. Fallait absolument éviter la redite. »

À cet effet, l’influence Kanye prend encore plus de place. « Je trouve ça intéressant des artistes de cette stature-là qui pourraient faire le show que tout le monde a vu, avec des chanteuses et des danseuses, mais qui décident de faire autre chose, complètement. Je trouve ça noble, en tant qu’artiste, de constamment me mettre en danger. »

Un vidéoclip plate ?

C’est notamment ce qu’il a fait en confiant la réalisation de son vidéoclip La Pornographie à Baz, réalisateur reconnu pour ses concepts aventureux.  Pendant plus de quatre minutes, on y voit David, assis devant un simple fond rose, fredonner sa chanson en répondant à ses textos, pendant que la caméra s’avance tranquillement vers son visage. « Je me suis battu pour que ce clip-là sorte », confie-t-il.

« Certaines personnes qui trouvaient ça plate m’ont même conseillé d’en faire un teaser à la place ! C’est ridicule parce qu’à ce moment-là, ça serait devenu un outil promotionnel, et non une œuvre. Mon but là-dedans, c’était uniquement de présenter la toune en lui laissant toute la place. Je crois que ça a fonctionné parce que la grande majorité des gens m’ont avoué qu’ils avaient écouté le clip au complet. »

Tous les choix artistiques qu’il a faits jusqu’à maintenant le satisfont. Il remercie d’ailleurs son étiquette, Audiogram, de lui avoir permis de contrôler l’entièreté des étapes de création : « Quand j’étais en studio, je voulais que personne n’entende le produit final, excepté les musiciens. Ma gérante et ma maison de disques ont été fuckin’ gentils de me faire confiance et d’embarquer dans le projet sans rien changer. »

La tournée panquébécoise s’en vient assez rapidement. D’ici là, David ne se presse pas. « Je vais éventuellement builder un band, peut-être bientôt… Je veux que la sortie de l’album se fasse bien, donc je prends mon temps. »

 

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