crédit photo: Émanuel Noav
Pixies

Pixies + Modest Mouse à la Place Bell | Un pilote automatique efficace

Au diable le Grand Prix de Montréal! Dimanche dernier, c’est Pixies et Modest Mouse qui étaient au menu pour bon nombre de représentants de la génération Y (dont certains avaient amené leur descendance) et d’amateurs de rock alternatif, qui ont bravé les rues barrées, les détours et les foules compactes avec des casquettes de l’écurie Ferrari pour se rendre jusque sur la Rive-Nord assister à ce programme double pas piqué des vers, où se côtoyaient aisément vieux hits et morceaux plus obscurs, pour le bonheur d’à peu près tout le monde.

Modest Mouse : entre surprises et valeurs sûres

Après une première partie particulièrement peu mémorable de Cat Power (voir plus loin), c’est la bande à Isaac Brock (le seul membre original restant de Modest Mouse) qui s’est exécutée sur la scène de la Place Bell, ouvrant le bal avec la grandiose The Stars Are Projectors, un petit bijou progressif de 9 minutes, avec ses distorsions et ses notes microtonales typiquement Modest Mouse, tirée du brillant album The Moon & Antartica (2000), paru il y a déjà près de 25 ans.

Comme elle le fait toujours, la formation originaire de l’État de Washington nous avait concocté une setlist différente des autres soirs, nous réservant quelques surprises peu jouées sur scène, dont la survitaminée Dance Hall (bonne chance de ne pas se déhancher frénétiquement sur les contagieuses lignes de basse), l’exclusive Third Side of the Moon (qui figurera probablement sur un éventuel futur album) ou la très sous-estimée Be Brave. C’est toutefois leur brillante reprise de A Forest de The Cure qui a occupé l’un des moments les plus mémorables de la prestation : pendant quelques minutes, tous les cinquantenaires et soixantenaires présents étaient au Cégep à nouveau. D’autres morceaux comme Dashboard et la superbe Dramamine ont aussi fait le bonheur des mélomanes.

Également fidèle à ses habitudes, Isaac Brock nous réservait quelques interventions plutôt étranges au micro dont on n’a pas compris grand-chose, sauf qu’il était un fan invétéré du film Le Roi Lion (oui, étrange de même!). Le micro du chanteur était d’ailleurs mal calibré, si bien que sa voix était un peu trop souvent enterrée par la batterie et les guitares tonitruantes de ses collègues (la Place Bell n’a jamais été reconnue pour la qualité de son acoustique).

Évidemment, il a fallu attendre la fameuse Float On, plus pop, pour réunir absolument toutes les générations sous un hymne commun. À ce jour, il s’agit assurément du plus gros hit de Modest Mouse, et l’un des seuls morceaux joués soir après soir par la formation (imaginez le sacrilège de l’omettre!) Même si on peut trouver un peu regrettable qu’un groupe aussi majeur en soit réduit à une seule chanson par plusieurs, personne n’a boudé son plaisir d’entendre cet incontournable.

Le public a toutefois semblé devenir plus ronflant par la suite, et les musiciens s’en sont visiblement rendu compte, écourtant abruptement leur set 5 minutes avant la fin prévue pour s’en aller sans un au revoir. Dommage, car il restait assez de temps en dernière ligne droite de la prestation pour terminer les choses avec un peu plus de panache : plusieurs adeptes de la première heure auraient assurément pris un autre classique de The Lonesome Crowded West (1997) comme Shit Luck, Teeth Like God’s Shoeshine ou Doin’ the Cockroach pour finir ça en beauté!

On peut toutefois dire mission (relativement) accomplie pour Modest Mouse qui, bien que clairement sur le pilote automatique, a su livrer la marchandise, réussissant là où Cat Power a échoué : réchauffer la salle!

Pixies : poursuivre sa route, pour le meilleur et pour le pire

Assurément l’une des formations rock les plus élémentaires des années 1990, Pixies continue de rouler sa bosse depuis sa résurrection en 2013. Il fallait voir d’ailleurs la quantité de chandails à l’effigie du groupe dans la foule pour confirmer ce dont on se doutait déjà : le quatuor originaire de Boston était clairement le clou de la soirée pour une écrasante majorité. Et si le son un brin vaseux pendant Modest Mouse pouvait nous laissait craindre le pire pour Pixies, dont le style très aride et rugueux peut facilement devenir cacophonique si mal calibré, les doutes ont rapidement été dissipés dès les premières notes de U-Mass en lever de rideau (fiou!)

Continuant de surfer sur la vague de succès créée par ses 4 premiers albums, parus entre 1988 et 1991, le groupe nous réservait un véritable feu roulant de vieux classiques, bien conscient, sans doute, que les nouveautés de son répertoire ne sont pas du même calibre. Résultat : seules deux nouvelles chansons (l’exclusive Vegas Suite et Death Horizon) étaient au programme, et les albums Doolittle (1989) et Trompe le Monde (1991) étaient à l’honneur (parions que personne ne s’en est plaint!).

Rien de bien nouveau sous le soleil, donc, excepté une nouvelle bassiste (Emma Richardson, ex-membre de Band of Skulls), remplaçant au pied levé la bassiste Paz Lenchantin qui remplaçait elle-même Kim Deal depuis une décennie. Ce changement un peu brusque, survenu de façon assez cavalière, laisse entrevoir une relation un brin acrimonieuse au sein des membres de la formation menée par le chanteur et guitariste Black Francis. Pixies semble donc appartenir à cette catégorie de vieux groupes où plus personne ne s’apprécie vraiment, mais où on s’endure pour continuer de faire vivre la légende, pour le meilleur, pour le pire, et probablement aussi pour le chèque.

Dans ses nouvelles fonctions de bassiste, Richardson s’est bien tirée d’affaire, affichant toutefois un côté beaucoup plus discret et en retenue que ses prédécesseures; contrairement à Kim et Paz, elle ne semblait pas accompagner Black Francis au micro. On aurait plutôt dit que les voix féminines des morceaux étaient assurés par une bande préenregistrée. Un brin bizarre, mais ça n’a pas semblé déranger, même si cela impliquait de ne pas entendre la classique Gigantic, malheureusement laissée de côté pour cette tournée. Les fans ne sont toutefois pas resté en reste puisque plusieurs autres classiques étaient prévus : Monkey’s Gone to Heaven, Hey, Here Comes Your Man, et, bien sûr l’incontournable Where Is My Mind?, qui, à l’instar de Float On plus tôt, a eu un effet électrisant instantané sur la foule.

Tout comme ses compères de Modest Mouse, Pixies a l’habitude de proposer une liste de chansons différente chaque soir, même si les classiques joués demeurent les mêmes. À Laval, nous avons eu droit à U-Mass, Debaser, Alec Eiffel (recommencée deux fois) ou Hang Wire parmi les chansons occasionnellement jouées, tandis que la veille, à Toronto, ces chansons étaient remplacées par Subbacultcha, Cactus, Is She Weird? ou Mr. Grieves. Cela donne l’avantage au groupe de ne jamais être pleinement prévisible et, probablement aussi, de ne pas trop se lasser de ses chansons.

Sans s’adresser une seule fois au public (même pas le classique « thank you Montreal! » que nous lancent généralement les artistes à Laval) le groupe a enchaîné 80 minutes de morceaux souvent rentre-dedans. On le sait : Pixies n’est pas trop fort sur le jasage et les mercis. Le crowd work? Pas trop le truc de Black Francis, qui préfère se blottir derrière un gros mur de son, même si ça contribue à bâtir un mur de distance entre lui et son public. Qu’importe, tout le monde a pu reprendre le chemin vers le Métro Montmorency la tête sans doute remplie de souvenirs nostalgiques d’une époque pas si lointaine où le rock abrasif était à l’honneur.

Cat Power : vous avez dit laborieux?

Si jamais certains mélomanes s’étaient principalement déplacé pour entendre Cat Power en première partie, ceux-ci ont probablement passé une bien moins belle soirée que les autres. En effet, si l’artiste s’est forgée une prestigieuse réputation sur disque, c’est une toute autre paire de manches sur scène. Disons que ce n’est pas la présence scénique qui l’étouffe! Et même des morceaux comme The Greatest et Cross Bones Styles tombent complètement à plat. Les jeunes diraient même que c’était assez cringe (nos excuses à l’OQLF).

Arrivant sur scène en nous parlant en espagnol (?) la chanteuse de 52 ans est restée dans la pénombre presque tout au long de sa performance, et le mot « long » est bien choisi ici, malgré le fait que ça n’ait duré qu’une petite demi-heure.

Croyez-moi : c’était plus qu’en masse, et contrairement à Modest Mouse ou Pixies, personne n’aurait pris de rappel!

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