crédit photo: Thomas Mazerolles
Seth

Messe des Morts XI – Genèse | La morsure du Christ et du black metal

Une transcendance blasphématoire avec des rituels musicaux diaboliques dans une ancienne église : c’est là toute la beauté de la Messe des Morts. Le festival La Messe des Morts présentait ce jeudi une première soirée de haute qualité, qui proposait exclusivement des groupes du Québec et de la France. Une genèse toute en force, menée par de remarquables prestations de Seth, Miserere Luminis et Pensées Nocturnes, ainsi que de Sotherion et Vespéral.

Si certains peuvent tendre à penser que le black metal est monotone, notamment dans une succession de plusieurs groupes en festival, cette première soirée pouvait déjà leur prouver tout le contraire, avec une programmation audacieuse qui a vu des groupes défendre des univers différents, et nous mener à travers de ténébreuses variations.

L’ouverture du bal était confiée à Vespéral, nouvelle formation montréalaise où on retrouve notamment des membres d’Ossuaire. Le quartet défend son premier effort, Nuits blanches, présentant un black metal à clous infusé de dungeon synth avec un clavier en live, donnant une couleur 90’s et seconde vague jusque dans le look, bien balancée par un côté cru presque punk dans leurs compositions, d’une efficacité remarquable sur scène, une formation à surveiller.

S’ensuivaient les Français de Sotherion, nouveau projet du musicien BST, un black metal teinté de chant death, sorti des entrailles de l’underground avec un son raclant la noirceur de leur démo Schwarmgeist. Des sonorités très graves et ténébreuses, restant dans un registre assez classique, manquant un peu de dynamique sur la longue, mais non sans une certaine puissance et efficacité.

Changement d’atmosphère avec la première venue en Amérique du Nord des inclassables Pensées Nocturnes, actifs depuis 2009 sur album, mais depuis 1909 dans leur univers absolument déjanté.

Le groupe parisien nous emmène de force – le chanteur plongeant dans la foule pour provoquer le mosh-pit — dans un étrange délire aux couleurs bleu-blanc-rouge encrassées de vin et de suie, jouant sur des antagonismes comme les corpse-paint avec les marinières, les guitares électriques avec l’accordéon, ou encore les blast-beats avec des valses en trois temps.  Un groupe de black metal et une fanfare musette qui auraient fait un trip d’acide noir dans un cirque Vaudeville début XXème siècle dans la vieille France, un cauchemar métallique avant-gardiste et progressif teinté de cuivres divers, trombone et trompette. Original et captivant, un joyeux bordel maîtrisé musicalement, passant du jazz au death, un des grands moments de la soirée.

Changement d’univers avec le retour attendu d’une formation québécoise rare sur scène, composée de membres de Gris et Sombres Forêts : Miserere Luminis. Auteurs d’un splendide nouvel album, Ordalie, le groupe aux masques vénitiens et aux trois guitares nous fait descendre dans les confins de leur mélancolie, nous plongeant avec des arpèges malsains, un archer sur les cordes de guitare électrique ou des interludes de piano dans leurs atmosphères poétiques et lacérés de douleur. Le groupe fait notamment la différence avec des interventions vocales de presque tous les membres. Non sans oublier de jouer des extraits de leur premier album éponyme, Miserere Luminis livre une excellente prestation, affirmant encore sa personnalité musicale et artistique avec une griffe unique.

La tête d’affiche voyait un autre retour, celui du groupe français Seth. Après leur excellent dernier passage au festival, immortalisé par un épique cliché de notre photographe étant devenu une pochette d’album, on pouvait se demander si les Parisiens seraient capables d’accoter la mise. Ils partaient déjà gagnants en défendant un remarquable nouvel album, La Morsure du Christ, largement représenté ce soir. Comme lors de leur dernier concert, le rideau de fond de scène est tiré pour projeter directement sur le chœur de l’ancienne église la pochette de leur album, qui n’est autre que Notre-Dame de Paris en flammes, transcendant à nouveau de symbolismes et paradoxes.

La scénographie est donc encore une fois incroyable, mais dommage cependant, la définition du son laisse à désirer par endroits, notamment dans les guitares. Un je-ne-sais-quoi qui manque, une texture pour emmener à l’ultime consécration, empêchant parfois d’apprécier à leur juste valeur des morceaux de qualité, Seth n’oubliant pas de jouer des classiques des Blessures de l’Âme comme la Quintessence du Mal. Le groupe fini son spectacle par Le Triomphe de Lucifer, et un beau rituel final de flammes et de sang voyant plusieurs nonnes consacrées sur l’autel de Seth, qui aura encore livré une prestation mémorable.

 

Photos en vrac

Vesperal

Sotherion

Pensées Nocturnes

Misere Luminis

Seth

Vos commentaires