crédit photo: Antoine Giroux
Jonathan Personne

Lancement de Jonathan Personne à POP Montréal | Longue soirée… dans le bon sens du terme

Et c’est parti pour POP Montréal! Le festival qui mêle artistes émergents et émergentes et autres au rayonnement international se délecte d’une 21e édition telle qu’on les connaissait avant la Covid-19. Sors-tu? y était le 28 septembre dernier pour le lancement du nouvel opus de Jonathan Personne, soirée électrisante – et améliorée par la présence de Yocto et d’Hélène Barbier.

Hélène Barbier : trésor caché décomplexé

Première artiste de la première soirée du festival, qui ratisse large dans les scènes de la métropole (Rialto, Ministère, Quai des Brumes, l’Esco – entre autres), la Française établie à Montréal Hélène Barbier a livré une performance en pente montante agréable et bien scellée.

Quelque peu cachée derrière son épais toupet carré, tout de noire vêtue et sélective de ses interactions avec le public, l’artiste d’avant-pop va droit au but. « On a encore 4 chansons », lance-t-elle avant d’ajouter: « ouais, normalement, on dit ça à la dernière… » Des rires fusent : Hélène Barbier est une musicienne attachante, mais pas une oratrice.

La guitare électrique est parfaitement pincée, la batterie creuse et libérée, le son groovy, joliment fracturé et haletant par moments. La voix de la chanteuse est une voix-couverture : elle enveloppe les mélodies, les complète. Bouche les trous. Parce que des trous, il y en a. Les pièces somme toute simples donnent parfois lieu à des fins abruptes qui laissent sur notre faim.

« We don’t need to go to this party / We don’t need to go to this show », chante Hélène Barbier de sa voix aérienne et complète. Pour son audace et sa signature à la fois naïve et complexe, on n’hésite pas : c’est une bonne chose d’être allé au sien.

Yocto : un punk au dos large

Avec Yocto, on change de registre. La formation montréalaise post-punk nouvellement née impose sa présence avant même les premières notes et cette soif de performer se sentira jusqu’aux dernières. La chanteuse Yuki Berthiaume est d’une aisance et d’une vivacité impressionnantes étant donné la courte vie du groupe. Son usage du spoken word laisse malheureusement place à un peu de redondance en début de spectacle, mais c’est sans crainte : elle s’évaporera bien vite.

Malgré une trame générale délicieusement punk, déjantée et rebondissante, Yocto a plusieurs cordes à son arc. Toujours en se retenant de sauter au plafond, l’auditoire passe de morceaux plus dansants et décontractés à d’autres plus sombres, voire ténébreux. C’est rafraîchissant. Mention aux claviers stridents et éclatés qui, combinés aux voix, gracient Yocto d’une allure presque théâtrale.

Le chant teinté d’urgence et d’insistance de Yuki Berthiaume rappelle celui d’Éliane Viens-Synnott dans la nouvelle formation La Sécurité, qui comprend notamment le chanteur de Choses Sauvages Félix Bélisle. Assez pour deviner une ère punk québécoise émergente? Le temps le dira. En attendant, ça fait d’excellents shows.

Jonathan Personne : sans pause et sans accroc

Après tout, le lancement, la raison d’être de la soirée, c’était Jonathan Personne et son nouvel album éponyme. Huit chansons, ça se joue bien vite, et le band ne s’est heureusement pas limité à son récent contenu. C’est aussi à la moitié de son excellent avant-dernier album Disparitions que la foule du Théâtre Fairmount a eu droit. Foule, il faut le mentionner, moins nombreuse qu’espérée. Il y a presque un an, en novembre 2021, le groupe Corridor (dont Jonathan Robert est un membre principal) avait attiré plus d’adeptes et plus d’enthousiasme.

N’empêche! Jonathan Personne et ses musiciens et musicienne ont été à la hauteur de leur œuvre. Pour des morceaux qui n’avaient pas encore franchi les portes du studio, pandémie oblige, le résultat est fort réussi. « On n’a jamais fait ces chansons-là sur scène. J’en profite. Désolé », s’excuse Robert dans un demi-sourire en milieu de performance. Aucune excuse n’est requise : le set s’étire sur plus d’une heure, et pourtant, les minutes filent en poussière. Et quel plaisir de recevoir sa musique sur scène, elle qui sonne souvent lointaine et gorgée d’écho, presque inaccessible.

Le talent indiscutable des membres du groupe – et de la choriste flamboyante, seule femme du projet – fait de l’univers pop-rock psychédélique de Jonathan Personne un tout hyper professionnel et abouti. Dans les écouteurs, sa musique flotte continuellement quelque part entre nostalgie et exaltation ; sur scène, c’est cette deuxième ambiance qui prend le dessus. Un homme sans visage et À présent incarnent entre autres ces moments de pur laisser-aller, lors desquels les spectateurs et spectatrices sautillent sur les notes, visiblement charmé(e)s.

La douce et magnifique Gold Rush a ralenti la cadence de la soirée le temps de quelques minutes. Ce n’est que sous les éclairages jaunâtres et la guitare berçante qu’on savoure un quasi-calme. Il faut le dire, les morceaux se sont enchaînés presque sans interruption. Mis à part quelques imperfections au niveau du chant et une aisance plus marquée lors des chansons de Disparitions que celles de Jonathan Personne, ce dernier peut dormir sur ses deux oreilles : de ce lancement, on ne retient que l’électricité palpable dans l’air du Fairmount.

POP Montréal se poursuit jusqu’au 2 octobre prochain.

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